La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/1994 | FRANCE | N°92-17310

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 juin 1994, 92-17310


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 mars 1992), que M. X..., aux droits de qui se trouve Mme X..., a, en novembre 1974, remis plusieurs véhicules de collection, introduits en France sous le régime douanier de l'admission temporaire, à M. Fritz Y... pour qu'il les expose dans le musée créé par lui ; que, par jugement publié au bulletin des annonces civiles et commerciales le 3 mai 1977, M. Fritz Y... et son frère Hans (les consorts Y...) ont été mis en liquidation des biens ; que, le 14 avril 1978, l'ensemble de la collection rassemblée par les consorts Y..., comprenant les

véhicules confiés par M. X..., a fait l'objet d'un décret de...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 mars 1992), que M. X..., aux droits de qui se trouve Mme X..., a, en novembre 1974, remis plusieurs véhicules de collection, introduits en France sous le régime douanier de l'admission temporaire, à M. Fritz Y... pour qu'il les expose dans le musée créé par lui ; que, par jugement publié au bulletin des annonces civiles et commerciales le 3 mai 1977, M. Fritz Y... et son frère Hans (les consorts Y...) ont été mis en liquidation des biens ; que, le 14 avril 1978, l'ensemble de la collection rassemblée par les consorts Y..., comprenant les véhicules confiés par M. X..., a fait l'objet d'un décret de classement pris au titre de l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ; que par arrêt du 27 mars 1981, le Conseil d'Etat a partiellement annulé ce décret en ce qui concerne les véhicules remis par M. X... ; qu'autorisés par le Tribunal, les syndics de la liquidation des biens des consorts Y... ont, par acte du 13 novembre 1981, cédé à forfait tous les véhicules de la collection Y... à l'association du musée national de l'automobile de Mulhouse (l'association), en rappelant, dans l'acte, l'existence de la procédure de classement et de l'arrêt du Conseil d'Etat dont une copie a été annexée au traité à forfait ; que sur citation de l'administration des Douanes délivrée le 21 décembre 1982, après qu'un procès-verbal eut été établi par ses agents le 7 août 1981, les consorts Y... ont été poursuivis pénalement pour le délit douanier de fausses déclarations ou manoeuvres ayant pour but d'obtenir un avantage attaché à l'importation, l'Administration ayant soutenu que les consorts Y... étaient devenus propriétaires, notamment, des véhicules confiés par M. X... et qu'ils avaient donc obtenu, en les déclarant propriété d'un non-résident, un droit réduit à l'importation ; que par arrêt rendu le 20 mai 1985 par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Colmar, les consorts Y... ont été relaxés au motif qu'il n'est pas établi que ces derniers soient devenus propriétaires de l'un des véhicules importés temporairement sous un régime douanier suspensif de droits ; que le pourvoi formé contre cette décision par l'administration des douanes a été rejeté par la chambre criminelle de la Cour de Cassation par arrêt du 18 décembre 1986 ; que Mme X... a alors, par un acte du 16 février 1988, saisi le Tribunal d'une action en revendication des véhicules remis par son époux ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que Mme X... reproche à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable, comme tardive, sa demande dirigée contre les syndics de la liquidation des biens des consorts Y... alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en considérant qu'il n'était pas établi que les circonstances dans lesquelles étaient intervenus le décret de classement et cette décision elle-même aient été connues de Mme X... durant le cours du délai de revendication, sans rechercher quelles avaient été les conséquences de l'effet exécutoire immédiat de ce décret et de sa publicité, eu égard aux motifs qui l'inspiraient quant à la propriété des véhicules litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de la loi du 31 décembre 1913 et notamment au regard de son article 16 ; alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de rechercher si le fait que ce décret établissait que le Gouvernement tenait pour acquis que les frères Y... étaient propriétaires de l'intégralité de la collection ne constituait pas une impossibilité matérielle ou morale pour Mme X... d'agir survenue avant l'expiration du délai de revendication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard tant de l'article 59 de la loi du 13 juillet 1967 que du principe Contra non valentem... ; et alors, enfin, qu'ayant constaté que, par un arrêt en date du 18 décembre 1986, la chambre criminelle de la Cour de Cassation avait rejeté le pourvoi critiquant la relaxe de Fritz Y... prononcée par un arrêt qui avait déclaré Mme X... propriétaire des véhicules prêtés, la cour d'appel devait rechercher si cette dernière ne s'était pas trouvée dans l'impossibilité matérielle ou morale d'agir en revendication jusqu'à ce que la juridiction pénale, dont la décision s'imposait à tous, ait définitivement statué sur la propriété des véhicules litigieux ; qu'en s'en abstenant, elle a derechef privé sa décision de base légale au regard tant de l'article 59 de la loi du 13 juillet 1967 que du principe Contra non valentem... ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a énoncé à bon droit que si la règle Contra non valentem agere non currit praescriptio s'applique au délai d'un an ouvert, à partir de la publication du jugement prononçant le règlement judiciaire ou la liquidation des biens, par l'article 59 de la loi du 13 juillet 1967, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi du 12 mai 1980 et applicable en la cause, elle ne peut être invoquée que si l'action en revendication prévue par ce texte n'a pu être exercée dans le délai légal en raison d'une impossibilité absolue d'agir ;

Attendu, en second lieu, que la procédure administrative de classement de la collection Y..., dont la cour d'appel relève au surplus qu'il n'est pas établi que Mme X... en ait eu connaissance pendant le cours du délai de revendication, n'était pas de nature à faire obstacle à ce que dans ce délai Mme X... fasse reconnaître à l'égard de la masse son droit de propriété sur les biens mobiliers litigieux au moyen de l'action en revendication, sans qu'elle dût attendre l'issue de la procédure de classement qui ne pouvait avoir aucune incidence sur l'exercice de cette action dont l'objet est de faire établir le droit de propriété contesté ;

Attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel a exactement retenu que l'instance pénale introduite par la citation de l'administration des Douanes contre les consorts Y..., et au cours de laquelle la question de la propriété mobilière de ces derniers sur les véhicules pouvait être discutée, cette exception n'étant pas préjudicielle au sens de l'article 384 du Code de procédure pénale, n'était à l'origine d'aucune impossibilité d'agir dans le délai légal de revendication, dès lors que celui-ci était déjà expiré à la date des poursuites pénales dont se prévaut Mme X... ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 92-17310
Date de la décision : 28/06/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REGLEMENT JUDICIAIRE, LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Revendication - Marchandises livrées au débiteur - Action en revendication - Délai - Suspension - Impossibilité absolue d'agir - Nécessité .

VENTE - Transfert de propriété - Clause de réserve de propriété - Action en revendication - Délai - Suspension - Impossibilité absolue d'agir - Nécessité

Si la règle Contra non valentem agere non currit praescriptio s'applique au délai d'un an ouvert, à partir de la publication du jugement prononçant le règlement judiciaire ou la liquidation des biens, par l'article 59 de la loi du 13 juillet 1967, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la loi du 12 mai 1980, elle ne peut être invoquée que si l'action en revendication prévue par ce texte n'a pu être exercée dans le délai légal en raison d'une impossibilité absolue d'agir.


Références :

Loi 67-563 du 13 juillet 1967 art. 59
Loi 80-335 du 12 mai 1980

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 25 mars 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 jui. 1994, pourvoi n°92-17310, Bull. civ. 1994 IV N° 246 p. 193
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 246 p. 193

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Curti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Rémery.
Avocat(s) : Avocats : M. Cossa, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, M. Henry.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.17310
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award