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31/03/1992 | FRANCE | N°91-04032

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 31 mars 1992, 91-04032


ARRÊT N° 3

Attendu que M. X... a demandé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil en faisant valoir, d'une part, qu'il avait à faire face avec 5 890 francs, montant des ressources mensuelles de son ménage, à des mensualités s'élevant au total à 4 804,18 francs, à titre de remboursement de divers prêts qui lui avaient été consentis, et que, d'autre part, il était poursuivi en sa qualité de caution de la société anonyme Vic voyages, déclarée en règlement judiciaire, en paiement des sommes de 139 353,51 et 222 931,78 francs ; que l'arrêt confirmati

f attaqué a dit n'y avoir lieu à ouverture de la procédure de redressement ...

ARRÊT N° 3

Attendu que M. X... a demandé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil en faisant valoir, d'une part, qu'il avait à faire face avec 5 890 francs, montant des ressources mensuelles de son ménage, à des mensualités s'élevant au total à 4 804,18 francs, à titre de remboursement de divers prêts qui lui avaient été consentis, et que, d'autre part, il était poursuivi en sa qualité de caution de la société anonyme Vic voyages, déclarée en règlement judiciaire, en paiement des sommes de 139 353,51 et 222 931,78 francs ; que l'arrêt confirmatif attaqué a dit n'y avoir lieu à ouverture de la procédure de redressement judiciaire civil, en se fondant, d'une part, sur le caractère professionnel de la dette née du cautionnement et, d'autre part, en ce qui concerne ses engagements personnels, sur la possibilité appartenant à M. X..., de solliciter, devant le juge des référés, la suspension ou le rééchelonnement de ses emprunts pour une durée de 2 ans ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... reproche à la cour d'appel d'avoir, pour statuer comme elle a fait, décidé que la dette née du cautionnement a un caractère professionnel aux motifs que, d'abord, le législateur a entendu protéger les personnes qui se sont laissées surendetter à l'occasion de l'acquisition de biens de consommation et a, en revanche, écarté celles qui se sont endettées dans la recherche d'un profit, qu'ensuite, s'ajoutent aux dettes professionnelles résultant d'une exploitation commerciale, celles contractées par une personne qui trouve un intérêt personnel dans l'exercice, par un tiers, d'une activité professionnelle ou commerciale, et que, enfin, l'engagement de caution de M. X... était destiné à permettre l'activité de la société dont il était actionnaire et administrateur et, par conséquent, son activité professionnelle, alors que, selon le moyen, en premier lieu, les dettes à prendre en considération ne sont pas limitées aux crédits à la consommation ou aux dettes domestiques à l'exclusion des dettes faites dans la recherche d'un profit ; alors que, en second lieu, si l'article 1er, alinéa 1er, de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989 exclut les dettes professionnelles, celles-ci ne peuvent s'entendre que des dettes contractées par la personne qui se prétend surendettée, elle-même, pour les besoins de sa profession ; alors que, en dernier lieu, le fait que la caution soit actionnaire et administrateur de la société cautionnée, ce qui ne constitue pas une profession, ne peut changer la nature de la dette non commerciale de la caution ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé le texte précité ;

Mais attendu que la cour d'appel a souverainement retenu que M. X... était attaché commercial salarié de la société dont il s'est porté caution ; qu'elle a relevé que cet engagement était destiné à permettre l'activité de cette société à laquelle il était personnellement intéressé en sa qualité d'administrateur et d'actionnaire ; qu'elle a pu déduire de ces motifs qui établissent que l'engagement avait été souscrit pour les besoins ou à l'occasion de l'activité professionnelle de M. X..., la nature professionnelle de cette dette ; qu'ainsi, abstraction faite des autres motifs justement critiqués par le moyen, mais surabondants, l'arrêt se trouve justifié de ce chef ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 1er, alinéa 1er, et 10 de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989, ensemble l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que le premier de ces textes institue une procédure collective de redressement judiciaire civil des difficultés financières du débiteur qui se trouve dans une situation de surendettement caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ;

