Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que deux jugements successifs ont autorisé la société anonyme industrielle et commerciale de Constructions navales (SICCNA), mise en règlement judiciaire le 26 mars 1975, à continuer son exploitation ; que la liquidation des biens sociale a été prononcée le 17 décembre 1975 et a mis fin à toute activité ; que M. Neveu, président de la société SICCNA depuis 1969, après en avoir été directeur technique depuis 1963, a continué à apporter sa collaboration à l'entreprise jusqu'au 10 mai 1976 ; qu'un arrêt du 23 février 1978, rendu en matière prud'homale, a jugé qu'il devait être considéré comme un mandataire social, et non pas comme un salarié ; que le nouveau syndic l'a alors assigné en restitution comme indues des sommes qu'il avait perçues au titre de son contrat de travail depuis l'ouverture de la procédure collective, et que les premiers juges ont accueilli cette demande seulement pour les émoluments alloués postérieurement au jugement de liquidation des biens ;
Attendu que M. Neveu fait grief à la Cour d'appel d'avoir confirmé leur décision sur ce point, alors, selon le pourvoi, que lorsqu'un contrat nul a été exécuté, si, en raison de la nature des obligations, il est impossible aux parties de se restituer réciproquement ce qu'elles ont reçu, il y a lieu de tenir compte des prestations de chacune d'elles et des avantages que l'autre en a retirés ; que les parties ne pouvant, en cas de nullité d'un contrat de travail, être remises dans le même état que si ce contrat n'avait pas existé, celui qui a exécuté le travail est en droit de recevoir une rémunération en contrepartie et de conserver, à titre d'indemnité, les salaires qui lui avaient été versés pour l'exécution de ce travail ; qu'il est constant, en l'espèce, ainsi que le faisaient valoir les conclusions de M. Neveu et que l'admet implicitement l'arrêt déféré, qu'après le prononcé de la liquidation des biens par jugement du 17 décembre 1975 et jusqu'à une décision des syndics en date du 10 mai 1976 lui notifiant leur décision de procéder à un licenciement collectif du personnel pour cause économique, M. Neveu a été employé par les syndics de la liquidation des biens, représentant la masse des créanciers, et a reçu une rémunération fixée avec l'accord écrit exprès du juge-commissaire ; qu'en admettant que le contrat de travail ainsi exécuté fût nul à défaut, pour le syndic, d'être investi du pouvoir de l'autoriser, le travail fourni par M. Neveu au profit de la masse des créanciers et non susceptible de restitution n'en devait pas moins être rémunéré ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la Cour d'appel n'a pas prononcé la nullité du contrat de travail pour la période postérieure à la conversion du règlement judiciaire en liquidation des biens, mais a constaté qu'à défaut de l'autorisation prévue au second alinéa de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1967, il ne s'était pas formé un tel contrat ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Mais sur les deuxième et troisième branches du moyen :
Vu l'article 1375 du Code civil ;
Attendu que, pour débouter de sa demande M. Neveu qui soutenait avoir droit à la rémunération de ses services pendant la période du règlement judiciaire, quant bien même sa participation à la poursuite de l'exploitation n'aurait pas été décidée par le juge-commissaire, la Cour d'appel, après avoir retenu que "l'enrichissement sans cause est essentiellement caractérisé par la subsidiarité et que le recours à ce quasi-contrat ne se conçoit que si d'autres moyens ne peuvent être invoqués", relève que M. Neveu "ne pouvait tourner l'impossibilité juridique pour lui de réclamer une rémunération en tant que dirigeant social admis à participer à l'exploitation de la société en règlement judiciaire" en retenant que cette impossibilité était due à ce que les syndics n'avaient pas présenté au juge-commissaire la requête prévue au premier alinéa de l'article 26 de la loi du 13 juillet 1967 ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Neveu à reverser au syndic es qualités la somme qu'il a perçue pour la période de règlement judiciaire, l'arrêt rendu entre les parties le 21 avril 1983 par la Cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers.