REJET du pourvoi formé par :
- X... Nadia, épouse Y...,
- Y... Jean,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Angers, chambre correctionnelle, du 21 décembre 1989, qui, pour tentative d'escroquerie, les a condamnés chacun à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 6 000 francs et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 593 du Code de procédure pénale et 405 du Code pénal, violation de la loi :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré les époux Y... coupables d'une tentative d'escroquerie au préjudice de la société Yves Rocher ;
" aux motifs qu'il est établi que les prévenus ont porté ou fait porter dans les cases desdits bons des croix ne correspondant pas à des achats réels entre le moment de la remise du bon par la cliente et l'envoi groupé fait par les prévenus en fin de campagne promotionnelle ;
" que, contrairement à leurs insinuations, les pratiques n'ont pu avoir lieu qu'à leur instigation puisqu'ils en étaient seuls bénéficiaires dans la mesure où les bons étaient les documents servant de base au calcul du remboursement à leur profit auquel s'était engagée la SA Yves Rocher ;
" qu'à l'appui de leurs allégations mensongères sur des ventes prétendument effectuées, les époux Y... ont utilisé les bons de commande à eux remis par la clientèle sur lesquels ont été portées des croix ne correspondant à aucune vente réelle, dans le but d'obtenir le remboursement offert par la SA Yves Rocher, leurs manoeuvres n'ayant échoué qu'en raison de la vigilance de leur victime (arrêt p. 5, 3e alinéa et suivants) ;
" alors que le simple mensonge écrit, qui n'est pas corroboré et appuyé par des éléments externes, ne constitue pas une manoeuvre frauduleuse ; qu'en se fondant sur le seul fait que les prévenus avaient porté sur les bons des croix ne correspondant pas à des achats réels, sans caractériser aucun élément externe susceptible de corroborer cette fausse allégation, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les époux Y..., exploitants d'un magasin assurant, aux termes d'un contrat passé avec la société Yves Rocher, la distribution exclusive des produits de cette marque, ont, à l'issue d'une campagne de promotion publicitaire, adressé à la société précitée trente-huit bons de commande mentionnant, sous l'identité de véritables clients, des commandes fictives de produits ; que le montant total de ces commandes devait, selon les engagements pris par la société venderesse dans le cadre de cette campagne, permettre aux époux Y... de percevoir, au titre de la commission consentie, une somme de 11 926, 24 francs dont ils ont sollicité le règlement à leur profit ;
Attendu que, pour condamner les prévenus du chef de tentative d'escroquerie, les juges du second degré relèvent que, selon les déclarations faites par les clients dont les noms figuraient sur les bons de commande envoyés à la société Yves Rocher, ces derniers n'avaient, soit effectué aucun des achats mentionnés, soit acquis que des produits moins coûteux que ceux indiqués ; que d'autres clients n'avaient fait que déposer leur bon de commande dans le magasin des prévenus, dans le seul but de participer, sans engagement d'achat, au tirage au sort accompagnant la vente promotionnelle ; qu'une personne, employée des époux Y... au moment des faits, avait déclaré aux enquêteurs puis au juge d'instruction, avant de se rétracter au cours de sa confrontation avec les prévenus, " avoir reçu des ordres de Jean Y... pour remplir les cases des bons de vente par correspondance sans qu'il ait été fait de vente et en indiquant de préférence les articles les plus chers " ;
Que les juges du fond ajoutent que les prévenus " ont porté ou fait porter dans les cases des bons de commande des croix ne correspondant à aucun achat réel " et " qu'à l'appui de leurs allégations mensongères sur des ventes prétendument effectuées ", ils ont utilisé les bons ainsi falsifiés dans le but d'obtenir le remboursement promis par la société Yves Rocher, leurs manoeuvres n'ayant échoué qu'en raison de la vigilance de leur victime ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, déduites de l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, la cour d'appel, qui a relevé tous les éléments constitutifs du délit de tentative d'escroquerie, notamment les manoeuvres frauduleuses caractérisées par l'intervention de tiers, destinées à persuader l'existence d'un crédit imaginaire et à obtenir la remise des fonds, a donné une base légale à sa décision ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.