Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Aria a cédé à la Banque nationale de Paris (la banque), dans les formes et conditions de la loi du 2 janvier 1981, diverses créances sur la société Cristalleries et verreries d'art de Vianne, (la société CVAV) par des bordereaux de janvier, mars et avril 1988 ; que la banque a notifié ces cessions à la société CVAV au cours des mois de février, mars et avril 1988 ; que par protocole d'accord du 20 juin 1988 la société Aria a consenti à la société CVAV une remise à valoir sur ses factures ; que la banque a poursuivi la société CVAV en paiement du montant total des créances dont elle était cessionnaire ;
Sur le premier moyen pris en sa première branche :
Vu l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981 ;
Attendu que pour condamner la société CVAV à payer à la banque le montant intégral des créances cédées, l'arrêt décide qu'elle n'est pas fondée à opposer la compensation à la banque dès lors que sa créance sur le cédant n'est devenue liquide et exigible que par la conclusion, après les cessions des créances et même après leur notification, d'un protocole d'accord, mettant fin à leur litige, par lequel la société Aria lui a consenti une remise de 740 000 francs sur ses factures ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des constatations mêmes de l'arrêt que les créances réciproques du cédé et du cédant étaient connexes et que dès lors leur compensation pouvait être opposée à la banque par le débiteur cédé qui n'avait pas pris envers elle l'engagement prévu par l'article 6 de la loi du 2 janvier 1981, la cour d'appel a violé l'article 5 de ladite loi ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil, ensemble l' article 5 de la loi du 2 janvier 1981 ;
Attendu que pour statuer comme elle a fait la cour d'appel a retenu contre la société CVAV la faute d'avoir tardé plus de trois mois après la première notification de cession des créances pour aviser la banque qu'elle était en conflit avec son fournisseur sur l'une des factures cédées ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la notification prévue à l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981 n'entraîne pas à la charge du débiteur cédé une obligation d'information au profit du cessionnaire, sur l'existence et la valeur des créances cédées, et qu'il n'a été constaté aucun comportement frauduleux de la part de la société CVAV au préjudice de la banque, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen :
Vu les articles 50 et 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que pour statuer comme elle a fait la cour d'appel a retenu que la société CVAV n'avait pas déclaré sa créance entre les mains du représentant des créanciers de la société Aria et en a déduit qu'il lui était interdit de compenser sa dette avec la créance invoquée ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi après avoir relevé, d'un côté, que les créances de la société Aria résultaient de factures dont la plus récente était en date du 6 avril 1988 et, de l'autre, que la créance de la société CVAV était devenue certaine, liquide et exigible par la conclusion entre les deux sociétés d'un accord en date du 20 juin 1988, ce dont il résulte que la compensation s'était opérée de plein droit entre leurs dettes réciproques avant l'ouverture de la procédure collective et que la société CVAV n'avait pas à déclarer au passif de la société Aria le montant de sa créance éteinte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juillet 1992, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.