CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Jean René,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 1988 qui, pour contrefaçon et usage de sceaux contrefaits, escroquerie et tentative d'escroquerie, détention d'armes sans autorisation, importation de marchandise de contrebande, faux en écritures privées et usage, violation du secret professionnel, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement dont 1 avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans avec obligation de rembourser pendant ce délai les sommes allouées aux parties civiles, qui a ordonné son maintien en détention et la confiscation des armes saisies et s'est prononcé sur les actions civiles du conseil général du Nord, et de l'Association générale des médecins de France ainsi que sur l'action de l'administration des Douanes, partie intervenante.
LA COUR,
Vu les mémoires produits tant en demande qu'en défense ;
Sur le moyen unique de cassation proposé et pris de la violation des articles 503 et 509 du Code de procédure pénale, 1134 du Code civil, ensemble violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :
" en ce que la cour d'appel de Douai, par interprétation des actes d'appel des 11 et 16 juillet 1987, a estimé ne pas être saisie d'un appel concernant les " intérêts civils et financiers " sur lesquels le jugement entrepris avait statué en conséquence de la déclaration de culpabilité du prévenu X... des délits de (I) contrefaçon de sceaux, timbres, marque d'une autorisation et usage et (II) faux en écriture privée et usage, utilisation de vrais sceaux en vue d'en faire un usage frauduleux, escroquerie ;
" aux motifs que les dispositions pénales relatives aux infractions susénoncées constituaient l'unique objet de l'acte d'appel du 11 juillet 1987, cependant que l'objet de l'acte d'appel du 16 juillet suivant concernait les autres dispositions pénales du jugement avec les intérêts civils et pécuniaires s'y rattachant ; qu'ainsi il n'y avait pas lieu de recourir à une mesure d'instruction pour déterminer la portée exacte de ces deux actes d'appel ;
" alors que, d'une part, lorsque la déclaration d'appel du prévenu condamné a été reçue en deux fois par le même fonctionnaire de l'établissement pénitentiaire où il est détenu et que, du rapprochement des deux imprimés remplis l'un et l'autre par ce fonctionnaire, il ressort que celui-ci a enregistré la volonté du déclarant de frapper d'appel l'ensemble des dispositions pénales du jugement en ajoutant de sa main sur le second imprimé " intérêts civils et financiers " la cour d'appel ne peut légalement limiter la portée de cet appel général en procédant à une dissociation arbitraire des deux imprimés ; laquelle, sous couvert de l'interprétation, dénature le sens clair et précis de la volonté qui s'y trouve exprimée ;
" alors que, d'autre part, la déclaration d'appel reçue en deux fois dans les conditions susénoncées et d'où il ne résulte nettement aucune restriction doit être interprétée comme déférant à la cour d'appel la cause dans son ensemble ;
" et alors que, enfin, et en toute hypothèse, méconnaît les droits de la défense, la cour d'appel qui limite sa saisine par interprétation d'un appel du prévenu recueilli en deux fois par le même fonctionnaire de l'établissement pénitentiaire où il est détenu, sans ordonner la mesure d'instruction qui lui est demandée aux fins d'entendre ce fonctionnaire et de savoir quelle volonté du prévenu détenu il a voulu transcrire dans les déclarations recueillies successivement " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que s'il appartient à la cour d'appel de déterminer l'étendue de sa saisine elle ne saurait lui apporter des restrictions que ne contient pas l'acte d'appel ;
Attendu que pour se refuser à examiner les conclusions du prévenu se rapportant aux actions civiles mises en mouvement par le conseil général du Nord et par l'Association générale des médecins de France, et dire ces deux parties au procès, quoique régulièrement citées, non concernées par l'appel de X..., les juges du second degré, après avoir analysé les mentions portées sur les deux déclarations faites dans les délais auprès du chef de l'établissement pénitentiaire les 11 et 16 juillet 1987 énoncent que l'acte d'appel du 16 juillet, bien qu'il porte la mention " plus les intérêts civils et financiers ", ne pouvait intéresser que l'action de l'administration des Douanes, les premiers juges n'ayant pas été saisis d'une action civile à raison des faits de violation du secret professionnel ;
Mais attendu que l'acte d'appel du 16 juillet 1987 signé comme celui du 11 dans les délais de la loi, spécifiant que la décision frappée de cette voie de recours était le jugement du 10 juillet 1987, dans ses dispositions pénales, civiles et financières, la cour d'appel ne pouvait, attribuer l'effet et le bénéfice de la chose jugée aux actions civiles du conseil général du Nord et de l'Association générale des médecins de France ;
Que dès lors, la cassation est encourue ;
Et attendu que les dispositions de l'arrêt concernant ces intérêts civils sont, en l'espèce, indivisibles de celles qui, statuant sur l'action publique et sur l'action douanière, ont prononcé notamment contre le prévenu une peine d'emprisonnement assortie partiellement du sursis avec mise à l'épreuve et ont mis à sa charge l'obligation spéciale de rembourser l'ensemble des parties civiles ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions pénales, civiles et douanières, l'arrêt précité de la cour d'appel de Douai du 20 janvier 1988, et pour être jugé à nouveau, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens.