REJET DES POURVOIS FORMES PAR :
1° X... (MARIE-PAULE), EPOUSE Y...,
2° LA SOCIETE A. L. T. R. A.,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE LYON, 4E CHAMBRE, EN DATE DU 17 FEVRIER 1984, QUI A CONDAMNE LA DAME Y... A 10 000 FRANCS D'AMENDE POUR INFRACTIONS A LA LEGISLATION SUR LE TRAVAIL TEMPORAIRE, A DECLARE LA SOCIETE PRECITEE CIVILEMENT RESPONSABLE ET A ACCORDE DES DOMMAGES-INTERETS AUX ORGANISATIONS SYNDICALES, PARTIES CIVILES.
LA COUR, JOIGNANT LES POURVOIS EN RAISON DE LA CONNEXITE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS, EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES L. 125-1 ET L. 125-3 DU CODE DU TRAVAIL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONSIDERE QUE LA MISSION D'UNE SOCIETE D'ETUDES TECHNIQUES INDUSTRIELLES CARACTERISE LES DELITS DE MARCHANDAGE ET DE PRET DE MAIN D'OEUVRE ILLICITE LORSQU'ELLE SE TRADUIT PAR LE DETACHEMENT DE L'UN DE SES TECHNICIENS AUPRES DE LA SOCIETE QUI LUI A CONFIE L'ETUDE D'UN PROJET ;
" AUX MOTIFS QUE LA SOCIETE ALTRA A MIS 15 DE SES COLLABORATEURS SUR UN EFFECTIF TOTAL DE 49 SALARIES A LA DISPOSITION D'ENTREPRISES AVEC LESQUELLES ELLE ETAIT EN RELATION, QU'ELLE SE TROUVAIT DANS L'IMPOSSIBILITE DE FOURNIR LE MOINDRE DOCUMENT A DEFAUT DE CAHIER DES CHARGES, PRECISANT LA NATURE OU LA DUREE DES TRAVAUX A REALISER, QUE LE PERSONNEL AINSI MIS A DISPOSITION ET INTEGRE A L'EQUIPE DU MAITRE DE L'OUVRAGE, QUI ETAIT LE MAITRE DE LA CONCEPTION ET DE LA REALISATION DU PROJET, EFFECTUAIT SON TRAVAIL SOUS LA RESPONSABILITE DE L'ENTREPRISE UTILISATRICE ;
" ALORS D'UNE PART QUE LA MISSION D'UNE SOCIETE DE CONSEIL ET D'ETUDES TECHNIQUES, QUI CONSISTE A METTRE SON INDUSTRIE ET SON POTENTIEL HUMAIN AU SERVICE DE SES CLIENTS AFIN D'ELABORER OU DE REALISER LE PROJET SOUHAITE, NE PEUT ETRE ASSIMILEE A UNE SIMPLE OPERATION DE PRESTATIONS DE MAIN-D'OEUVRE, MEME LORSQUE L'EXECUTION DE LA MISSION DU TECHNICIEN DOIT NECESSAIREMENT - EN CONSIDERATION D'IMPERATIFS PRATIQUES OU DE SECRET INDUSTRIEL OU MILITAIRE - S'EXECUTER SUR LES LIEUX MEMES DU PROJET A REALISER EN CONCERTATION AVEC LE MAITRE DE L'OUVRAGE, ET PAR CONSEQUENT SELON SES DIRECTIVES ;
QU'EN CONSIDERANT QU'UN TEL DETACHEMENT CARACTERISE L'ELEMENT MATERIEL DES DELITS DE FOURNITURE EXCLUSIVE DE MAIN-D'OEUVRE ET DE PRET DE MAIN-D'OEUVRE NUE, LA COUR D'APPEL A VIOLE ENSEMBLE LES ARTICLES L. 125-1 ET L. 125-3 DU CODE DU TRAVAIL ;
