Attendu, selon l'arrêt déféré, que, par acte d'huissier de justice du 11 janvier 1982, le directeur général des Impôts a notifié aux époux X... l'exercice par l'Etat du droit de préemption prévu à l'article L. 18 du livre des procédures fiscales, sur un immeuble qu'ils avaient acquis par acte du 9 septembre 1981 ; que la notification était motivée par l'énonciation que l'Administration estimait le prix de vente du bien insuffisant ; que les époux X... ont assigné le directeur général devant le tribunal de grande instance afin que soit constatée la nullité de la décision notifiée le 11 janvier 1982, faute d'énoncer les motifs de fait sur lesquelles elle s'appuyait, et que le tribunal a accueilli cette demande ; .
Sur le premier moyen ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'avoir déclaré recevable l'appel formé par le directeur général des Impôts contre le jugement, alors selon le pourvoi, que l'article L. 199 du livre des procédures fiscales que la cour d'appel a violé attribue compétence au tribunal de grande instance, statuant en premier et dernier ressort, pour tout ce qui concerne la matière des droits d'enregistrement, que le droit de préemption accordé par l'article L. 18 du même livre à l'Administration en cas d'insuffisance du prix de vente d'un immeuble ne constitue que l'un des moyens qui lui sont reconnus pour faire respecter ces droits dans ce domaine, notamment en ce qui concerne l'assiette de l'impôt, qu'en conséquence les dispositions de l'article L. 199 sont applicables aux contestations relatives à l'exercice de ce droit ;
Mais attendu que même s'ils sont de nature fiscale, les litiges relatifs à l'exercice par l'administration des impôts du droit de préemption institué à l'article L. 18 du Livre des procédures fiscales n'entrent pas dans les prévisions de l'article L. 199 du même livre, applicable aux contestations visant les décisions prises par l'Administration sur les réclamations contentieuses, la circonstance que l'acquéreur évincé ait présenté une telle réclamation, non exigée en la matière, étant inopérante pour déterminer la procédure applicable ; qu'il s'ensuit que le jugement du tribunal de grande instance statuant sur la contestation des époux X... était susceptible d'appel ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen ;
Vu l'article L. 18 du Livre des procédures fiscales, ensemble la loi du 11 juillet 1979 ;
Attendu que lorsque l'administration des impôts use des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 18 du Livre des procédures fiscales, l'acquéreur évincé peut demander au tribunal de grande instance de se prononcer sur sa contestation tendant à établir que les conditions d'application du texte n'étaient pas réunies et spécialement que le prix stipulé à l'acte d'acquisition n'était pas inférieur à la valeur vénale réelle du bien en cause ; qu'il s'ensuit que la notification de la décision n'est régulière que si elle énonce les motifs de fait sur lesquels se fonde l'Administration pour estimer le prix de vente insuffisant ;
Attendu que, pour débouter les époux X... de leur demande en nullité, l'arrêt a retenu que, l'Administration ayant exercé un pouvoir discrétionnaire, il ne pouvait lui être imposé davantage que l'expression de son opinion, et que la notification du 11 janvier 1982 répondait à cette exigence ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen ;
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 4 mars 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon