La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/1993 | FRANCE | N°92-83576

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 juin 1993, 92-83576


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... André,
- la SARL Steel Trading France,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 21 janvier 1992, qui, pour délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées, a condamné le prévenu à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi que solidairement avec la société précitée à diverses pénalités douanières.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 351 du Cod

e des douanes, de l'article 8 du Code de procédure pénale, des articles 485, 593 du Cod...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... André,
- la SARL Steel Trading France,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 21 janvier 1992, qui, pour délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées, a condamné le prévenu à la peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi que solidairement avec la société précitée à diverses pénalités douanières.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 351 du Code des douanes, de l'article 8 du Code de procédure pénale, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que le demandeur ayant soulevé la prescription de l'action fiscale et de l'action pénale, la décision attaquée a rejeté le moyen ;
" au motif que le dernier procès-verbal de l'enquête douanière est daté du 1er décembre 1987 ; que, le 8 novembre 1990, le chef de l'agence de poursuites et de recouvrements engageait l'action fiscale sur le fondement de l'article 343 du Code des douanes ; que l'action n'est donc pas prescrite ;
" alors que, toute décision doit être motivée, que l'insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs ; que si un procès-verbal de douane peut constituer un acte d'instruction interruptif, en conséquence, de prescription, il ne peut, lorsqu'une série de faits sont compris dans une même poursuite, interrompre la prescription qu'en ce qui concerne les faits qu'il concerne ; qu'en l'espèce actuelle, la décision attaquée qui n'indique pas sur quoi portait le procès-verbal d'enquête, cependant qu'une série de faits de fausse indication d'origine, étaient reprochés au demandeur, et non pas une seule infraction commise à l'occasion d'une importation ne met pas la Cour de Cassation à même de contrôler que la prescription a réellement été interrompue pour l'ensemble des infractions reprochées au demandeur " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que, pour écarter l'exception de prescription dont se prévalait le prévenu André X... poursuivi du chef de fausses déclarations d'origine, délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées, les juges du fond retiennent que le procès-verbal de notification de l'infraction et d'audition de l'intéressé daté du 30 novembre 1987 a été suivi du dernier procès-verbal d'enquête douanière en date du 1er décembre 1987, en sorte que l'action engagée le 20 novembre 1990 par l'Administration sur le fondement de l'article 343 du Code des douanes n'était pas prescrite ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance, la cour d'appel, loin de méconnaître les dispositions de l'article 351 du Code précité, en a fait au contraire l'exacte application ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 30 du traité de Rome, de l'article 2 du Code civil, de l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques signé à New York le 19 décembre 1966 et publié en France par décret n° 81-76 du 29 janvier 1981, de l'article 55 de la Constitution, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d'importations sans déclaration de marchandises prohibées ;
" aux motifs que, l'activité d'X... dans le cadre de la société Steel Trading France était une activité de courtage en produits ferreux ; qu'il mettait en relation, fournisseurs étrangers et clients français ; que les produits, objet des transactions, étaient apportés d'Europe de l'Est, la société Steel Trading France étant distributrice pour la France de la société autrichienne Wait et de la société yougoslave Sour Industria, que des contrôles opérés par le service des Douanes sur les marchandises elles-mêmes et dans les sociétés ayant contracté avec Wait et Sour Industria par l'intermédiaire de la société Steel Trading France ont établi que les marchandises litigieuses ont été fabriquées en Allemagne de l'Est, achetées par la société autrichienne Wait qui les a stockées dans des entrepôts sous douane en Allemagne de l'Ouest, les a revendues à la société Jenco qui elle-même les a revendues à la société Sour Industria ; que lors de la facturation des marchandises aux clients français, les produits sont déclarés comme d'origine yougoslave et sont importés en France après avoir transité par la Belgique ; qu'à l'époque des faits, les importations des marchandises venant d'Allemagne de l'Est étaient limitées et soumises à divers droits et taxes ;
" alors que, tout prévenu à le droit de bénéficier d'une loi plus douce ; que le principe de la rétroactivité in mitius est un principe d'ordre constitutionnel qui s'applique à tous les textes ; que, du fait de la réunification allemande, les règles du traité de Rome relatives à la libre circulation des marchandises sont devenues applicables à l'Allemagne de l'Est ; que le protocole relatif au commerce intérieur allemand, et aux problèmes connexes n'est plus d'application, puisque tous les territoires allemands se trouvent désormais régis par la loi fondamentale ; que la décision attaquée énonce du reste " qu'à l'époque des faits, les importations de marchandises venant d'Allemagne de l'Est étaient limitées et soumises à divers droits et taxes " ; qu'il résulte de cette constatation que les marchandises litigieuses ne sont plus aujourd'hui soumises à des droits et taxes, de telle sorte que les demandeurs doivent bénéficier de la loi plus douce, et de l'entrée en vigueur pour les territoires de l'Allemagne de l'Est des textes relatifs à la libre circulation des marchandises " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 38 du Code des douanes ;
Attendu que selon l'article 38 du Code des douanes, sont considérées comme prohibées toutes marchandises dont l'importation ou l'exportation est interdite à quelque titre que ce soit ou soumise à des restrictions ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des procès-verbaux de douane, base de la poursuite, qu'André X... et la SARL Steel Trading France, cette dernière prise comme solidairement responsable, sont poursuivis, sur la seule citation directe de l'administration des Douanes du 20 novembre 1990, pour avoir, à l'occasion de l'importation de marchandises faussement déclarées comme originaires de Yougoslavie, alors que leur origine réelle était la République démocratique allemande, commis de fausses déclarations d'origine éludant des mesures de restriction (licence AC et contingentement) et le paiement des droits et taxes dus, délit réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées ;
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de ce délit, la cour d'appel, après avoir décrit le processus de fraude à la réalisation de laquelle André X... a participé, relève que les importations litigieuses desdites marchandises, originaires de RDA, faisaient l'objet, à l'époque des faits, de mesures de restriction et étaient assujetties à divers droits et taxes ;
Mais attendu qu'à la date de l'engagement des poursuites douanières, du fait de l'adhésion de la RDA à la RFA par le Traité du 31 août 1990, effective depuis le 3 octobre 1990, les dispositions communautaires relatives notamment à la libre circulation des marchandises sur le territoire douanier de la Communauté économique européenne et celles relatives à l'interdiction de toutes mesures restrictives ou d'effet équivalent étaient devenues applicables sur le territoire des provinces de l'Allemagne de l'Est ;
Qu'en prononçant ainsi qu'elle l'a fait, sans rechercher même d'office si, par l'effet de ces dispositions communautaires plus favorables, applicables immédiatement, aux poursuites en cours, l'élément légal de la prévention au regard du caractère prohibé de la marchandise ne s'en trouvait pas modifié et, le cas échéant, si les faits n'étaient pas susceptibles de recevoir une qualification différente, notamment celle visée à l'article 410, paragraphe 2 a, du Code des douanes, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rennes, en date du 21 janvier 1992, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 92-83576
Date de la décision : 02/06/1993
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