" ALORS D'AUTRE PART QU'EN DEDUISANT L'ABSENCE D'UNE MISSION COMPLETE DE CONSEIL TECHNIQUE DU DEFAUT DANS LEQUEL LA SOCIETE ALTRA SE TROUVAIT DE PRODUIRE LES PLANS ET CAHIERS DES CHARGES DES ETUDES CONFIEES A SES TECHNICIENS, SANS REPONDRE AUX CONCLUSIONS DANS LESQUELLES LA DAME X... EXPOSAIT QUE DES IMPERATIFS PRATIQUES OU DE SECRET INDUSTRIEL OU MILITAIRE EXCLUAIENT QUE DES DOCUMENTS ECRITS SOIENT DELIVRES A LA SOCIETE ALTRA, LA COUR D'APPEL N'A PAS MOTIVE SA DECISION AU REGARD DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
" ET ALORS ENFIN QUE LA FOURNITURE DE MAIN-D'OEUVRE DOIT, POUR CONSTITUER LE DELIT DE MARCHANDAGE PREVU A L'ARTICLE L. 125-1 DU CODE DU TRAVAIL, AVOIR POUR EFFET DE CAUSER UN PREJUDICE AU SALARIE OU D'ELUDER LES DISPOSITIONS DE LA LOI, DES REGLEMENTS OU DES CONVENTIONS COLLECTIVES DE TRAVAIL ;
QUE L'INFRACTION N'EST PAS CONSTITUEE LORSQUE LA FOURNITURE DE MAIN-D'OEUVRE, A LA SUPPOSER ETABLIE, N'EST SUSCEPTIBLE DE CAUSER AUCUN PREJUDICE A UN SALARIE QUI BENEFICIE D'UN CONTRAT DE TRAVAIL A DUREE DETERMINEE, DE REMUNERATIONS EQUIVALENTES A CELLES PRATIQUEES DANS L'ENTREPRISE AUPRES DE LAQUELLE IL COLLABORE, ET DE L'INTEGRALITE DES AVANTAGES SALARIAUX PREVUS PAR LA CONVENTION COLLECTIVE DE TRAVAIL REGISSANT SON ACTIVITE DE CONSEIL ET D'ASSISTANCE TECHNIQUE ;
" ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA S. A. R. L. ALTRA, DONT LA GERANCE ETAIT ASSUMEE, EN 1981, PAR LA DAME Y..., EST INSCRITE AU REGISTRE DU COMMERCE EN QUALITE DE CABINET D'ETUDES INDUSTRIELLES PRETANT SON CONCOURS A DES ENTREPRISES EN VUE DE LA REALISATION DE RECHERCHES ET DE TRAVAUX RELATIFS A LEUR ORGANISATION ;
ATTENDU QU'EN AOUT ET SEPTEMBRE 1981 UN INSPECTEUR DU TRAVAIL A EFFECTUE UNE ENQUETE A L'EFFET DE DETERMINER LA VERITABLE NATURE DES ACTIVITES DE LA SOCIETE ;
QU'IL A CONSTATE QU'AUCUN TRAVAIL NE S'EFFECTUAIT DANS SES BUREAUX ET QU'UN CERTAIN NOMBRE DE SES SALARIES ETAIENT, EN REALITE, DETACHES, POUR UN TEMPS PLUS OU MOINS LONG, AUPRES D'ENTREPRISES DANS LESQUELLES ILS SE TROUVAIENT PLACES, SUR LE PLAN DU TRAVAIL, DANS LES MEMES CONDITIONS QUE LES TRAVAILLEURS PERMANENTS, SANS POUR AUTANT BENEFICIER DE LEURS AVANTAGES SOCIAUX NI DES CONVENTIONS COLLECTIVES EN VIGUEUR ;
