CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Ibrahim, Chalom dit Albert,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 5 mai 1994, qui, pour contraventions douanières, l'a condamné à 2 amendes, à des pénalités à titre de confiscation et au paiement des droits et taxes éludés.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 65, 334 et 441-3 du Code des douanes, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité des prélèvements d'échantillons effectués par l'administration des Douanes le 4 décembre 1986 et ayant fait l'objet d'un procès-verbal de constat de même date ;
" aux motifs qu'il résulte des énonciations de ce procès-verbal que X... a consenti à la remise des échantillons, ce qui exclut que lesdits échantillons aient été saisis au sens douanier du terme, et cela même si le terme "saisis" a été improprement employé dans le procès-verbal de notification de l'infraction du 28 octobre 1987 et dans l'acte à fin d'expertise à la CCED ;
" qu'il ressort de la procédure que les agents des Douanes, en appréhendant, dans les conditions ci-dessus rappelées, les échantillons, ont agi dans le cadre des pouvoirs d'enquête que leur confère l'article 65 du Code des douanes pour rechercher des infractions douanières et dans les formes prescrites par l'article 334 du même Code ;
" que X..., qui n'a jamais contesté le caractère contradictoire des prélèvements ni la représentativité des échantillons et qui, de surcroît, n'a pu se méprendre sur la finalité desdits prélèvements, étant informé depuis le 21 février 1985 par le commissionnaire des critiques de l'administration des Douanes relatives aux propositions tarifaires déclarées, est mal fondé à se prétendre victime d'une voie de fait de la part de l'Administration poursuivante ;
" alors qu'en matière de contestation sur l'espèce, l'origine ou la valeur des marchandises, les prélèvements ne peuvent être effectués que selon les modalités prévues par l'article 441-1 du Code des douanes, de sorte que les agents de l'administration des Douanes étaient radicalement incompétents pour effectuer, dans le cadre d'une simple enquête, de tels prélèvements à fin d'analyse, sans qu'il puisse être invoqué à cet effet le droit de communication prévu par l'article 65 du même Code, qui ne peut porter que sur des documents, pas plus qu'une prétendue saisie de marchandises, laquelle aurait supposé une autorisation du président du tribunal de grande instance, la circonstance que X... aurait remis des échantillons des produits par lui importés n'étant aucunement de nature à exclure l'existence d'une voie de fait commise par les agents des Douanes, lesquels ont agi en dehors de toute disposition légale ; que la Cour, qui a rejeté l'exception de nullité en se fondant sur le fait que X... n'aurait jamais contesté le caractère contradictoire des prélèvements ni la représentativité des échantillons, malgré l'ensemble de son argumentation contestant la validité même des conditions du prélèvement, a privé sa décision de toute base légale au regard du texte visé au moyen " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, si les agents des Douanes exerçant le droit de communication tiennent de l'article 65.5 du Code des douanes le pouvoir de procéder à la saisie de documents de toute nature propres à faciliter l'accomplissement de leur mission, un tel pouvoir ne saurait autoriser la saisie de marchandises ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, lors d'un contrôle des dossiers d'importation au siège de l'entreprise dirigée par Ibrahim X..., les agents des Douanes ont saisi 23 documents et des échantillons de marchandises prélevés dans deux sacs présentés par celui-ci ; qu'après notification des résultats de l'enquête et de l'analyse effectuée par le laboratoire des Douanes, l'intéressé a saisi la commission de conciliation et d'expertise douanière ; que les agents des Douanes ont alors établi un acte à fin d'expertise ;
Attendu que, pour écarter l'exception régulièrement soulevée et tirée de la nullité du prélèvement d'échantillons opéré par procès-verbal de constat du 4 décembre 1986, que X... a refusé de signer, la cour d'appel énonce que la remise des marchandises exclut que les échantillons aient été saisis, même si ce terme est employé dans le procès-verbal de notification d'infraction du 28 octobre 1987 et dans l'acte à fin d'expertise ; qu'elle conclut que les agents des Douanes ont agi dans le cadre des pouvoirs d'enquête que leur confère l'article 65 du Code des douanes pour la recherche des infractions et dans les formes prescrites par l'article 334 du même Code ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que le pouvoir de prélever des échantillons n'est conféré aux agents des Douanes que dans les conditions fixées aux articles 441.1 et 450.1 du Code précité, 1er, 3 à 6 et 24 du décret n° 71-209 du 18 mars 1971, non remplies en l'espèce, et n'entre pas dans les prévisions de l'article 65 dudit Code, la cour d'appel a méconnu le principe susrappelé et les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens proposés ;
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 5 mai 1994 ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
Prononce l'annulation du procès-verbal de constat du 4 décembre 1986, base des poursuites, et des actes subséquents ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi.