REJET du pourvoi formé par :
- X... Serge,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 18 janvier 1994, qui, pour abus de confiance et fourniture de renseignements inexacts en vue d'obtenir des avantages indus de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement dont 15 mois avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 118 et 170 alors en vigueur, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a refusé d'annuler les procès-verbaux d'interrogatoire du 25 mars 1992 (D. 42) et de confrontation du 1er avril 1992 (D. 56), et la procédure subséquente ;
" aux motifs que " dans ces deux procès-verbaux, le juge d'instruction a mentionné qu'en cours d'audition, le conseil de Serge X... quittait son cabinet, et qu'il l'avisait, ainsi que son client, de ce que l'interrogatoire ou la confrontation se prolongerait à une date à eux donnée ; que dans chaque cas, après ces mentions, et le départ de l'avocat, le juge d'instruction a poursuivi l'audition de Serge X... ou de Serge X... et des témoins ; que Serge X... soutient que la mention de la poursuite de l'interrogatoire ou de la confrontation à une date ultérieure comportait nécessairement clôture du procès-verbal, et que le magistrat ne pouvait, en conséquence, poursuivre son acte, en l'absence du conseil, qui devait croire que l'audition était achevée ; qu'il résulte de la seule lecture des procès-verbaux en cause, que le conseil de Serge X... s'est retiré du cabinet pour accomplir d'autres tâches de sa profession ; que le juge d'instruction a mis à profit les derniers instants de sa présence dans son cabinet pour le convoquer à une date ultérieure pour la suite de l'audition ; que cette convocation par mention au procès-verbal ne pouvait, sur l'instant, être interprétée comme une clôture de l'interrogatoire ou de la confrontation, les parties n'étant d'ailleurs pas invitées à relire et signer leurs déclarations ; que la mention en cause est donc dépourvue de toute équivoque, ne peut valoir que comme convocation, et non comme manifestation du terme mis à un acte du juge d'instruction ; que l'interrogatoire d'un inculpé, ou sa confrontation, peut se poursuivre et même avoir lieu en l'absence du conseil, à la condition que celui-ci ait été régulièrement convoqué ; qu'à partir du moment où il n'est pas contesté que le conseil de Serge X... avait été régulièrement convoqué, et qu'il est constaté qu'il ne pouvait se méprendre sur le sens de l'avis à lui donné par le juge d'instruction ce magistrat pouvait poursuivre, comme il l'a fait, l'acte d'instruction entrepris ; que ces procès-verbaux ne peuvent donc être annulés " " ;
" alors que, les deux procès-verbaux font à la fois mention du fait que le conseil de l'inculpé a quitté le cabinet du juge d'instruction et de l'avis donné par celui-ci de la poursuite de l'interrogatoire ou de la confrontation à une autre date ; qu'il est constant que malgré cette convocation expresse à poursuivre à une date ultérieure, l'interrogatoire et la confrontation ont été immédiatement poursuivis, hors la présence du conseil de l'inculpé, sans que le procès-verbal indique que le conseil ait été avisé de cette poursuite ultérieure ou que l'inculpé ait renoncé à la présence de son conseil ; qu'en refusant néanmoins, contrairement aux premiers juges, d'annuler ces procès-verbaux, la Cour a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de deux procès-verbaux régulièrement soulevée par le prévenu qui soutenait avoir été interrogé après le départ de son avocat et sans avoir renoncé à sa présence, la cour d'appel relève que ce dernier avait été régulièrement convoqué et que le juge d'instruction pouvait poursuivre, comme il l'a fait, l'acte d'instruction commencé ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'il n'appartient pas à un avocat de mettre fin aux interrogatoires ou confrontations commencés par le juge d'instruction, mais non clôturés, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 118 et 170 alors en vigueur, 591 et 593 du Code de procédure pénale et violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal de confrontation du 6 mai 1992 (D. 69) et la procédure subséquente ;
" aux motifs que " le conseil de l'inculpé n'a pas été convoqué à cette confrontation ; que Serge X... déclarait, avant le début de l'interrogatoire, qu'il acceptait d'être confronté à la partie civile en l'absence de son avocat ; que Serge X... soutient qu'il a été convoqué le jour même et par téléphone, et que son avocat de l'a pas été ; que cette inobservation des formalités légales entraîne la nullité du procès-verbal de confrontation, qui ne saurait être couverte par la renonciation du prévenu à la présence de son conseil ; qu'il est constant que le juge d'instruction peut interroger ou confronter un inculpé sans que le conseil de ce dernier soit présent ou ait été convoqué, à la condition que ledit inculpé ait expressément renoncé préalablement à l'acte d'instruction, à l'assistance de son avocat ; que tel est le cas en l'espèce, ainsi qu'il résulte des mentions du procès-verbal de la confrontation du 6 mai 1992 ; que le moyen de nullité examiné n'est donc pas fondé " " ;
" alors que, comme l'avaient exactement décidé les premiers juges, l'inculpé ne peut renoncer à être entendu en présence de son conseil qui n'a pas été convoqué, qu'en présence de ce dernier ; que pour avoir décidé le contraire, la Cour a violé les textes susvisés " ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 118 alors en vigueur, 170, 591 et 593 du Code de procédure pénale, et violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal de confrontation du 31 mars 1992 (D. 52) et la procédure subséquente ;
" aux motifs que " le juge d'instruction a mentionné dans l'interrogatoire du 25 mars 1992 : " mention : à cet instant, Me du Rostu quitte notre cabinet ; nous l'informons que nous poursuivrons le présent interrogatoire le lundi 30 mars 1992 à 9 heures " ; que Serge X... déclarait ce jour, avant toute déposition : " j'accepte que mon interrogatoire se poursuive aujourd'hui en l'absence de Me du Rostu, mon avocat qui me rejoindra dans le courant de la matinée " " ; que de fait, la présence de l'avocat est mentionnée par le juge en cours d'interrogatoire ; que le procès-verbal ne porte pas trace de protestation de ce conseil ; que Serge X... soutient que le procès-verbal est nul parce que l'interrogatoire a eu lieu à une date différente de la date pour laquelle lui et son conseil avaient été convoqués, parce que cette situation équivaut à une absence de convocation, et parce que la renonciation de l'inculpé à se prévaloir d'une nullité doit, pour être valable, être exprimée en la présence de son conseil ; qu'il estime qu'ainsi, les prescriptions de l'article 118, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, qui permet à l'inculpé et à la partie civile, personnellement, de renoncer à la présence de leur conseil ; qu'il convient en conséquence de réformer le jugement en ce qu'il annule la procédure pour ce motif " ;
" alors que, comme l'avaient exactement décidé les premiers juges, l'inculpé ne peut renoncer à être entendu en l'absence de son conseil, qui n'a pas été convoqué, qu'en présence de ce dernier ; que pour avoir décidé le contraire, après avoir constaté exactement que l'organisation de l'interrogatoire ou de la confrontation à une date différente de celle mentionnée à la convocation du conseil équivalait à une absence de convocation, la Cour a violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de procès-verbaux de confrontation formulée par le prévenu qui prétendait que sa renonciation à la présence de son avocat était irrégulière en l'absence de ce dernier, la cour d'appel relève que Serge X... a expressément renoncé à la présence de son conseil préalablement aux deux actes d'instruction critiqués ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 118 du Code de procédure pénale alors en vigueur et dont les dispositions sont reprises à l'article 114 dudit Code ;
Qu'en effet, le juge d'instruction peut, comme en l'espèce, interroger ou confronter un inculpé sans que le conseil de ce dernier soit présent, ou ait été convoqué, à la condition que la renonciation de l'inculpé à la présence de son avocat soit expresse et préalable à l'acte d'instruction ;
Qu'ainsi les moyens ne sont pas fondés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.