ATTENDU QUE, CITEE DEVANT LA JURIDICTION REPRESSIVE SOUS LES PREVENTIONS DE PRET DE MAIN-D'OEUVRE A BUT LUCRATIF EN DEHORS DES CONDITIONS FIXEES PAR L'ARTICLE L. 125-3 DU CODE DU TRAVAIL ET POUR DELIT DE MARCHANDAGE TEL QU'IL EST PREVU PAR L'ARTICLE L. 125-1 DU MEME CODE, LA DAME Y... A SOUTENU, PAR UNE ARGUMENTATION REPRISE AU MOYEN, QUE LA MISSION DE LA SOCIETE ALTRA, QUI CONSISTE A METTRE SON INDUSTRIE ET SON POTENTIEL HUMAIN AU SERVICE DE SES CLIENTS, AFIN D'ELABORER OU DE REALISER DES PROJETS INDUSTRIELS, NE PEUT ETRE ASSIMILEE A UN SIMPLE PRET DE MAIN-D'OEUVRE ET QUE SES SALARIES TRAVAILLAIENT DANS LE CADRE DE CONTRATS DE SOUS-ENTREPRISE ET DE PRESTATION DE SERVICES DE CARACTERE TECHNIQUE, LES TACHES EFFECTUEES AU SEIN MEME DES ENTREPRISES CLIENTES NE TRADUISANT NULLEMENT L'EXISTENCE D'UNE SUBORDINATION JURIDIQUE A L'EGARD DE CELLES-CI, MAIS NE CONSTITUANT QUE L'UN DES ELEMENTS D'UNE SITUATION PLUS COMPLEXE ;
QU'ENFIN, LES SALARIES AINSI DETACHES, EN RAISON D'IMPERATIFS PRATIQUES OU POUR ASSURER LE RESPECT DU SECRET INDUSTRIEL, VOIRE DU SECRET MILITAIRE, NE SUBISSAIENT AUCUN PREJUDICE, BENEFICIANT DE REMUNERATIONS EQUIVALENTES A CELLES QUE RECEVAIENT LES SALARIES DES ENTREPRISES UTILISATRICES, AINSI QUE DES AVANTAGES SOCIAUX PREVUS PAR LA CONVENTION COLLECTIVE DU TRAVAIL REGISSANT L'ACTIVITE DE CONSEIL ET D'ASSISTANCE DE LA SOCIETE ALTRA ;
ATTENDU QUE, POUR ECARTER CETTE ARGUMENTATION ET DECLARER LA DOUBLE PREVENTION ETABLIE, LA COUR D'APPEL QUI FAIT SIENNE L'ANALYSE DES FAITS ET DES CHARGES, PARTICULIEREMENT DETAILLEE, EFFECTUEE PAR LES PREMIERS JUGES, DONT ELLE ADOPTE EXPRESSEMENT LES MOTIFS, ENONCE QUE CEUX-CI ONT EXACTEMENT RAPPELE DANS QUELLES CONDITIONS LA SOCIETE ALTRA AVAIT MIS QUINZE DE SES QUARANTE NEUF SALARIES, POUR LA PLUPART DES DESSINATEURS ET DES PROJETEURS, A LA DISPOSITION DE HUIT ENTREPRISES UTILISATRICES, POUR DE LONGUES PERIODES, CE EN VIOLATION DES DISPOSITIONS DU CODE DU TRAVAIL RELATIVES AU TRAVAIL TEMPORAIRE ;
QUE LEUR REMUNERATION ETAIT CALCULEE, NON PAS EN FONCTION DE L'EXECUTION D'UNE TACHE DETERMINEE, MAIS UNIQUEMENT SUR LA BASE DES HEURES DE TRAVAIL ACCOMPLIES ;
QUE LE PERSONNEL, QUALIFIE, MAIS NON " HAUTEMENT QUALIFIE ", ETAIT MIS A LA DISPOSITION DES ENTREPRISES UTILISATRICES AFIN DE TRAVAILLER SOUS LES ORDRES, LA SURVEILLANCE ET LA RESPONSABILITE DES CADRES DESDITES ENTREPRISES LESQUELS LEUR FIXAIENT EUX-MEMES, COMME AUX AUTRES SALARIES, LES TACHES A ACCOMPLIR ;
