STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- X... ANDRE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 11E CHAMBRE, EN DATE DU 19 DECEMBRE 1980, QUI L'A CONDAMNE, DU CHEF DE RECEL, A 6 MOIS D'EMPRISONNEMENT ET 10 000 FRANCS D'AMENDE ET A DES REPARATIONS CIVILES ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 460 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DU DELIT DE RECEL ;
AUX MOTIFS QUE LE DEMANDEUR NE SAURAIT SERIEUSEMENT PRETENDRE QU'IL IGNORAIT LA PROVENANCE FRAUDULEUSE DES TABLEAUX ACHETES PAR LUI A Y... ALORS QU'EN PROFESSIONNEL AVERTI, IL DEVAIT NECESSAIREMENT SE RENDRE COMPTE, EU EGARD A LA VILETE DU PRIX PAYE, QU'IL FAISAIT L'ACQUISITION DE TOILES QUE Y... NE POUVAIT S'ETRE PROCURE QU'A LA SUITE D'UN VOL ;
QUE LA PRECIPITATION AVEC LAQUELLE LE DEMANDEUR S'EST DEBARRASSE DE CES TABLEAUX EN REALISANT UN BENEFICE SUBSTANTIEL PROUVE ENCORE, S'IL EN ETAIT BESOIN, LA MAUVAISE FOI DU PREVENU ;
ALORS QUE, D'UNE PART, L'INCERTITUDE DANS LES MOTIFS D'UN JUGEMENT EQUIVAUT A LEUR INSUFFISANCE ET ENTRAINE LA NULLITE DE LA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LA COUR D'APPEL, QUI S'EST BORNEE A AFFIRMER QUE LE PREVENU NE SAURAIT PRETENDRE QU'IL IGNORAIT LA PROVENANCE FRAUDULEUSE DES TABLEAUX ACHETES, A STATUE PAR DES MOTIFS INSUFFISANTS ET N'A NULLEMENT ETABLI LA CONNAISSANCE EFFECTIVE DE L'ORIGINE DELICTUELLE DES OBJETS ET A AINSI PRIVE SA DECISION DE BASE LEGALE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE NI LA VILETE DU PRIX D'ACHAT, NI LA REVENTE RAPIDE DES TOILES AVEC UN BENEFICE SUBSTANTIEL NE CARACTERISENT LA MAUVAISE FOI DU PREVENU ;
QU'EN EFFET, LE DEMANDEUR SOULIGNAIT DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL LAISSEES SANS REPONSE QUE LA REVENTE RAPIDE D'UN OBJET AVEC UN BENEFICE SUBSTANTIEL EST UNE PRATIQUE COURANTE DANS LA PROFESSION ;
QUE LA VENTE LITIGIEUSE A ETE REALISEE CONFORMEMENT AUX LOIS EN VIGUEUR PUISQU'ELLE A ETE MENTIONNEE DANS LE LIVRE DE POLICE ET DANS LA COMPTABILITE DU DEMANDEUR ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE DE RECEL DES TABLEAUX VOLES PAR Y..., L'ARRET ATTAQUE ET LE JUGEMENT DONT IL ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES SE FONDENT NON SEULEMENT SUR LE FAIT QUE CE PREVENU, QUI A ACQUIS LESDITS TABLEAUX A VIL PRIX ET LES A REVENDUS LE JOUR MEME EN REALISANT UN SUBSTANTIEL BENEFICE, MAIS EGALEMENT SUR D'AUTRES ELEMENTS QUI SONT ANALYSEES ET DECRITS ET QUI ONT TRAIT AUX CONDITIONS DANS LESQUELLES IL EST ENTRE EN POSSESSION DES OBJETS LITIGIEUX ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS DEDUITES D'UNE APPRECIATION SOUVERAINE DES ELEMENTS DE PREUVE SOUMIS AUX DEBATS CONTRADICTOIRES QUE X... A EU CONNAISSANCE, AU MOMENT DE LEUR ACQUISITION, DE L'ORIGINE FRAUDULEUSE DES TABLEAUX RECELES ;
