.
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 30 novembre 1989), que MM. X... et Y..., employés au service de la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne, ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de primes de crèche en application du protocole d'accord du 2 juillet 1968 annexé à la convention collective du personnel des organismes de Sécurité sociale ;
Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer des sommes à ces titres pour les périodes antérieures au 1er août 1988, alors, selon le moyen, d'une part, que la prime de crèche ne constitue pas un salaire, ni une annexe de salaire, mais est le fruit d'une mesure visant à promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes et ne rentre pas dans les prévisions des articles L. 123-1 c, L. 123-2, L. 140-2 du Code du travail et de la directive du 9 février 1976 ; que l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 et l'article L. 123-3 du Code du travail justifiaient en toute hypothèse l'octroi de la prime de crèche aux seules femmes, quelle que soit la portée juridique de la directive du 9 février 1976, puisque dans sa rédaction en cause du 2 juillet 1968, elle tendait à remédier aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmes (violation des articles L. 123-1 et suivants, L. 140-2 du Code du travail, 19 de la loi du 13 juillet 1983, de la directive 76-207 du 9 février 1976) ; alors, d'autre part, que la directive du 9 février 1976 n'est pas applicable directement dans les Etats membres et ne se substitue pas au droit interne ; qu'une loi ou un règlement est nécessaire dans la mesure où la directive oblige les Etats à conformer leur propre politique à un objectif déterminé mais les laisse libres des moyens propres à en assurer l'exécution, et que la sanction par la Cour de justice des Communautés européennes pour manquement à la directive ne peut davantage avoir pour conséquence de faire entrer le texte de la directive dans le droit positif de cet Etat (violation des articles 189 CEE, 1er du Code civil) ; alors, encore, que l'Etat se fût-il révélé défaillant pour la mise en harmonie exigée par la directive dans un délai donné, celle-ci ne pouvait être appliquée directement par le juge national que dans la mesure où la directive était inconditionnelle et suffisamment précise ; que l'arrêt, par motifs propres ou adoptés, ne justifie pas qu'il en soit ainsi, la seule référence à " l'égalité de traitement entre hommes et femmes, en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle " n'y pouvant suffire, pas plus que la référence à " l'exclusion d'une discrimination fondée sur le sexe, soit directement soit indirectement par référence notamment à l'état matrimonial ou familial " dans la mesure surtout où (article 2, paragraphes 3 et 4) " la présente directive ne fait pas obstacle aux dispositions relatives à la protection de la femme, notamment en ce qui concerne la grossesse et la maternité et aux mesures visant à promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes, en particulier en remédiant aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmes... " ; qu'enfin, l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes est totalement étranger à la
prime en cause et que les reproches généraux qu'il adresse à la République française n'impliquent nullement l'obligation pour le juge national de se refuser à l'application du droit interne au profit du droit communautaire (violation des articles 189 CEE, 1er, 1351 du Code civil) ;
Mais attendu que selon les articles 119 du traité CEE du 25 mars 1957 et L. 140-2 du Code du travail, tout avantage payé par l'employeur au travailleur en raison de son emploi constitue une rémunération ; qu'aux termes de l'article L. 140-4 du Code du travail, toute disposition figurant notamment dans un accord collectif de travail et qui, contrairement aux articles L. 140-2 et L. 140-3 du même Code, comporte pour un ou des travailleurs de l'un des deux sexes, une rémunération inférieure à celle de travailleurs de l'autre sexe pour un même travail ou un travail de valeur égale, est nulle de plein droit et la rémunération plus élevée dont bénéficient ces derniers travailleurs est substituée de plein droit à celle que comportait la disposition entachée de nullité ;
Attendu qu'ayant constaté que le protocole d'accord du 2 juillet 1968 prévoyait, pour la période en cause, l'attribution de primes de crèches aux mères de famille employées par les organismes de Sécurité sociale, la cour d'appel a, à bon droit, condamné la Caisse à verser cette prime aux pères de famille remplissant les conditions prévues par cet accord, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux dernières branches du moyen ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi