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Sur les deux premières branches du moyen :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt déféré que, par acte du 24 septembre 1977, le Crédit du Nord a ouvert un compte courant à la société Les Magasins Prism ; que l'article 4 de ce contrat prévoyait que " les remises effectuées par le Crédit du Nord produiront des intérêts au taux de base bancaire (actuellement 9 francs 30 centimes par 100 francs l'an) majoré de 5 francs 50 centimes pour 100 francs l'an... ", l'article 6 du même contrat, relatif aux intérêts dus à partir de la clôture du compte, précisant que " le solde produira intérêt à 5 francs 50 centimes pour 100 francs l'an au-dessus du taux fixé ci-dessus... " ; que le compte courant, dont le solde était débiteur, a été clôturé par suite de la mise en liquidation des biens, le 30 janvier 1979, de la société Les Magasins Prism ; que le Crédit du Nord a mis en demeure Mme X... de respecter ses engagements de caution en réglant la somme en principal de 600 000 francs, outre les intérêts conventionnels prévus à l'acte du 24 septembre 1977 ; que, Mme X... étant décédée, le Crédit du Nord a assigné en paiement ses huit héritiers, le syndic du règlement judiciaire de l'un d'eux, et l'administrateur judiciaire de la succession, concluant en dernier lieu à la fixation de la créance et non à son paiement ;
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif d'avoir annulé le taux conventionnel d'intérêt prévu par les articles 4 et 6 de l'acte notarié du 24 septembre 1977 portant convention de compte courant entre le Crédit du Nord et la société Les Magasins Prism et cautionnement hypothécaire de Mme X..., déclaré ce taux inopposable aux héritiers X... et de lui avoir substitué le taux d'intérêt légal, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en prononçant l'annulation de la clause du contrat fixant le taux des intérêts au taux de base bancaire au motif que la détermination de celui-ci dépendait de la volonté discrétionnaire de la banque, sans rechercher si le taux de base bancaire n'était pas un élément du marché financier et si, par suite, le taux d'intérêt n'était pas déterminable par référence à des éléments du marché financier extérieurs à la volonté de la banque, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1129 du Code civil ; alors, d'autre part, que dès lors qu'il s'agit d'intérêts échus avant l'entrée en vigueur du décret du 4 septembre 1985, la réception par le titulaire d'un compte courant sans protestation ni réserve des relevés périodiques que lui adresse la banque suffit à établir son acceptation tacite des taux d'intérêts prélevés par celle-ci, si bien que le titulaire du compte et, par suite, la caution ne peuvent plus se prévaloir d'une quelconque nullité de la stipulation du taux ; qu'en ne recherchant pas, ainsi que l'y invitait le Crédit du Nord, si le débiteur n'avait pas tacitement accepté l'application du taux de base bancaire et les variations de celui-ci en ne protestant pas après réception des relevés de compte faisant application de ce taux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 et 1907 du Code civil et a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que le Crédit du Nord, qui admettait lui-même, comme le relève l'arrêt, que " le taux de base bancaire ", " propre à chaque établissement " était " en France, fixé unilatéralement par chaque banque ", ne soutenait pas qu'il avait été convenu entre les parties que le taux d'intérêt prévu à l'acte du 24 septembre 1977 pouvait varier en fonction d'éléments précisément définis et objectifs, rendant cette variation indépendante de sa seule volonté ; que, dès lors, l'arrêt se trouve légalement justifié en ce qu'il a retenu que l'indétermination de la clause concernant la variabilité du taux d'intérêt était contraire aux dispositions de l'article 1129 du Code civil et la rendait nulle ;
Attendu, d'autre part, que la clause litigieuse, nulle en raison de l'indétermination de son objet, n'étant susceptible ni de confirmation ni de ratification, il était sans intérêt pour la solution du litige que la cour d'appel procède à la recherche alléguée dans la seconde branche du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux premières branches ;
Mais sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que, pour décider que le taux légal devait être substitué au taux d'intérêt conventionnel, la cour d'appel a retenu que la clause concernant ce dernier taux était nulle en raison de son caractère indéterminé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le taux d'intérêt conventionnel était déterminé au moment de la formation du contrat par l'indication du taux de base bancaire en vigueur à ce moment, majoré de 5,5 % l'an, ce dont il résultait que seule la clause de variation qui l'affectait devait être annulée et que le taux à substituer était celui de 9,3 % majoré, la cour d'appel a méconnu la loi du contrat ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a annulé la stipulation initiale du taux des intérêts et en ce qu'il a substitué l'intérêt légal à ce taux, l'arrêt rendu le 21 février 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles