REJET des pourvois formés par :
- X... Christian,
- Y... Jean-Pierre,
contre un arrêt de la Cour d'assises d'Indre-et-Loire du 20 mars 1986 qui les a condamnés à dix-huit ans de réclusion criminelle chacun pour vols avec port d'arme, vols, complicité de ces crimes et délits, recel ; ensemble sur les pourvois de Z... Dominique, A... Aziz, B... Daniel, contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a, dans la même procédure, statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les pourvois de A... et de B... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui des pourvois ;
Sur les pourvois de X... et de Y... :
Vu le mémoire produit, commun à ces deux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 310, 329 et 331 du Code de procédure pénale, ensemble violation du principe de l'oralité des débats et des droits de la défense ;
" en ce qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats qu'au cours de l'instruction à l'audience le président, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, a fait extraire du dossier et communiquer aux jurés, aux assesseurs, au Ministère public, à la partie civile et à son conseil, aux accusés et à leurs conseils, des documents de la procédure écrite et notamment un procès-verbal de reconstitution des faits comprenant 53 planches photographiques assorties de légendes ;
" alors qu'en procédant à une telle communication massive de documents photographiques réalisés pour le plus grand nombre d'après les déclarations de la partie civile et assortis d'énonciations péremptoires sur la culpabilité des accusés et en s'abstenant de donner lecture des mentions écrites, qu'il s'agisse des titres de chapitres explicitant les conditions dans lesquelles les prises de vues avaient été effectuées ou qu'il s'agisse des légendes accompagnant les photos, le président a nécessairement interdit la possibilité d'un débat contradictoire réel et a violé la règle d'ordre public de l'oralité des débats " ;
Attendu qu'il appert du procès-verbal des débats qu'au cours de ceux-ci le président a communiqué à la Cour d'assises des planches photographiques extraites du dossier de la procédure ;
Attendu que le président de la Cour d'assises tient de l'article 310 du Code de procédure pénale le droit de communiquer des documents de cette nature ;
Que le procès-verbal constate en outre que les planches photographiques présentées ont été également soumises au Ministère public, à la partie civile, aux accusés et à leurs conseils ;
Que toutes les parties ayant ainsi été mises en mesure de les discuter, la règle du débat contradictoire a été observée et les droits de la défense préservés ;
Attendu, par ailleurs, qu'il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal ni d'aucun donné acte, qu'il appartenait aux accusés, s'ils l'estimaient utile à leur défense, de requérir, que les photographies fussent accompagnées de légendes ni, dans cette hypothèse, que celles-ci fissent référence à des déclarations à l'instruction de témoins acquis aux débats et comparants, et qui n'auraient pas encore été entendus lorsque la communication a eu lieu ; qu'au contraire le procès-verbal mentionne qu'aucune observation n'a été faite à cette occasion ; qu'il ne saurait dès lors être allégué une quelconque violation du principe de l'oralité des débats ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 349 et 356 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que les première et deuxième questions concernant Christian X... sont ainsi libellées : 1° " l'accusé Christian X... est-il coupable d'avoir à La Riche, le 14 mai 1984, en tout cas dans le département de l'Indre-et-Loire et depuis moins de dix ans, frauduleusement soustrait la somme de 39 388, 43 francs au préjudice des Docks de France (magasin Suma) ? " ; 2° " pour ces faits, l'accusé Christian X... a-t-il agi ensemble et de concert avec l'accusé Jean-Pierre Y... ? " ; que les troisième et quatrième questions concernant les mêmes faits attribués à Y... sont libellées selon le même procédé ; qu'ainsi la question n° 4 énonce :
" pour ces faits, l'accusé Jean-Pierre Y... a-t-il agi ensemble et de concert avec l'accusé Christian X... ? " que les questions 6 à 14 sont formulées selon le même procédé ;
" alors qu'à partir du moment où la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question n° 2, à savoir que Christian X... a agi ensemble et de concert avec Jean-Pierre Y... pour commettre les faits énoncés à la question n° 1, ils ne pouvaient plus répondre négativement à la question n° 4 concernant les mêmes faits et les mêmes coauteurs et se trouvaient dans l'impossibilité, sous peine de contradiction, de se prononcer sur la non-culpabilité de Y..., puisque cette culpabilité avait déjà été reconnue précédemment en même temps que celle de X... ; que les questions suivantes posées selon le même procédé sont entachées de la même complexité prohibée " ;
Attendu que les questions par lesquelles il leur était demandé, d'une part, si l'accusé X... avait agi " ensemble et de concert avec l'accusé Y... ", d'autre part, si l'accusé Y... avait agi " ensemble et de concert avec l'accusé X... ", ont toutes été résolues affirmativement par la Cour et le jury ;
Qu'il s'ensuit qu'il n'existe aucune contradiction entre les réponses à ces questions, au demeurant surabondantes et que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le pourvoi de Z... contre l'arrêt civil :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 372 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que la Cour d'assises, statuant sur les intérêts civils réclamés par C..., victime d'un cambriolage et d'une agression, a condamné Z..., déclaré coupable de recel de malfaiteur, à payer, conjointement avec les auteurs principaux et les complices du crime, la somme de 160 000 francs en réparation des préjudices corporels et psychologiques par lui subis ;
" alors que le fait d'avoir été reconnu coupable de recel de malfaiteur, en ayant favorisé l'écoulement des bijoux volés, ne pouvait, en l'absence de lien direct entre l'infraction retenue à sa charge et le dommage subi par C... lors d'une agression auquel était resté totalement étranger Z..., justifier une condamnation à réparer, même solidairement, le préjudice subi par la partie civile, directement et exclusivement causé par Y..., X... et A... " ;
Attendu que Z... a été déclaré coupable, notamment, d'avoir sciemment recelé A... et X... qu'il savait recherchés pour crime, et condamné pénalement de ce chef ;
Que X... et A... ont, de leur côté, été déclarés coupables d'un vol avec port d'arme commis au préjudice de C... ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, la Cour d'assises a condamné Z..., solidairement avec les auteurs du vol avec arme, à payer des dommages-intérêts à C... ;
Attendu qu'en statuant ainsi, les juges du fond ont fait l'exacte application de la loi ;
Attendu en effet que la solidarité, édictée pour les restitutions et les dommages-intérêts par l'article 55 du Code pénal, s'applique aux auteurs de crimes ou délits connexes ; qu'aux termes de l'article 203 du Code de procédure pénale, les infractions sont connexes lorsque, notamment, les coupables ont commis les unes pour assurer l'impunité des autres ; que tel étant le cas de Z... lorsqu'il a sciemment recelé les auteurs du crime commis au préjudice de Dufau, le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la Cour et par le jury ;
REJETTE les pourvois.