Sur le premier moyen :
Attendu qu'à la demande du sieur X..., tendant à ce que lui soit reconnu la propriété de l'enseigne commerciale "Radio-Flers", dont il faisait usage, à l'exclusion du droit prétendu sur elle par la dame Y... qui en avait fait usage après lui et lui causait de la sorte un dommage dont elle lui devait réparation, l'arrêt attaqué à répondu en déclarant que ladite enseigne, formée de deux mots appartenant l'un et l'autre au domaine public n'était susceptible d'aucune appropriation particulière et a débouté X... des fins de son action ;
Attendu que le pourvoi reproche à cet arrêt d'avoir fondé sa décision sur un moyen qui n'avait pas été invoqué devant les juges du fond, les parties s'étant bornées à contester l'antériorité de la propriété du nom et de l'enseigne par elles respectivement utilisés ;
Mais attendu que le juge, saisi d'une demande, est tenu d'en apprécier le fondement juridique par rapport aux lois qui régissent la matière, alors même que l'application de ces lois n'aurait pas été formellement requise dans les conclusions des parties ;
Que, de ce chef, l'arrêt attaqué, dûment motivé, a donné une base légale à sa décision, sans violer aucun des textes visés au moyen, qui doit être rejeté ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil : "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer" ;
Attendu que l'enseigne et le nom commercial peuvent faire l'objet d'un droit privatif juridiquement protégé lorsqu'ils ne sont pas l'indication pure et simple de la nature de l'entreprise ;
Attendu que pour repousser, par infirmation du jugement du tribunal de commerce de Flers, l'action du sieur X..., et rejeter sa demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale de la dame Y..., l'arrêt attaqué s'est borné, sans examiner les circonstances de la cause, à affirmer que l'appellation Radio-Flers était du domaine public ;
Mais attendu que cette appellation, qui n'est pas l'expression banale et générique d'une activité professionnelle, peut éventuellement être protégée contre tout acte de concurrence déloyale ;
Qu'en statuant comme il a fait, l'arrêt attaqué n'a pas donné à sa décision de base légale,
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'appel de Caen, le 26 novembre 1940.