CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... René, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 10 février 1989, qui, dans la procédure suivie contre Serge Y... du chef de blessures involontaires, a ordonné la rectification d'un précédent arrêt rendu par la même cour d'appel le 20 mai 1988.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 710 et 591 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué, saisi par le tiers responsable d'une requête en rectification d'un arrêt du 20 mai 1988 ayant fixé l'indemnité complémentaire revenant à la victime à la somme de 403 205, 82 francs, a jugé par voie de rectification qu'il restait dû à cette victime la somme de 241 146, 98 francs ;
" aux motifs que s'agissant manifestement d'une erreur matérielle dans le calcul du préjudice, la requête est recevable, aux termes de l'article 710 du Code de procédure pénale ; que la somme de 162 058, 84 francs, montant des prestations versées par la caisse, doit être retranchée de celle de 845 377, 02 francs montant du préjudice global ; que le compte est donc le suivant :
- Prestations :..................... 162 058, 84 francs
-ITT :............................. 183 318, 18 francs
-IPP :............................. 500 000, 00 francs
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845 377, 02 francs
-A déduire :....................... 162 318, 84 francs
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- Prestations :..................... 683 318, 18 francs
-A déduire capital de la
rente réévaluée :................... 392 171, 20 francs
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291 146, 98 francs
-Préjudice personnel :............. 110 000, 00 francs
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- reste dû à X... :........... 401 146, 98 francs
-somme déjà payée :................ 160 000, 00 francs
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Reste :............................. 241 146, 98 francs
" alors que si les juridictions peuvent procéder à la rectification des erreurs purement matérielles contenues dans leurs décisions, ce pouvoir trouve sa limite dans la défense de modifier la chose jugée, notamment en restreignant les droits consacrés par ces décisions ; qu'en l'espèce, en déduisant du préjudice de la victime par voie de rectification le montant des prestations sociales qui lui avaient été servies, la cour d'appel a modifié sa décision précédente en violation des articles précités " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, si, en application de l'article 710 du Code de procédure pénale, les juridictions de jugement peuvent procéder à la rectification des erreurs purement matérielles contenues dans leurs décisions, ce pouvoir trouve cependant sa limite dans la défense de modifier la chose jugée ou de restreindre ou d'accroître les droits consacrés par ces décisions ;
Attendu que, statuant sur la réparation des conséquences dommageables de l'accident dont Serge Y..., reconnu coupable de blessures involontaires sur la personne de René X..., avait été déclaré entièrement responsable, la cour d'appel de Grenoble a, par arrêt du 20 mai 1988, devenu définitif, condamné le prévenu à payer à la partie civile la somme de 403 205, 82 francs ;
Attendu que, sur requête du prévenu, la même cour d'appel a décidé que le dispositif de son arrêt devait être rectifié et a substitué à la somme de 403 205, 82 francs allouée celle de 241 146, 98 francs au motif que ledit arrêt avait, par suite d'une erreur matérielle, omis de déduire de la première somme le montant des prestations versées par la caisse de sécurité sociale ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que la créance de la partie civile souverainement déterminée par les juges et consacrée par le dispositif de l'arrêt devenu définitif se trouvait réduite par l'arrêt attaqué, sans que les motifs de la première décision ne commandent une telle rectification, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de la règle ci-dessus rappelée ;
Que la cassation est dès lors encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 10 février 1989 en toutes ses dispositions,
Et attendu qu'il ne reste rien à juger,
DIT n'y avoir lieu à renvoi.