Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué que M. X..., titulaire de la marque Mas d'Auge déposée le 24 juillet 1962, enregistrée en renouvellement sous le numéro 1 320 968, pour désigner les oeufs, laitages et produits laitiers et de la marque Mas déposée le 20 mars 1984, enregistrée sous le numéro 1 265 901, pour désigner les mêmes produits, a demandé le 6 novembre 1986 à l'Institut national de la propriété industrielle l'inscription au registre national des marques d'un contrat de location gérance comportant licence de la marque Mas d'Auge à la société Station avicole de conditionnement et de distribution des oeufs de Condorcet (société Sacdoc) et le 3 juin 1988, l'inscription d'un contrat de cession des marques Mas et Mas d'Auge portant la date du 7 mars 1988 à la société Sacdoc ; que le 11 mai 1988, il avait fait procéder à la saisie-contrefaçon d'emballages, de conditionnement et de signes portant la dénomination Mas de Saint-Georges utilisée par les époux Y... de la Renaudière qu'il a assignés pour contrefaçon et concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 14 de la loi du 31 décembre 1964 ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, toute modification aux droits portant sur une marque ne sera opposable aux tiers que par mention au registre national des marques ;
Attendu que, pour prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé à la requête de M. X..., l'arrêt retient que M. X... avait perdu toute qualité pour agir en contrefaçon après l'acte de cession de la marque dont il était titulaire, " les parties à l'acte de cession n'ayant pas prévu de suspendre l'effet translatif de propriété jusqu'à la publication de celui-ci " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la publication de l'acte de cession n'avait eu lieu que postérieurement à la saisie-contrefaçon, ce dont il résultait qu'à l'égard des tiers M. X..., demeuré titulaire des marques litigieuses, était seul habilité à agir pour la protection de ce droit de propriété industrielle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la première branche du deuxième moyen :
Vu l'article 3 de la loi du 31 décembre 1964 ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que ne peuvent être considérées comme marques celles qui sont constituées exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit ou du service ou qui sont composées exclusivement de termes indiquant la qualité essentielle du produit ou du service ou de la composition du produit ;
Attendu que, pour prononcer l'annulation de la marque Mas, l'arrêt retient que le mot Mas désigne une habitation en milieu rural, une maison de campagne ou une ferme et évoque fortement une activité d'élevage et ne pouvait pas être, hors toute combinaison susceptible de donner à une expression un caractère distinctif, approprié au titre de la marque pour désigner des productions fermières ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, alors qu'elle avait relevé que les produits protégés désignés par le dépôt étaient les oeufs, les laitages et les produits laitiers, la cour d'appel n'a pas caractérisé le caractère générique, nécessaire ou descriptif de la marque appliquée à ceux-ci et n'a donc pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen :
Vu les articles 624 et 625 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt a rejeté la demande fondée sur la contrefaçon de la marque Mas et la concurrence déloyale au regard de cette marque ;
Mais attendu que la cassation à intervenir sur la première branche du deuxième moyen qui ne concerne que la marque Mas entraîne, par voie de conséquence, la cassation sur le troisième moyen, en ce qui concerne cette marque ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a annulé le dépôt enregistré le 20 mars 1984 sous le numéro 1 265 901 de la marque Mas, en ce qu'il a déclaré nul le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 11 mai 1988 au Mas Saint-Georges par la société civile professionnelle d'huissiers Berton et Petit et en ce qu'il a rejeté la demande fondée sur la contrefaçon de la marque Mas et la concurrence déloyale au regard de cette marque, l'arrêt rendu entre les parties le 10 janvier 1992 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.