REJET du pourvoi formé par :
- X... Josette, épouse Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 3 octobre 1991, qui, pour usage de faux en écriture privée, l'a condamnée à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 151 du Code pénal, 8 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Josette Y... coupable du délit d'usage de faux et l'a en conséquence condamnée à une peine d'emprisonnement avec sursis de 1 an et au paiement de 10 000 francs d'amende, outre des indemnités à la partie civile ;
" aux motifs qu'il résulte de trois expertises judiciaires que le testament olographe déposé par Y... chez le notaire le 22 octobre 1980 est un faux grossier et qu'il a été rédigé par Y... ; que force est de constater la convergence non ambiguë des trois rapports d'expertise ; que les deux rapports établis à la demande de Josette Y... par des spécialistes non experts ne sont pas exempts d'ambiguïté ; que ce sont là les moyens de défense acceptables soulevés par la prévenue qui conclut à un doute devant lui bénéficier ; que la version qu'elle a donnée de la découverte du testament est peu crédible ; qu'en effet le dossier n'établit pas l'altération des facultés mentales de Mme Z... qui l'aurait empêchée de contacter directement un notaire ou de lui adresser son testament olographe ; que le délai de près de 3 mois entre le décès et le dépôt du testament paraît plus vraisemblablement avoir été mis à profit par Josette Y... pour confectionner ce document ; qu'elle avait seule intérêt à agir ainsi pour se rendre légataire universelle d'une succession à la consistance non négligeable (arrêt attaqué, pp. 4 et 5) ; que les éléments ci-dessus rapportés et ceux non contraires des premiers juges constituent un ensemble d'indices précis et concordants constitutifs de la preuve de la culpabilité ; que les faits correspondent plus exactement à la qualification de faux et usage et non à la qualification de tentative d'escroquerie ; que les délits de faux et usage commis avant le 6 juillet 1984 sont prescrits ; qu'en revanche la prescription n'est pas acquise pour les faits d'usage commis postérieurement ; que le faux a été invoqué par la prévenue dans des conclusions datées du 5 juin 1985 à l'occasion de l'instance civile engagée par les consorts Z... ; qu'il a été remis à un expert amiable pour l'accomplissement d'une mission clôturée le 11 septembre 1986 ; qu'elle s'en est encore servie à l'appui d'une demande de contre-expertise formulée le 28 avril 1987 (arrêt attaqué, p. 6) ;
" 1°) alors que le délit d'usage de faux se produit chaque fois qu'intervient un fait d'utilisation de la pièce fausse en vue du but auquel elle est destinée ; qu'il résulte des propres termes de l'arrêt attaqué que Josette Y... a déposé le testament chez le notaire le 22 octobre 1980 et qu'elle a présenté une requête en vue de l'envoi en possession ordonné par décision du président du tribunal de grande instance le 5 novembre 1980 ; qu'une fois entrée en possession Josette Y... ne pouvait plus faire usage de la pièce arguée de faux en vue du but auquel elle était destinée, celui-ci étant atteint ; que la production ultérieure du document en justice répondait à l'obligation légale de communication de pièces imposée par l'action en justice engagée par les consorts Z... ; que la demande d'expertise répondait aux nécessités du débat judiciaire imposé par Josette Y... ; qu'en retenant néanmoins ces deux derniers faits non atteints par la prescription pour caractériser le délit reproché, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que le délit d'usage de faux n'est constitué que si l'usage reproché a causé un préjudice, lequel doit être distinct de celui causé par le faux lui-même ou d'autres faits d'usage lorsque ces infractions sont prescrites ; que l'arrêt attaqué a constaté que le délit de faux et les délits d'usage de faux constitués par la remise du testament au notaire et la requête d'envoi en possession étaient atteints par la prescription ; qu'en s'abstenant dès lors de caractériser le préjudice résultant de la production du testament en justice et de la demande de contre-expertise dans le cadre de l'action en nullité engagée par les consorts Z..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qu'à la suite du décès de Marie-Louise Z..., survenu le 6 août 1980, Josette X... a produit un testament olographe attribué à la défunte, l'instituant légataire universelle, et a obtenu l'envoi en possession des biens successoraux le 5 novembre 1980 ; qu'en octobre 1984 elle a été assignée en nullité du testament par l'un des successibles qui arguait de faux cet acte ; que les experts désignés par la juridiction civile ayant conclu à la falsification du document, une information a été ouverte des chefs de faux, d'usage de faux en écriture privée et d'escroquerie, à l'issue de laquelle Josette X... a été renvoyée devant la juridiction correctionnelle sous la prévention de tentative d'escroquerie ;
Attendu que la cour d'appel, après avoir exposé les éléments de conviction dont elle déduisait que le testament reconnu apocryphe était l'oeuvre de Josette X... et énoncé que les agissements de cette dernière constituaient non pas une tentative d'escroquerie mais les délits de faux et usage de faux, relève que le faux commis en 1980 est prescrit, de même que l'usage qui a été fait du document incriminé, par divers actes successifs antérieurs au 6 juillet 1984, soit plus de 3 ans avant le premier acte interruptif de prescription en date du 6 juillet 1987 ;
Que les juges retiennent au contraire comme non prescrits, pour en déclarer la prévenue coupable, les actes d'usage ayant consisté, pour cette dernière, d'abord à se prévaloir du testament argué de faux dans ses conclusions devant la juridiction civile, en date du 5 juin 1985, ensuite à soumettre le document à une expertise amiable en septembre 1986 et enfin à solliciter le 28 avril 1987 une contre-expertise de cette écriture ;
Attendu qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.