CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Claudine, épouse Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 8e chambre, en date du 2 avril 1993, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef de vol, après relaxe, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris en sa première branche de la violation des articles 2, 4, 515 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble 3 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que statuant sur intérêts civils, l'arrêt attaqué a condamné Claudine Y...a payer à Z... la somme de 180 000 francs " en réparation de son préjudice " ;
" aux motifs que si des profits personnels n'ont pu être établis de façon certaine, il n'en existe pas moins un faisceau d'éléments à l'encontre de Claudine Y..., prouvant le laxisme de son comportement et les négligences graves, dont elle s'est rendue coupable dans l'exercice de ses fonctions ; que ces négligences graves ont porté préjudice à Z... qui a été obligé de mettre en vente son officine sur la base d'un chiffre d'affaire diminué ;
" alors, d'une part, que les juges d'appel, saisis de l'appel de la partie civile, en l'absence de recours du ministère public contre le jugement ayant relaxé le prévenu, ne peuvent condamner ce dernier à une réparation civile que si, réexaminant les faits de la prévention, ils constatent l'existence d'une infraction pénale ; qu'en l'espèce, la plainte de la partie civile était fondée sur des faits de vols, requalifiés en abus de confiance en cause d'appel, c'est-à-dire de détournement frauduleux de sommes d'argent ; que la cour d'appel, qui a expressément précisé que de tels faits n'étaient pas établis et qui a ainsi écarté l'existence d'une infraction pénale ne pouvait, dès lors, condamner Claudine Y... au paiement d'une réparation civile ;
" alors, d'autre part, qu'à supposer qu'une telle condamnation soit possible, en dehors de toute constatation d'une infraction pénale, sur la seule constatation d'une faute civile, il reste que les négligences constatées à l'encontre de Claudine Y... soit trois défauts d'enregistrement pour des montants de 110 francs, 70, 60 francs et 179 francs ne pouvaient être à l'origine du préjudice invoqué (la perte de 180 000 francs sur l'exercice 1986 / 87 ou la diminution de 3 % de la marge brute) ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué ne caractérise pas le lien de causalité entre les fautes de négligence imputables à Claudine Y... et le préjudice invoqué par la partie civile ;
" alors, enfin, qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la marge brute de la pharmacie était en 1986 de 34, 50 %, en 1987 de 31, 48 % et en 1988 de 36, 16 % ; qu'il résulte par ailleurs de la déclaration de Z... (D. 11 et 12) qu'il a vendu, en 1988, son officine pour raison de santé ; que c'est dès lors en contradiction avec les éléments du dossier et ses propres constatations, que la cour d'appel a affirmé que Z... aurait été obligé de vendre sa pharmacie à la suite des agissements de Claudine Y... et sur la base d'un chiffre d'affaires diminué " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, sauf exception prévue par la loi, le juge répressif ne peut accorder de réparation que pour les chefs de dommage découlant d'une infraction dont il a constaté l'existence ;
Attendu que la cour d'appel, saisie du seul appel de la partie civile contre le jugement qui avait relaxé Claudine X... du chef de vol, a condamné cette dernière à des dommages-intérêts en se bornant à énoncer que, dans l'exercice de ses fonctions, elle avait commis des négligences graves génératrices du préjudice invoqué par son employeur ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans avoir précisé si les faits imputés à la prévenue étaient constitutifs du délit poursuivi ou d'une autre infraction, la juridiction du second degré a méconnu le sens et la portée du principe susénoncé ;
D'où il suit que l'arrêt attaqué encourt la cassation ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 2 avril 1993, et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.