DOUANES - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration sur l'origine - Marchandises originaires de la République démocratique allemande - Traité d'adhésion de la République démocratique allemande à la République fédérale allemande du 31 août 1990 - Dispositions communautaires plus favorables applicables - Poursuites en cours - Portée.

COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE - Douanes - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration sur l'origine - Marchandises originaires de la République démocratique allemande - Traité d'adhésion de la République démocratique allemande à la République fédérale allemande du 31 août 1990 - Dispositions communautaires plus favorables applicables - Poursuites en cours - Portée

Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l'article 38 du Code des douanes, la cour d'appel qui, pour retenir la culpabilité d'un prévenu du chef du délit douanier réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées, se borne à relever que les importations desdites marchandises, originaires de la République démocratique allemande, faisaient l'objet, à l'époque des faits, de mesures de restriction, sans rechercher, même d'office, si, du fait de l'adhésion de la RDA à la RFA, effective à la date de l'engagement des poursuites, l'aplication aux territoires des provinces de l'Allemagne de l'Est des dispositions communautaires relatives à la libre circulation des marchandises sur le territoire douanier de la Communauté économique européenne et celles relatives à l'interdiction de toutes mesures restrictives ou d'effet équivalent, n'avait pas modifié dans un sens plus favorable l'élément légal de la prévention. (1).


Références :

Code des douanes 38, 410 al. 2
Traité d'adhésion de la RDA à la RFA du 31 août 1990
Traité de Rome du 25 mars 1957 art. 30

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre correctionnelle), 21 janvier 1993

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1993-03-08, Bulletin criminel 1993, n° 102, p. 243 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 jui. 1993, pourvoi n°92-83576, Bull. crim. criminel 1993 N° 198 p. 495
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1993 N° 198 p. 495

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Tacchella, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Perfetti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Bayet.
Avocat(s) : Avocats : M. Ryziger, la SCP Boré et Xavier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:92.83576
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award