REJET du pourvoi formé par :
- X... Philippe,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, du 24 février 1993 qui l'a condamné, pour contrefaçon de marque, à la peine de 20 000 francs d'amende, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 422 du Code pénal, 1382 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la Cour a déclaré X... coupable de contrefaçon de marque, l'a condamné à la peine de 20 000 francs d'amende et à payer à la société Jeutel, partie civile, 150 000 francs à titre de dommages-intérêts outre 3 000 francs supplémentaires au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
" aux motifs que le prévenu ne peut prétendre que le terme Jeutel n'est pas une marque, que son utilisation comme code d'accès à un service téléphonique ne lui fait pas perdre son caractère de marque, que la société Jeutel et la société Editions P. X... mettent l'une et l'autre à la disposition du public des jeux vidéo, similaires non seulement par leur nature mais également par la clientèle à laquelle elles s'adressent, la première au moyen de meubles exploités dans des lieux ouverts au public, la deuxième par l'intermédiaire du minitel, " que si le mode d'accès est différent, l'utilisation de la même marque conduit nécessairement la clientèle à leur attribuer la même origine ", que la confusion est aisée, que le produit étant identique, peu importe si " la partie civile peut avoir accès aux kiosques télématiques grand public visés par le dépôt en classe 38 de la marque Jeutel par le prévenu, classe 38 à laquelle référence n'a pas été faite lors du dépôt de sa marque par la société Jeutel " ; qu'en conséquence " l'utilisation par le prévenu de la marque Jeutel préalablement déposée par la société Jeutel, en violation des droits conférés à cette dernière par son enregistrement, constitue le délit de contrefaçon " ;
" alors que, d'une part, l'usage d'un terme au sein d'un code d'accès à un kiosque télématique ne peut constituer une atteinte à un droit résultant d'une marque dès l'instant où un code d'accès n'est qu'un moyen technique d'exploitation d'une activité commerciale et non une marque protégée par son dépôt et par la règle d'antériorité ;
" alors que, d'autre part, il n'existait aucune similarité possible ni possibilité de confusion pour le public entre le service minitel interactif 3615 Jeutel, service mettant en oeuvre pour le grand public de particuliers des jeux ou concours avec possibilité de gagner des lots, d'un coût tout à fait réduit, et la fabrication comme la vente de meubles de jeux, billards ou jeux vidéo électroniques d'un coût pouvant être élevé à des entreprises exploitant des lieux ouverts au public, et qu'en l'absence de produits similaires, notion dérogatoire ou principe de spécialité, ne se trouvaient pas réunis les éléments constitutifs du délit de contrefaçon ;
" alors qu'enfin, la société Jeutel n'ayant pas déposé sa marque en classe 38 pour les services de communication, ni a fortiori pour les services télématiques et le kiosque minitel mais seulement pour des jeux et jouets relevant des classes de produits 9 et 28, elle ne pouvait prétendre à aucune protection, du fait de la mise en oeuvre par la société Editions P. X... d'un code d'accès 3615 Jeutel à l'activité minitel permettant un service télématique interactif de jeux et concours en classe 38 " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Editions P. X... a utilisé la marque Jeutel qu'elle avait déposée le 25 février 1987 comme clé d'accès à un service de jeux par minitel ; que son président a été cité pour contrefaçon par la société Jeutel qui avait déposé la même marque le 17 mars 1984 et qui fabrique et vend des jeux électroniques ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de cette infraction, les juges, après avoir constaté l'antériorité du dépôt effectué par la partie civile et relevé que l'utilisation d'une marque comme clé d'accès à un service télématique ne lui faisait pas perdre son caractère, retiennent qu'une confusion est possible entre jeux similaires, même si la manière dont ils sont proposés aux clients des deux sociétés est différente, et qu'il n'importe que la société Jeutel n'ait pas déposé sa marque en classe 38, relative à l'accès " aux kiosques télématiques grand public ", les deux marques étant déposées en classe 28, propre aux jeux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a apprécié souverainement la possibilité d'une confusion entre deux produits similaires et dès lors que la classification administrative est sans effet sur cette appréciation, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que le moyen, dès lors, ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.