Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 116 du Code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'escompte, avant son échéance, d'une lettre de change non acceptée ne rend pas indisponible au profit du tiers porteur, qui n'a pas fait défense au tiré de payer, la créance du tireur sur le tiré non accepteur ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué que, pour avoir paiement de marchandises qu'elle avait livrées à la société Morisaux la société Leroux a tiré sur sa débitrice deux lettres de change ; que ces effets, qui n'ont pas été acceptés par le tiré, ont été escomptés par la Société Générale (la banque) ; qu'à l'échéance la banque, porteur des effets, en a demandé le paiement à la société Morisaux, que celle-ci a refusé de payer, alléguant s'être libérée de sa dette envers la société Leroux ;
Attendu que, pour condamner la société Morisaux à payer à la banque le montant des effets, la Cour d'appel énonce que cette société prétend avoir réglé par voie de compensation la dette correspondant aux deux lettres de change, mais qu'à une date antérieure à celle invoquée par la société Morisaux, la société Leroux avait transmis à la banque tous ses droits sur les effets à échoir, qu'ainsi en escomptant les effets la banque avait acquis ses droits de tiers porteur sur la créance du tireur contre le tiré, même si ce dernier n'avait pas accepté l'effet, que ladite créance demeurait donc indisponible et que dès lors, faute de remplir les conditions de liquidité et d'exigibilité prévues par l'article 1291 du Code civil, la compensation ne pouvait plus s'effectuer de plein droit ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi la Cour d'appel, qui a omis de rechercher si, avant l'échéance des effets, la Société Morisaux, tiré non accepteur, s'était libérée de sa dette envers le tireur par l'effet de la compensation qu'elle invoquait, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche :
CASSE et ANNULE en son entier l'arrêt rendu le 7 juin 1984 entre les parties, par la Cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Amiens