La Cour.
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Jeannine A..., épouse Z..., s'est portée le 10 mai 1974 avaliste de son mari à l'égard des sommes dues par celui-ci à M. Henri Y... ; que, par arrêt du 9 janvier 1980, elle a été reconnue devoir à ce dernier, en qualité de caution, la somme de 239.449,60 F, arrêtée au 30 avril 1979, qu'antérieurement ses parents, Maurice A... et Suzanne X..., s'étaient consentis, par actes notariés du 13 janvier 1966, donation mutuelle de tous leurs biens avec réserve pour leurs descendants de demander la réduction de la donation à la quotité disponible ; que Maurice A... est décédé le 8 décembre 1976, laissant sa veuve et sa fille Jeannine, laquelle, par acte notarié du 8 mars 1977, a déclaré consentir à l'exécution pure et simple de la donation faite par son père à sa mère, et renoncer à en réclamer la réduction ; que prétendant que cet acte de renonciation avait été passé en fraude de ses droits et, qu'en qualité de créancier de Mme Z..., il était fondé d'exercer les droits de sa débitrice dans la succession du père de celle-ci, M. Y... a formé contre Mmes A... et Z... une demande tendant à la nullité de l'acte du 8 mars 1977, au partage de la communauté Zettelmaier-Grangier et de la succession de Maurice A..., à la licitation de l'immeuble dépendant de ces communauté et succession, à l'expulsion de Mme A... et à la réduction à la quotité disponible de la donation consentie à Mme A..., à laquelle il était en outre demandé de préciser les modalités d'exercice de ses droits de donataire ;
Attendu que Mmes A... et Z... font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré M. Y... recevable et fondé à invoquer les dispositions de l'article 1167 du Code civil, concernant le consentement donné par Mme Z... à l'exécution de la donation universelle consentie par Maurice A... à son épouse, et d'avoir prononcé la révocation de l'acte du 8 mars 1977 contenant ce consentement, alors, selon le moyen, que, d'une part, l'admission irrévocable d'une créance cantonnée au passif du règlement judiciaire d'un débiteur vaut à l'égard des cautions solidaires qui ne peuvent être tenues au paiement d'une somme supérieure à celle qui a été admise au passif, en sorte qu'en refusant de tenir compte de la production par M. Y... au règlement judiciaire des biens de M. Z..., l'arrêt a violé l'article 2011 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'action paulienne ne peut être admise que si l'acte a été accompli par le débiteur dans le but de nuire à son créancier ; que, dès lors, en se bornant à relever que Mme Z... avait eu pleine connaissance du préjudice qu'elle causait au créancier en renonçant à la réduction de la donation dont avait bénéficié sa mère, et qu'elle n'avait pas seulement négligé de s'enrichir mais avait manifesté sa volonté de renoncer à un avantage ouvert à son profit, contribuant ainsi à un appauvrissement certain, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard de l'article 1167 du Code civil ; alors, de plus, qu'en l'absence d'intention de nuire au créancier, l'acte, motivé par des considérations familiales supérieures, n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 1167 du Code civil ; alors, enfin, que la Cour d'appel ne relève pas l'existence d'un concert frauduleux entre la mère et la fille ; qu'un tel élément devait exister dès lors que la renonciation de Mme Z... ne pouvait s'analyser en un acte à titre gratuit, mais constituait une modalité d'exécution de l'obligation alimentaire pesant sur elle, par l'effet de l'article 205 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il n'a pas été soutenu que le montant de la créance cautionnée, admise au passif du règlement judiciaire des biens de M. Z... ait été inférieur à celui de la créance réclamée à la caution ; que les juges d'appel ont justement énoncé que la libération résultant d'un concordat au profit du débiteur ne s'étend pas à la caution qui reste obligée envers le créancier à la totalité de son engagement ; qu'en deuxième lieu, l'élément intentionnel de la fraude paulienne résultant de la seule connaissance qu'a le débiteur du préjudice causé à son créancier par l'acte litigieux, l'arrêt, qui a retenu qu'à la date de l'acte attaqué, Mme Z..., devant la situation obérée de son mari dont elle était l'avaliste et devant les risques de poursuites qu'elle-même courrait, avait pleine connaissance du préjudice qu'elle causait au créancier en renonçant à la réduction de la donation, a pu en déduire l'existence de la fraude ; qu'enfin, les juges du fond ayant précisé que la renonciation s'analysait en un acte à titre gratuit au bénéfice de Mme A..., il suffisait, dès lors, que fût établie la connaissance par Mme Z... de la fraude commise aux dépens de M. Y... ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir, sur l'action oblique du créancier, ordonné le partage des biens composant la communauté ayant existé entre les époux A... et la succession de Maurice A..., alors, selon le moyen, que, d'une part, l'acte de donation du 13 janvier 1966 ayant réservé à la donataire le droit de choisir la nature et la répartition de la quotité disponible pour le cas où Mme Z... exercerait l'action en réduction de la donation, le choix de Mme A... était le préalable nécessaire à l'exercice de la faculté de provoquer le partage au nom du débiteur ; qu'ainsi l'arrêt a violé l'article 815 du Code civil ; alors que, d'autre part, si Mme A... avait opté pour la donation en usufruit, il n'y aurait pas eu lieu à partage, dès lors qu'il n'existe aucune indivision entre l'usufruitier et le nu-propriétaire d'un même bien ;
Mais attendu que les premiers juges, qui ont déclaré M. Y... recevable et fondé à exercer, en application de l'article 1166 du Code civil, les droits d'héritiers réservataires de Mme Z..., et ordonné le partage des biens de la communauté Zettelmaier-Grangier et de la succession de Maurice A..., ont imparti un délai à Mme A... pour faire connaître, au notaire commis, le parti qu'elle entendait prendre aux modalités d'exercice de ses droits de donataire, et ont sursis à statuer sur la demande en licitation de l'immeuble et en expulsion de Mme A... jusqu'à établissement par le notaire commis de l'inventaire des communauté et succession ; que Mmes A... et Z..., qui n'ont pas critiqué devant la Cour d'appel ces chefs de la décision et qui n'ont pas soutenu qu'une option pour la donation en usufruit rendrait inutile un partage, ne sont pas recevables à le faire devant la Cour de cassation ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches.