STATUANT SUR LE POURVOI DE :
- L, L, D, D, V,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE CAEN, CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS, DU 30 NOVEMBRE 1983 QUI LES A CONDAMNES CHACUN A 500 FRANCS D'AMENDE ET A DES REPARATIONS CIVILES POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER ET COMPLICITE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
ATTENDU QUE SUR PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE EN DATE DU 30 DECEMBRE 1982 DE P DE M, DIRECTEUR DE LA SOCIETE S, UNE INFORMATION ETAIT OUVERTE CONTRE X DU CHEF DE DIFFAMATION ENVERS PARTICULIER, A LA SUITE DE LA DISTRIBUTION LE 11 DECEMBRE 1982, ENTRE LES DEUX TOURS DES ELECTIONS DES DELEGUES DU PERSONNEL, D'UN TRACT QUI AURAIT COMPORTE DES PROPOS DE NATURE A PORTER ATTEINTE A SON HONNEUR ET A SA CONSIDERATION, SOIT, EN L'OCCURRENCE, LE PASSAGE SUIVANT : "LA S EST UNE ENTREPRISE QUI TOURNE BIEN ET, CA, GRACE A NOUS TOUS, FAUT PAS L'OUBLIER. IL Y A DE BONS RESULTATS. ALORS LE PATRON, QU'EST-CE QU'IL FAIT ? D'ABORD IL COMMENCE PAR SE SERVIR (ET LA, ON PEUT LUI FAIRE CONFIANCE, IL SE SERT, COMME IL FAUT...)" ;
ATTENDU QU'A LA PLAINTE ETAIT JOINT LE TRACT EN QUESTION LEQUEL ETAIT SIMPLEMENT SIGNE "SECTION C.G.T. S ;
ATTENDU QU'AU TERME DE L'INFORMATION, LE JUGE D'INSTRUCTION, PAR ORDONNANCE DU 16 MAI 1983, A RENVOYE DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL L ET L COMME AUTEURS PRINCIPAUX DU DELIT POURSUIVI, D D ET V COMME COMPLICES PAR FOURNITURE DE MOYENS, "EN L'ESPECE EN DISTRIBUANT LES IMPRIMES..." ;
AU FOND :
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 29 ET 32 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;"EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECIDE QUE LA PHRASE "ALORS QUE LE PATRON, QU'EST-CE QU'IL FAIT ? D'ABORD IL COMMENCE A SE SERVIR, ET LA ON PEUT LUI FAIRE CONFIANCE IL SE SERT COMME IL FAUT" VISERAIT MONSIEUR P DE M, DIRECTEUR SALARIE DE LA SOCIETE S ;
"AUX MOTIFS QUE CELUI-CI ETAIT IDENTIFIABLE PAR UNE AUTRE PHRASE DU TEXTE (NON INCRIMINEE) "C'EST LE PATRON QUI DONNE LES MISES A PIED" ;
QUE LES PREVENUS RECONNAISSENT QUE P, DIRECTEUR SALARIE DE LA S, EST BIEN LA PERSONNE QUI A MIS A PIED DIVERS EMPLOYES ET SPECIALEMENT S ;
"ALORS QU'IL APPARTIENT A LA COUR DE CASSATION D'EXERCER UN CONTROLE SUR L'IDENTITE DE LA PERSONNE DIFFAMEE ;
QU'EN L'ESPECE ACTUELLE, C'EST LE PATRON QUI ETAIT VISE PAR LES PROPOS PRETENDUMENT DIFFAMATOIRES ;
QUE LE PATRON NE PEUT ETRE QUE L'EMPLOYEUR, ET QU'IL N'ETAIT PAS CONTESTE QUE LES DEMANDEURS N'ETAIENT PAS EMPLOYES DE P, LUI-MEME DIRECTEUR SALARIE DE LA S, MAIS DE LA S PERSONNE MORALE ;