QU'ILS ETAIENT PARFOIS QUALIFIES DE " TRAVAILLEURS INTERIMAIRES " SUR LES REGISTRES DU PERSONNEL ET QU'ILS ETAIENT REMPLACES LORSQU'ILS NE DONNAIENT PAS SATISFACTION ;
ATTENDU QUE LES JUGES AJOUTENT QUE LA SOCIETE ALTRA N'ETAIT CHARGEE, PAR CONTRATS, D'AUCUNE ETUDE TECHNIQUE SPECIALE ET QUE SES PROPRES DIRIGEANTS SONT EUX-MEMES DANS L'INCAPACITE DE PRECISER SUR QUELS PROJETS TRAVAILLAIT LE PERSONNEL MIS A LA DISPOSITION DES ENTREPRISES UTILISATRICES, PROJETS QUI, AU SURPLUS, ENTRAIENT DANS LA COMPETENCE HABITUELLE DESDITES ENTREPRISES ;
QU'ENFIN, ILS CONSTATENT QUE LES TECHNICIENS DETACHES NE PERCEVAIENT PAS L'INTEGRALITE DE LEURS SALAIRES, SUR LESQUELS LA SOCIETE ALTRA PRELEVAIT UN BENEFICE, LES PRIVANT AINSI D'UNE PARTIE DU PRODUIT DE LEUR TRAVAIL, QUE LA SOCIETE DONT ILS DEPENDAIENT OCCUPANT MOINS DE 50 SALARIES, LESDITS SALARIES NE BENEFICIAIENT PAS DE LA PROTECTION RESULTANT, DANS LES ENTREPRISES AUPRES DESQUELLES ILS ETAIENT DETACHES, DE LA REPRESENTATION DU PERSONNEL ET DE L'ACTION DES ORGANISATIONS SYNDICALES ;
QU'IL EST DES LORS ETABLI QU'ILS SUBISSAIENT UN PREJUDICE ;
ATTENDU QUE, DE L'ENSEMBLE DE SES CONSTATATIONS, LA COUR D'APPEL DEDUIT QUE, CONTRAIREMENT A CE QUI ETAIT ALLEGUE, IL N'EXISTAIT, EN L'ESPECE, AUCUN CONTRAT DE SOUS-ENTREPRISE ET QUE LES FAITS ETAIENT EN REALITE CONSTITUTIFS DE PRETS DE MAIN-D'OEUVRE A BUT LUCRATIF, REALISES EN VIOLATION DES CONDITIONS LEGALES ET PORTANT PREJUDICE AUX SALARIES AINSI UTILISES ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI QU'ELLE L'A FAIT, PAR UNE APPRECIATION SOUVERAINE DES ELEMENTS DE LA CAUSE, LA COUR D'APPEL, QUI N'ETAIT PAS TENUE DE REPONDRE SPECIALEMENT A DE SIMPLES ARGUMENTS, A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
QU'ELLE A, SANS INSUFFISANCE, FAIT RESSORTIR QUE L'OPERATION S'ANALYSAIT EN LA MISE A LA DISPOSITION D'ENTREPRISES UTILISATRICES, D'UNE MAIN D'OEUVRE DONT CELLES-CI ASSUMAIENT SEULES LA RESPONSABILITE ET LA DIRECTION ET QU'ELLES REMUNERAIENT SELON LE NOMBRE D'HEURES DE TRAVAIL ACCOMPLIES, CONSERVANT L'ENTIERE MAITRISE DE L'OUVRAGE ;
QU'ENFIN, LE FAIT, PAR LA PREVENUE, D'AVOIR ELUDE LES PRESCRIPTIONS LEGALES ET REGLEMENTAIRES ETAIT GENERATEUR DE PREJUDICE POUR LES SALARIES CONCERNES ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS.