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17/02/1987 | FRANCE | N°86-93042

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 février 1987, 86-93042


CASSATION et règlement de juges sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour en date du 12 mai 1986 qui, dans une information suivie contre X... Klaus et Y... Françoise, épouse Z..., inculpés d'intelligences avec des agents d'une puissance étrangère de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la France ou à ses intérêts économiques essentiels, complicité, a déclaré qu'il n'y avait lieu à suivre.
LA COUR,
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Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 80 a...

CASSATION et règlement de juges sur le pourvoi formé par :
- le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de ladite cour en date du 12 mai 1986 qui, dans une information suivie contre X... Klaus et Y... Françoise, épouse Z..., inculpés d'intelligences avec des agents d'une puissance étrangère de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la France ou à ses intérêts économiques essentiels, complicité, a déclaré qu'il n'y avait lieu à suivre.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 80 alinéa 3 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré n'y avoir lieu à suivre contre les inculpés Klaus X... et Françoise Y..., épouse Z..., des chefs d'intelligences avec des agents d'une puissance étrangère et de complicité ;
" aux motifs qu'il ressortait de l'examen des publications ou revues analogues à celles qu'avait pu remettre X... à ses correspondants étrangers que celles-ci se trouvaient en vente libre dans le commerce et n'avaient aucun caractère confidentiel ni secret et qu'il n'apparaissait pas que les communications de renseignements d'ordre technique faites par lui et obtenus par l'intermédiaire de Y..., épouse Z..., en raison de leur caractère général et public, aient pu constituer des révélations de secrets susceptibles de nuire aux intérêts de la Nation ;
" alors que, d'une part, le crime prévu à l'article 80 alinéa 3 du Code pénal est constitué lorsque sont établies des intelligences avec des agents d'une puissance étrangère de nature, indépendamment de tout résultat positif, à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la France ou à ses intérêts économiques essentiels ;
" alors que, d'autre part, cette disposition n'exige pas que les renseignements fournis aient eu un caractère secret ;
" et alors qu'enfin l'arrêt n'a pas répondu aux réquisitions du ministère public qui faisaient valoir que les réponses fournies à l'inculpé X... contenaient des données, des éléments, des informations susceptibles d'intéresser les services de la puissance étrangère et, à ce titre, préjudiciables à la France " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu, en premier lieu, que les arrêts de la chambre d'accusation sont déclarés nuls s'ils ne contiennent pas de motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne mettent pas la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ;
Attendu, en second lieu, que, selon l'article 80 alinéa 3 du Code pénal est puni des peines prévues par ledit texte celui qui entretiendra avec les agents d'une puissance étrangère des intelligences de nature à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la France ou à ses intérêts économiques essentiels ;
Attendu que les juges relèvent que X... avait eu cinq " contacts " avec les agents d'une puissance étrangère notamment à Berlin Est et leur avait remis des revues, documents et dépliants publicitaires que les visiteurs pouvaient se procurer au SICOB puis avait transmis à ses interlocuteurs des renseignements d'ordre technique obtenus soit directement de François Z..., ingénieur d'aéronautique, soit par Françoise Z..., épouse de ce dernier ; qu'ils énoncent, d'une part, que les documents livrés étaient en vente libre et " n'avaient aucun caractère confidentiel " et, d'autre part, qu'il n'apparaissait pas que les réponses faites par Z..., en raison de leur généralité et du caractère public des données communiquées eussent pu constituer des révélations de secrets susceptibles de nuire aux intérêts de la Nation ;
Mais attendu qu'en cet état la chambre d'accusation, en se fondant sur la circonstance que les renseignements ou documents n'étaient ni secrets ni confidentiels, condition qui n'est pas exigée par l'article 80 alinéa 3 du Code pénal pour que le crime soit constitué, et en s'abstenant de rechercher si les intelligences entretenues par X... avec les agents d'une puissance étrangère étaient de nature à nuire aux intérêts de la France, protégés par la loi, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Qu'ainsi la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris du 12 mai 1986,
Et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens ;
Et, pour le cas où celle-ci estimerait qu'il y a lieu à accusation,
Vu l'article 611 du Code de procédure pénale,
Réglant de juges par avance,
ORDONNE, dès à présent, le renvoi de la cause devant la cour d'assises de Paris, spécialement composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du Code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-93042
Date de la décision : 17/02/1987
Sens de l'arrêt : Cassation et règlement de juges
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° SURETE DE L'ETAT - Intelligence avec les agents d'une puissance étrangère - Eléments constitutifs.

1° Voir le sommaire suivant.

2° SURETE DE L'ETAT - Intelligence avec les agents d'une puissance étrangère - Renseignements fournis - Caractère secret - Nécessité (non).

2° Le crime d'intelligence avec les agents d'une puissance étrangère, prévu à l'article 80 alinéa 3 du Code pénal est constitué lorsque sont établies des intelligences avec des agents d'une puissance étrangère de nature, indépendamment de tout résultat positif, à nuire à la situation militaire ou diplomatique de la France ou à ses intérêts économiques essentiels. Les dispositions de ce texte n'exigent pas que les renseignements fournis aient un caractère secret.


Références :

Code pénal 80 al. 3

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mai 1986

(1°) CONFER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1982-03-23, bulletin criminel 1982 N° 85 p. 230 (Rejet). Cour de Cassation, chambre criminelle, 1985-02-12, bulletin criminel 1982 N° 70 p. 190 (Rejet). (1°) CONFER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1965-10-21, bulletin criminel 1965 N° 208 p. 466 (Rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 fév. 1987, pourvoi n°86-93042, Bull. crim. criminel 1987 N° 78 p. 213
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 78 p. 213

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, conseiller le plus ancien faisant fonction .
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Zambeaux
Avocat(s) : Avocat :la SCP Waquet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.93042
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