ATTENDU QUE CONFIRMANT, SUR CE POINT, LA DECISION DES PREMIERS JUGES ET ECARTANT LES CONCLUSIONS DES PREVENUS ARGUANT L'ABSENCE DE QUALITE DU PLAIGNANT QUI, DIRECTEUR SALARIE DE LA S, NE POUVAIT SE PRETENDRE ATTEINT PAR LES PROPOS INCRIMINES DU TRACT LITIGIEUX QUI VISAIENT "LE PATRON", C'EST-A-DIRE LA SOCIETE S, LA COUR D'APPEL S'EST FONDEE SUR CE QUE LES AUTEURS DE L'ECRIT JOINT A LA PLAINTE QUI COMPORTAIT LA PHRASE SUIVANTE "C'EST LE PATRON QUI DONNE LES MISES A PIED" "AVAIENT RECONNU QUE P DE M ETAIT BIEN LA PERSONNE QUI AVAIT MIS A PIED DIVERS EMPLOYES DONT SPECIALEMENT UN CERTAIN S" POUR EN CONCLURE QUE LA PERSONNE VISEE ETAIT BIEN LA PARTIE CIVILE QUI, PAR SUITE, ETAIT RECEVABLE A AGIR ;
QU'EN CONSEQUENCE, LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
QU'EN EFFET IL APPARTIENT AUX JUGES DU FOND DE DECLARER, D'APRES LES CIRCONSTANCES DE LA CAUSE, QUELLE EST LA PERSONNE DIFFAMEE OU INJURIEE ET QUE CETTE APPRECIATION EST SOUVERAINE ET ECHAPPE AU CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION DANS LA MESURE OU ELLE REPOSE SUR DES ELEMENTS DE FAIT EXTRINSEQUES A L'ECRIT INCRIMINE ;
QUE TEL EST LE CAS DE L'ESPECE ;
SUR LE
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 29 ET 32 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;"EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LES DEMANDEURS COUPABLES DE DIFFAMATION OU DE COMPLICITE DE DIFFAMATION ;
"AUX MOTIFS QUE LE TRACT INCRIMINE CONTIENT LA PHRASE SUIVANTE :
"ALORS LE PATRON QU'EST-CE QU'IL FAIT ? D'ABORD, IL COMMENCE A SE SERVIR, ET LA ON PEUT LUI FAIRE CONFIANCE IL SE SERT COMME IL FAUT" ;
QUE CELA REVIENDRAIT A DIRE QUE P DETOURNE A SON AVANTAGE UNE PART ANORMALE DES BONS RESULTATS DE L'ENTREPRISE AU DETRIMENT DE L'ENSEMBLE DES AGENTS DE PRODUCTION DE LA S ;
"ALORS QUE LE DELIT DE DIFFAMATION SUPPOSE, D'UNE PART, L'ALLEGATION D'UN FAIT DE NATURE A PORTER ATTEINTE A L'HONNEUR ET A LA CONSIDERATION DE LA PERSONNE PRETENDUMENT DIFFAMEE, ET, D'AUTRE PART, L'ALLEGATION D'UN FAIT SUFFISAMMENT PRECIS POUR ETRE SUSCEPTIBLE DE LA PREUVE CONTRAIRE ;
QU'EN L'ESPECE ACTUELLE, LES TERMES INCRIMINES, SELON LESQUELS LE PATRON COMMENCERAIT PAR SE SERVIR ET SE SERVIR COMME IL FAUT, N'IMPLIQUENT NULLEMENT L'IDEE DE DETOURNEMENT DES RESULTATS DE L'ENTREPRISE, MAIS TOUT AU PLUS L'IDEE DE L'APPREHENSION D'UNE LARGE FRACTION DU PROFIT, SANS AUCUNE IMPLICATION DE FRAUDE, ET COMME LE RESULTAT DU SYSTEME DENONCE ;
QUE CES TERMES NE COMPORTENT AUCUNE ALLEGATION D'UN FAIT SUFFISAMMENT PRECIS POUR ETRE SUSCEPTIBLE DE LA PREUVE CONTRAIRE ;
" ATTENDU QUE POUR ECARTER LA THESE DES PREVENUS QUI SOUTENAIENT QUE LES PROPOS INCRIMINES NE VISAIENT EN REALITE PERSONNE PARCE QUE SE BORNANT A REPRODUIRE, EN DES TERMES IMAGES, LES CRITIQUES CLASSIQUES DE L'ECONOMIE DE MARCHE, LA COUR D'APPEL N'A VOULU CONSIDERER QUE L'ATTEINTE PORTEE "A UNE PERSONNE DETERMINEE", CETTE ATTEINTE EUT-ELLE ETE REALISEE AU MOYEN D'UN "PONCIF", POUR JUGER QUE LESDITS PROPOS "REVENAIENT A DIRE QUE P DE M DETOURNAIT, A SON AVANTAGE, UNE PART ANORMALE DES BONS RESULTATS DE L'ENTREPRISE AU DETRIMENT DE L'ENSEMBLE DES AGENTS DE PRODUCTION DE LA S ;