QU'AINSI, LA COUR D'APPEL, REPONDANT IMPLICITEMENT AUX CONCLUSIONS DU PREVENU, A SANS INSUFFISANCE NI CONTRADICTION CARACTERISE LE DELIT REPROCHE AU DEMANDEUR ET JUSTIFIE SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2 ET 3 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 55 ET 593 DU MEME CODE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A PRONONCE CONTRE LE DEMANDEUR UNE CONDAMNATION SOLIDAIRE AVEC LE PREVENU DE VOLS A DES DOMMAGES-INTERETS CORRESPONDANT AU PREJUDICE CAUSE A LA PARTIE CIVILE PAR LES DEUX VOLS RETENUS SANS DONNER AUCUN MOTIF PROPRE A JUSTIFIER CETTE CONDAMNATION ;
ALORS QUE LA SOLIDARITE NE PEUT ETRE PRONONCEE ENTRE LE RECELEUR ET L'AUTEUR PRINCIPAL QUI A COMMIS PLUSIEURS INFRACTIONS QUE SI UN LIEN DE CONNEXITE EST CONSTATE ENTRE LE RECEL COMMIS PAR L'UN ET LES INFRACTIONS PERPETREES PAR L'AUTRE ;
QU'EN L'ESPECE, LA COUR, QUI N'A PAS ETABLI L'EXISTENCE D'UN LIEN DE CONNEXITE ENTRE LES DIFFERENTS VOLS PERPETRES PAR Y... ET LE PRETENDU RECEL DE TABLEAUX COMMIS PAR LE DEMANDEUR, NE POUVAIT DECLARER CE DERNIE CODEBITEUR SOLIDAIRE ENVERS LA VICTIME DE LA TOTALITE DU PREJUDICE SUBI SANS VIOLER L'ARTICLE 55 DU CODE PENAL ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ARTICLES 55 DU CODE PENAL ET 203 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, QU'IL Y A CONNEXITE ENTRE L'INFRACTION PAR LAQUELLE DES OBJETS ONT ETE ENLEVES, DETOURNES OU OBTENUS, ET LE RECEL DES MEMES OBJETS, ET QU'AINSI LE RECELEUR EST TENU SOLIDAIREMENT AVEC L'AUTEUR PRINCIPAL DE LA TOTALITE DES RESTITUTIONS ET DES DOMMAGES-INTERETS ;
QUE TOUTEFOIS, CES DISPOSITIONS NE VONT PAS JUSQU'A ETABLIR UNE PRESOMPTION LEGALE DE CONNEXITE LORSQUE L'AUTEUR PRINCIPAL AYANT ENLEVE, DETOURNE OU OBTENU DES OBJETS A L'AIDE DE PLUSIEURS INFRACTIONS, LE RECELEUR N'A DETENU QUE DES OBJETS PROVENANT D'UNE SEULE OU D'UNE PARTIE SEULEMENT DE CES INFRACTIONS ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, POUR CONDAMNER SOLIDAIREMENT LE PREVENU A LA TOTALITE DES DOMMAGES-INTERETS, AURAIT DU ETABLIR QU'IL Y AVAIT CONNEXITE ENTRE LES VOLS COMMIS PAR Y... ET DONT X... N'A PAS BENEFICIE, ET LE RECEL COMMIS PAR CE DERNIER ;
QU'IL NE SUFFISAIT PAS A LA COUR D'APPEL DE SE REFERER COMME ELLE L'A FAIT AUX ARTICLES SUSVISES, ET QU'AINSI ELLE N'A PAS DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 19 DECEMBRE 1980, MAIS SEULEMENT EN CELLES DE SES DISPOSITIONS AYANT CONDAMNE X... SOLIDAIREMENT AU PAIEMENT DES DOMMAGES-INTERETS, TOUTES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES ;
ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE DIJON, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.