Attendu que pour refuser à M. X... le bénéfice de cette procédure l'arrêt attaqué relève, par motifs adoptés du premier juge, que la comparaison des ressources du demandeur et de son épouse et de leurs dettes caractérise l'impossibilité manifeste dans laquelle ils se trouvent actuellement de faire face à leurs engagements, mais que " le caractère transitoire de la situation de chômage de M. X..., susceptible ... de retrouver un emploi et un niveau de ressources compatible avec le montant de ses engagements, les possibilités qui lui sont offertes par les lois du 10 janvier 1978 et 13 juillet 1979 qui lui permettent de solliciter devant le juge des référés la suspension ou le rééchelonnement de ses emprunts pour une durée de 2 ans, doivent conduire à estimer sans objet en l'espèce, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui ne pouvait se fonder sur les motifs hypothétiques qu'elle a énoncé pour écarter les conséquences légales attachées à la situation de surendettement de M. X... qu'elle a caractérisée, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 91-04032
Date de la décision : 31/03/1992
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Surendettement - Loi du 31 décembre 1989 - Règlement amiable et redressement judiciaire civil - Conditions - Dettes non professionnelles - Déduction de la nature de l'obligation principale garantie (non).

1° PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Surendettement - Loi du 31 décembre 1989 - Règlement amiable et redressement judiciaire civil - Conditions - Dettes non professionnelles - Demandeur caution de la société dont il était président-directeur général (non) 1° PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Surendettement - Loi du 31 décembre 1989 - Règlement amiable et redressement judiciaire civil - Conditions - Dettes non professionnelles - Demandeur caution de la société dont il était à la fois salarié - administrateur et actionnaire (non) 1° CAUTIONNEMENT - Société anonyme - Président du conseil d'administration - Cautionnement donné par le président du conseil d'administration à la société - Caution bénéficiaire de la loi sur le surendettement (non) 1° CAUTIONNEMENT - Société anonyme - Administrateur - Cautionnement donné par un administrateur à la société - Caution salariée de celle-ci - Caution bénéficiaire de la loi sur le surendettement (non).

1° Au sens de l'article 1er, alinéa 1, de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989, les dettes professionnelles sont celles nées pour les besoins ou à l'occasion de l'activité professionnelle du débiteur. Il s'ensuit que : a) le caractère professionnel de la dette de la caution ne peut se déduire de la nature de l'obligation principale garantie (arrêt n° 1) ;. b) c'est à bon droit qu'un tribunal, qui retient que le débiteur s'est porté caution de la société dont il était le président-directeur général, ce qui fait apparaître que la dette née de cet engagement a été contractée pour les besoins ou à l'occasion de son activité professionnelle, juge que cette dette est professionnelle au sens du texte précité (arrêt n° 2) ;. Une cour d'appel a pu déduire la nature professionnelle de la dette au sens du texte précité, de ce qu'elle a retenu que le débiteur était salarié de la société dont il s'est porté caution et que cet engagement était destiné à permettre l'activité de cette société à laquelle il était personnellement intéressé en sa qualité d'administrateur et d'actionnaire, motifs qui établissent que l'engagement avait été souscrit pour les besoins ou à l'occasion de son activité professionnelle (arrêt n° 3).

2° CASSATION - Moyen - Motifs de la décision attaquée - Défaut de motifs - Motifs hypothétiques - Protection des consommateurs - Surendettement - Loi du 31 décembre 1989 - Redressement judiciaire civil - Conditions - Impossibilité manifeste de faire face à ses dettes.

2° Viole les articles 1, alinéa 1, et 10 de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989, la cour d'appel qui se fonde sur des motifs hypothétiques qui ne l'autorisent pas à écarter les conséquences légales de la situation de surendettement qu'elle a caractérisée, en énonçant que " le caractère transitoire de la situation de chômage du débiteur, susceptible de retrouver un emploi et un niveau de ressources compatible avec le montant de ses engagements, les possibilités qui lui sont offertes par les lois du 10 janvier 1978 et 13 juillet 1979 qui lui permettent de solliciter devant le juge des référés la suspension ou le rééchelonnement de ses emprunts pour une durée de 2 ans, doivent conduire à estimer sans objet en l'espèce, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil " (arrêt n° 3).


Références :

Loi 78-22 du 10 janvier 1978
Loi 79--596 du 13 juillet 1979
Loi 89-1010 du 31 décembre 1989 art. 1, al. 1
Loi 89-1010 du 31 décembre 1989 art. 10

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 22 janvier 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 31 mar. 1992, pourvoi n°91-04032, Bull. civ. 1992 I N° 107 p. 71
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 I N° 107 p. 71

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Massip, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Savatier
Avocat(s) : Avocats :la SCP Célice et Blancpain, M. Brouchot (arrêt n° 3).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:91.04032
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