QUE LA COUR DE CASSATION DONT LE CONTROLE S'ETEND, EN CE QUI CONCERNE LES DELITS COMMIS PAR LA VOIE DE LA PRESSE, A LA PORTEE ET A L'INTERPRETATION DES ECRITS INCRIMINES, EST A MEME DE S'ASSURER QUE LES PROPOS VISES DANS L'ACTE DE POURSUITE CONSTITUENT BIEN L'ALLEGATION OU L'IMPUTATION D'UN FAIT DE NATURE A PORTER ATTEINTE A L'HONNEUR OU A LA CONSIDERATION DE LA PARTIE CIVILE, D'AUTANT QUE CES PROPOS SONT SUIVIS DU COMMENTAIRE CI-APRES "ENSUITE, IL LAISSE QUELQUES MIETTES A CERTAINS..." ;
QU'UNE TELLE ALLEGATION OU IMPUTATION EST, CONTRAIREMENT A CE QUE SOUTIENNENT LES DEMANDEURS, SUSCEPTIBLES DE PREUVE, PREUVE QU'EN L'ESPECE, CEUX-CI N'ONT PAS TENTE DE RAPPORTER ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 1ER DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DES ARTICLES 59 ET 60 DU MEME CODE, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;"EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE L ET L AUTEURS DE L'INFRACTION DE DIFFAMATION PUBLIQUE, ET D, D ET V COUPABLES DE COMPLICITE DE DIFFAMATION PUBLIQUE ;
"ALORS D'UNE PART, QUE TOUTE DECISION DOIT ETRE MOTIVEE ;
QUE L'INSUFFISANCE DE MOTIFS EQUIVAUT AU DEFAUT DE MOTIFS ET QU'AUCUNE CONSTATATION DE FAIT N'ETABLIT LA QUALITE D'AUTEURS DE L ET L, NON PLUS QUE LES ELEMENTS D'OU RESULTERAIT LA COMPLICITE DE D, D ET V ;
"ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA COMPLICITE NE PEUT ETRE RETENUE QU'A CONDITION QUE LES JUGES DU FOND INDIQUENT LE MODE DE COMPLICITE RETENUE ;
QU'EN N'INDIQUANT NI LES ELEMENTS D'OU RESULTERAIT LA COMPLICITE DE D, D ET V, NI LE MODE DE COMPLICITE RETENUE, LA COUR D'APPEL A MIS LA COUR DE CASSATION DANS L'IMPOSSIBILITE D'EXERCER LE CONTROLE QUI EST LE SIEN, ET, DES LORS, PRIVE SON ARRET DE TOUTE BASE LEGALE ;
" ATTENDU QUE CONTRAIREMENT AUX GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN, LA COUR D'APPEL A BIEN ENONCE QUE LE TRACT LITIGIEUX "AVAIT ETE REDIGE ET DISTRIBUE PAR LES PREVENUS" ;
"QUE LE DELIT DE DIFFAMATION PUBLIQUE ETAIT ETABLI A LA CHARGE DE L ET DE L ET QUE CELUI DE COMPLICITE DE DIFFAMATION ETAIT EGALEMENT ETABLI A LA CHARGE DE D, D ET V ;
QUE, PAR AILLEURS, L'ARRET ATTAQUE S'EST REFERE EXPRESSEMENT AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES LESQUELS AVAIENT ENONCE "ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'INFORMATION ET DES DEBATS QUE LE 11 DECEMBRE 1982, A C, L ET L ONT PUBLIE A L'OCCASION DES ELECTIONS QUI SE SONT DEROULEES A L'ENTREPRISE S UN DOCUMENT QUI A ETE DISTRIBUE AUX SALARIES PAR MM. D, D ET V " ;
QU'IL EST, EN CONSEQUENCE, VAINEMENT FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR ETE INSUFFISAMMENT MOTIVE, D'AUTANT QUE LES DEMANDEURS NE SAURAIENT REMETTRE EN CAUSE, DEVANT LA COUR DE CASSATION, LES ELEMENTS DE CONVICTION SOUVERAINEMENT APPRECIES PAR LES JUGES DU FOND DEVANT LESQUELS ILS ONT ETE SOUMIS AUX DEBATS CONTRADICTOIRES ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT QU'ETRE ECARTE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.