AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la Caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment et des travaux publics (CNRO),
2 / la Caisse nationale de retraite des ouvriers du bâtiment et des travaux publics (CNPO), dont les sièges sociaux respectifs sont Tour Méditerranée, 65, avenue Jules Cantini à Marseille (6e) (Bouches-du-Rhône), en cassation d'un arrêt rendu le 3 décembre 1992 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre sociale et civile), au profit de Mme Josette X..., demeurant Ciseraie B 5, Le Merlan à Marseille (15e) (Bouches-du-Rhône), défenderesse à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 juin 1995, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, Mme Ridé, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Monboisse, Merlin, Desjardins, conseillers, Mlle Sant, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Verger, conseillers référendaires, M. Kessous, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Ridé, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la CNRO et de la CNPO, les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi et arrêté la décision au 30 juin 1995 ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 8 et 10 de l'annexe III à l'accord collectif national du 31 juillet 1968 portant règlement du régime national de prévoyance des ouvriers du bâtiment et des travaux publics ;
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué, que M. X... a été employé du 11 avril 1963 au 31 janvier 1981 dans une entreprise adhérente à la Caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment et des travaux publics (CNRO) ;
qu'à l'issue d'une période de chômage indemnisé par les ASSEDIC, il a travaillé du 30 août 1981 au 24 novembre 1981 dans une entreprise non adhérente à la CNRO, puis s'est trouvé de nouveau sous le régime du chômage indemnisé et enfin en invalidité jusqu'à son décès survenu le 5 août 1986 ;
que sa veuve a fait assigner la CNRO et la Caisse nationale de retraite des ouvriers du bâtiment et des travaux publics (CNPO) en paiement des frais d'obsèques et du capital décès prévu par le régime de retraite géré par cette dernière caisse ;
Attendu que pour accueillir cette demande, la cour d'appel a énoncé qu'il serait contraire au principe des droits acquis que Mme X... soit privée du capital décès dès lors que M. X..., qui avait acquis 4 799 points de retraite CNRO au cours de sa vie professionnelle, remplissait ainsi une des conditions non cumulatives prévues à l'article 8 de l'annexe III à l'accord collectif national du 31 juillet 1968 ;
Attendu cependant qu'aux termes des paragraphes a et b de l'article 8 susvisé, seuls ont droit aux prestations énumérées par le réglement de retraite (parmi lesquelles figure, à l'article 10, le capital-décès) les participants au régime de retraite présents dans une entreprise adhérente ou ceux qui se sont trouvés en état d'invalidité, en chômage involontaire ou en stage professionnel "succédant immédiatement à un emploi dans une entreprise adhérente" ;
que le paragraphe c du même article, qui précise les conditions d'ancienneté et le nombre de points nécessaires, n'est applicable qu'aux participants ainsi définis ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait alors qu'elle avait constaté que lors de son décès, M. X... se trouvait en invalidité après une période de chômage ayant immédiatement succédé à un emploi dans une entreprise qui n'avait pas adhéré à la CNRO, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la CNRO et la CNPO, envers Mme X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. Waquet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement de M. le président Kuhnmunch, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du dix-neuf juillet mil neuf cent quatre-vingt-quinze.