REJET des pourvois formés par :
1°) X... Patrick,
2°) Y... Elie,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 27 mars 1991 qui les a condamnés, pour fabrication, offre de vente, détention en vue de la vente, et vente de matériel de captation frauduleuse de programmes diffusés et circulation de marchandises assujetties à justification d'origine, délit douanier réputé importation en contrebande, le premier à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, le second à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 15 000 francs d'amende, les deux prévenus solidairement à diverses pénalités douanières et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu la connexité joignant les pourvois ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation propre à Elie Y... et pris de la violation des articles 60 du Code des douanes, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué écarte l'exception qu'Elie Y... soulevait afin de faire constater la nullité de la procédure douanière ;
" aux motifs que le procès-verbal en cause est fondé sur les dispositions (de l'article 60 du Code des douanes) qui stipulent que, pour l'application du Code des douanes, et en vue de la recherche de la fraude, les agents des Douanes peuvent procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes (cf. arrêt attaqué, p. 7, 3e attendu) ; qu'il s'agit d'évidence d'un pouvoir qui n'est pas limité au passage de la frontière, comme le soutient le prévenu, où il s'exerce généralement, mais d'un pouvoir général de surveillance et de contrôle dans le ressort du rayon douanier..., qui va jusqu'à la visite domiciliaire et au droit de communication (cf. arrêt attaqué, p. 7, 4e attendu) ; qu'il s'ensuit que l'article 60, comme le soulignent les premiers juges, est d'une " portée générale qui fonde l'action douanière critiquée (cf. arrêt attaqué, p. 7, 5e attendu) ;
" alors que l'article 60 du Code des douanes n'est applicable qu'au cas de franchissement de la frontière ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour écarter l'exception régulièrement soulevée par le prévenu et tirée de la nullité de la procédure douanière à raison de l'illégalité de son interpellation par des agents des Douanes agissant, en vertu de l'article 60 du Code des douanes, en dehors du franchissement des frontières, les juges du fond retiennent qu'en vue de la recherche de la fraude, les douaniers disposent du pouvoir qui leur est conféré par l'article 60 précité et qui les autorise à procéder à la visite des marchandises, des moyens de transport et à celle des personnes ; qu'il s'agit d'un pouvoir général qui s'exerce sur tout le territoire douanier, en sorte que le contrôle douanier dont le prévenu a fait l'objet au dépôt de marchandises en gare de Metz est régulier ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;
Qu'en effet, réserve faite des prévisions de l'article 60 bis, il résulte des dispositions combinées des articles 43 et 60 du Code des douanes que pour l'application des dispositions dudit Code et en vue de la recherche de la fraude douanière, les agents des Douanes peuvent procéder, sur l'ensemble du territoire douanier, à la visite des marchandises, des moyens de transport et à celle des personnes ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation propre à Elie Y... : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation commun aux demandeurs pris de la violation des articles 429-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué condamne Elie Y... à la peine de 1 année d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 15 000 francs, et Patrick X... à la peine de 18 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 30 000 francs, pour le délit prévu et réprimé par l'article 429-1 du Code pénal ;
" aux motifs que l'article 429-1 du Code pénal vise les personnes qui font commerce de matériels de piratage par la fabrication, l'importation en vue de la vente ou de la location, l'offre de vente, la détention en vue de la vente, ou l'installation d'équipements pirates (cf. jugement entrepris, p. 10, 8e attendu) ; qu'il n'importe, comme le soutient Y..., de rechercher, en l'espèce, si les décodeurs étaient opérationnels (cf. jugement entrepris p. 10, 9e attendu) ;
" alors que les équipements visés par l'article 429-1 du Code pénal sont ceux qui sont conçus pour capter frauduleusement des programmes télédiffusés, lorsque ces programmes sont réservés à un public déterminé qui y accède moyennant une rémunération versée à l'exploitant du service ; que les équipements fabriqués, détenus, offerts à la vente ou vendus par Elie Y... et par Patrick X... étaient conçus, non pour capter le programme télédiffusé par la société Canal Plus, mais seulement pour décrypter ; que n'importe qui, en effet, peut, au moyen d'un récepteur ordinaire, capter le programme télédiffusé par la société Canal Plus ; qu'en déclarant Elie Y... et Patrick X... coupables du délit prévu et réprimé par l'article 429-1 du Code pénal, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement auquel il se réfère que pour déclarer les prévenus coupables de l'infraction prévue par l'article 429-1 du Code pénal, les juges du fond relatent qu'Elie Y... a été interpellé au moment où il retirait deux colis en gare de Metz contenant des copies de décodeur Canal Plus accompagnées d'une notice d'utilisation, appareils qu'il commercialisait ainsi qu'il l'a reconnu ; que Patrick X..., désigné comme le fournisseur, a reconnu la fabrication de 170 décodeurs dont un certain nombre ont été vendus par ses soins ; que les juges retiennent, au vu des déclarations de divers témoins, que ces appareils " pirates " permettaient de capter les émissions télévisées, ce qui établit leur efficacité ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, déduites d'une appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, la cour d'appel qui a caractérisé, en tous ses éléments constitutifs, l'infraction retenue à la charge des prévenus, a justifié sa décision, sans encourir les griefs du moyen ;
Qu'en effet l'article 429-1 du Code pénal qui incrimine le fait de capter frauduleusement des programmes télédiffusés, réprime nécessairement le décryptage de ces programmes en violation des droits de l'exploitant du service de télédiffusion, lorsqu'ils sont réservés à un public déterminé qui y accède moyennant rémunération ; que tel est le cas en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation commun aux demandeurs : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.