AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société EUROFARAD, dont le siège est à Paris (11ème) ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 15 mai 1987 par la cour d'appel de Paris (18ème chambre), au profit de l'Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Paris (URSSAF), dont le siège est à Montreuil (Seine-Saint-Denis) ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 1er février 1990, où étaient présents : M. Le Gall, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Feydeau, conseiller référendaire rapporteur, MM. Lesire, Leblanc, Hanne, conseillers, Mme Barrairon, conseiller référendaire, M. Gauthier, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Feydeau, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de la société Eurofarad, de la SCP Desaché et Gatineau, avocat de l'Urssaf de Paris, les conclusions de M. Gauthier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les trois moyens réunis :
Attendu que la société Eurofarad ayant eu recours d'octobre 1978 à décembre 1979 à de la main-d'oeuvre intérimaire fournie par la société Spain, l'URSSAF lui a réclamé, sur le fondement de l'article L. 124-8 du Code du travail, le paiement, aux lieu et place de celle-ci, défaillante, des cotisations de sécurité sociale dues pour les salariés mis à sa disposition et évaluées forfaitairement en application de l'article 152 du décret n° 46-1378 du 8 juin 1946 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 18ème chambre B, 15 mai 1987) d'avoir accueilli cette prétention, alors, d'une part, qu'en décidant que la procédure suivie par l'URSSAF était régulière, tout en constatant qu'au lieu d'adresser successivement l'avis prévu à l'article R. 124-7 du Code du travail puis l'éventuelle mise en demeure prévue par les articles L. 152 et L. 153 du Code de la sécurité sociale, elle s'était bornée à adresser la mise en demeure prévue par ces articles à l'entreprise utilisatrice, la cour d'appel a méconnu la portée de l'article R. 124-7 du Code du travail ; alors, d'autre part, qu'en se bornant à affirmer que la taxation forfaitaire ne pouvait être remise en cause par le juge saisi du litige que si l'employeur qui en avait la charge apportait la preuve que les éléments retenus par l'agent de contrôle étaient inexacts, sans rechercher si en fixant le montant des salaires à 50% du montant du chiffre d'affaires hors taxes de l'entreprise de travail temporaire, l'URSSAF ne s'était pas écartée des bases de calcul fixées par l'article 152 susvisé et n'était, dès lors, pas tenue de justifier de l'existence des présomptions sérieuses sur lesquelles elle s'était fondée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions dudit article et de l'article 1315 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en attendant plus de deux ans après la cessation de
l'activité de l'entreprise de travail temporaire et plus de quatre ans après l'expiration de la période pour laquelle elle a délivré des attestations certifiant que cette entreprise était à
jour de ses cotisations, pour vérifier l'exactitude des déclarations fournies, l'URSSAF a agi avec une légèreté blâmable et au mépris des droits de l'entreprise utilisatrice qu'elle a empêchée de se retourner en temps utile contre l'entreprise de travail temporaire, en sorte qu'en refusant d'admettre que l'union de recouvrement avait engagé sa responsabilité, la cour d'appel a violé les articles 1382 et suivants du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir exactement observé qu'aucun délai n'était imparti pour aviser l'entreprise utilisatrice de l'envoi à l'entreprise de travail temporaire d'une mise en demeure, la cour d'appel a constaté que la défaillance de cette dernière avait été signalée à la société Eurofarad par la mise en demeure du 2 mars 1981 ; que, d'autre part, après avoir énoncé à bon droit que la taxation forfaitaire effectuée conformément à l'article 152 du décret n° 46-1378 du 8 juin 1946 était opposable à l'utilisateur substitué de plein droit à l'entreprise de travail temporaire défaillante, la cour d'appel a relevé que la société Eurofarad n'apportait pas la preuve qui lui incombait de l'inexactitude de cette taxation ; qu'enfin, c'est dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation des éléments de la cause qu'elle a estimé qu'il n'existait pas en l'espèce de circonstances particulières justifiant la mise en oeuvre de la responsabilité de l'URSSAF ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
! Condamne la société Eurofarad, envers l'URSSAF de Paris, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du huit mars mil neuf cent quatre vingt dix.