CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Philippe,
- la compagnie d'assurances Union Générale du Nord, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre correctionnelle, du 10 novembre 1992, qui, dans la procédure suivie contre le premier pour homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 2, 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, L. 397 du Code de la sécurité sociale, violation de la loi, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt a évalué à 500 341, 78 francs l'incapacité temporaire soumise à recours ainsi qu'à la subrogation de la MAIF et fixé à 20 000 francs le solde revenant à la MAIF et 2 187, 30 francs le solde revenant à la succession, et, sur le préjudice économique complémentaire a retenu les sommes de 339 407, 52 francs revenant à Mme Y..., 134 733, 27 francs revenant à Loïc, 163 281, 27 francs revenant à Soizic, 175 701, 27 francs revenant à Nolwenn ; enfin, a condamné Philippe X... à payer à l'agent judiciaire du Trésor la somme de 1 631 253, 15 francs ;
" aux motifs expressément confirmés des premiers juges " au vu des pièces versées aux débats et des circonstances de la cause il convient de fixer les indemnités du préjudice subi par Gérard Y... pendant l'incapacité temporaire :
Frais thérapeutiques 334 349, 00 francs ; Salaires 143 805, 48 francs ; Perte d'indemnités 4 547, 30 francs ; Perte d'activité annexe 17 640, 00 francs ; TOTAL 500 341, 78 francs ; A déduire :
Créance du Trésor 478 154, 48 francs ; Solde 22 187, 30 francs ; A déduire :
Subrogation de la Maif 20 000, 00 francs ; Solde revenant à la succession 2 187, 30 francs
(jugement p. 7, § 4 et arrêt p. 5, § 3) et aux motifs
" sur le préjudice financier :
" la Cour estime devoir fixer ainsi qu'il suit le préjudice financier compte tenu de l'âge de la victime et de ses ayants droit, de la reconstitution de carrière de Gérard Y... et de ses perspectives d'avenir notamment par la pratique de l'enseignement des arts martiaux ;
" préjudice financier de Mme Y... : 1 325 340, 00 francs ;
" soit après déduction de la créance de l'Etat :
985 932, 48 francs, une indemnité complémentaire de 339 407, 52 francs ;
" préjudice financier des enfants :
" calculé sur une limite d'âge de 25 ans compte tenu du milieu socio-culturel de la famille, déduction faite pour chacun des trois enfants du capital décès s'élevant à 34 376, 73 francs par enfant ;
" leur préjudice financier est évalué comme suit :
Loïc 134 733, 27 francs Soizic 163 281, 27 francs Nolwenn 175 701, 27 francs
(arrêt p. 5 et 6) ;
" 1° alors que seule la perte de salaires nets de la victime doit être prise en considération pour le calcul de l'indemnité mise à la charge du tiers et soumis à recours ; qu'en l'espèce, il appartenait à la cour d'appel de retenir le seul salaire net de Gérard Y... et de déduire les charges salariales du salaire brut, pour fixer tant la créance de l'Etat que les pertes de salaires pendant l'incapacité totale temporaire, que le préjudice économique complémentaire, revenant aux ayants droit ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2° alors que dans ses écritures, l'Union générale du Nord faisait valoir que c'est à tort que le Tribunal avait évalué la perte de salaires pendant l'incapacité totale temporaire à 143 805, 48 francs et qu'il convenait de ne retenir que les pertes de salaires nets après déduction des cotisations salariales à la charge de la victime, soit la somme de 123 076, 40 francs ; que la cour d'appel ne pouvait omettre de répondre à ce moyen pertinent en se bornant à confirmer les motifs des premiers juges, sans entacher son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que la réparation due par l'auteur d'un fait dommageable doit être égale à la totalité du préjudice subi, mais ne saurait le dépasser ;
Attendu que, statuant sur l'indemnisation des conséquences dommageables d'un accident ayant causé des blessures puis la mort de Gérard Y... et dont Philippe X... a été déclaré entièrement responsable, la cour d'appel a souverainement apprécié la réparation du préjudice économique des ayants droit de la victime sans avoir égard aux charges salariales précomptées sur les salaires de celle-ci ; qu'elle n'encourt pas, dès lors, le grief du moyen de ce chef de préjudice ;
Mais attendu qu'elle a évalué l'indemnité réparant l'incapacité temporaire de travail de Gérard Y... en prenant pour base le montant de son salaire brut ; qu'en se déterminant de la sorte, alors que seul le salaire net de la victime, correspondant aux sommes qu'elle percevait effectivement, devait être pris en compte pour le calcul du préjudice subi, ainsi que le prévenu l'avait fait valoir dans ses conclusions, la cour d'appel a violé le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Douai, en date du 10 novembre 1992, mais en ses seules dispositions relatives à la fixation de préjudice subi par Gérard Y... avant son décès et aux créances qui en découlent pour Mme Y..., la MAIF et l'agent judiciaire du Trésor, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai autrement composée.