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23/11/1995 | FRANCE | N°94-85426

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 novembre 1995, 94-85426


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois novembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CULIE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Jean-Philippe, contre l'arrêt de la c

our d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 27 octobre 1994 qui, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois novembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CULIE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Jean-Philippe, contre l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 27 octobre 1994 qui, pour abus de biens sociaux, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement avec sursis et 250 000 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles R. 213-4 et suivants du Code de l'organisation judiciaire, 486, 591 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué mentionne, d'une part, que la Cour était composée lors des débats et du délibéré de "M. Gayat de Wecker, conseiller le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonction de président en l'absence du titulaire empêché" et, d'autre part, que la minute de l'arrêt a été signée par Mme Perrin, conseiller le plus ancien ayant participé aux débats et au délibéré ;

"alors qu'en cas d'empêchement du président titulaire, celui-ci doit être remplacé par un magistrat du siège suppléant désigné par le Premier président ou, à défaut, par le magistrat du siège présent le plus ancien dans l'ordre des nominations de la Cour ;

qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la qualité de magistrat du siège présent le plus ancien retenue pour M.

le conseiller Gayat de Wecker est contredite par les énonciations contradictoires relatives à Mme le conseiller Perrin ayant signé la minute de l'arrêt de sorte que la cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction appelée à statuer" ;

Attendu que l'arrêt attaqué mentionne que la chambre des appels correctionnels était composée lors des débats et du délibéré de M. Gayat de Wecker, conseiller le plus ancien dans l'ordre des nominations à la Cour, faisant fonctions de président en l'absence du titulaire empêché, de Mme Perrin et de Mme Warein, conseillers ; qu'à l'audience fixée pour le prononcé de l'arrêt, celui- ci a été lu par Mme Perrin, qui a signé la minute ;

Attendu qu'en l'état de ces mentions, d'où se déduit l'empêchement du président pour signer la minute, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer de la régularité de la décision ;

Qu'en effet, la méconnaissance éventuelle des dispositions réglementaires du Code de l'organisation judiciaire est sans incidence sur la régularité de la composition de la cour d'appel, qui relève des seules règles fixées par la loi ;

Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 113-6 du Code pénal, 437-3 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir commis une infraction d'abus de biens sociaux, qualifiée de délit par la loi française, en Belgique, au préjudice d'une société belge ;

"alors qu'aux termes de l'article 113-6 du Code pénal, tout citoyen français qui, en dehors du territoire de la République, s'est rendu coupable d'un fait qualifié de délit par la loi française n'est punissable que si ces mêmes faits sont également punissables par la législation du pays où ils ont été commis ;

qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Jean-Philippe Y..., de nationalité française, aurait, en sa qualité d'administrateur de la SA Sitram Belgium, commis le délit d'abus de biens sociaux sur le territoire belge au préjudice de la société belge ;

qu'aucune des énonciations de l'arrêt attaqué ne constate que les faits qualifiés de délit par la loi française sont également punissables par la législation belge, de sorte que les dispositions d'ordre public susvisées ont été violées" ;

Attendu que l'arrêt attaqué a déclaré Jean- Philippe Y... coupable, dans les termes de la prévention, d'avoir à Saint-Benoît du Sault, sur le territoire national, et à Bruxelles, entre novembre 1980 et le 31 mai 1987, en qualité d'administrateur de la SA Sitram Inox Belgique, fait de mauvaise foi des biens et du crédit de ladite société un usage qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société dans laquelle il était directement intéressé -en l'espèce la société Promodistri-, notamment en lui accordant des conditions de prix et des délais de paiement anormaux ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations non remises en cause par le moyen, constatant l'accomplissement sur le territoire de la République d'un des faits constitutifs de l'infraction, la cour d'appel a retenu à bon droit sa compétence ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 437 de la loi du 24 juillet 1966, 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué, statuant sur les intérêts civils, a condamné le prévenu à payer à la société Sitram Inox une somme de 2 000 000 francs avec intérêt au taux légal à compter du 11 juillet 1988 au titre du manque à gagner sur la commercialisation des produits en émail ;

"aux motifs que les sociétés Sitram Inox et Sitram Inox Belgium ont subi un préjudice du fait des ventes par Promodistri de produits yougoslaves représentant environ 15 à 20 % du chiffre d'affaires de cette société ;

que, si aucun élément ne permet d'évaluer avec précision le chiffre d'affaires eu égard aux éléments du dossier, la Cour estime que le préjudice souffert par la SA Sitram Inox sera équitablement réparé par l'allocation d'une somme de 2 000 000 francs ;

"alors que seul le préjudice directement causé par le délit d'abus de biens sociaux peut être réparé devant les juridictions répressives au profit de la société victime de cet abus ;

que tel n'est pas le cas du manque à gagner subi par la société Sitram du fait de la vente par la société Promodistri de produits émaillés qui constitue un acte de concurrence mais non un acte de disposition ou d'administration concernant les biens de la société Sitram, seul susceptible de caractériser l'infraction de biens sociaux ;

que, dès lors, l'arrêt attaqué ne pouvait faire droit à la demande de la société Sitram tendant à être indemnisée du manque à gagner réalisé par la concurrence des produits yougoslaves, le préjudice ainsi allégué étant étranger à la gestion de la société effectuée par Jean-Philippe Y..., pour laquelle il a été déclaré coupable" ;

Attendu que le moyen, qui se borne à remettre en question le pouvoir souverain d'appréciation dont disposent les juges pour déterminer, dans les limites des conclusions des parties, le montant de l'indemnité destinée à réparer le préjudice causé par l'infraction, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Gondre conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Culié conseiller rapporteur, MM.

Roman, Schumacher, Martin, Farge conseillers de la chambre, MM. de X... de Massiac, de Larosière de Champfeu conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-85426
Date de la décision : 23/11/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(sur le premier moyen) JUGEMENTS ET ARRETS - Minute - Signature - Conseiller - Condition - Dispositions réglementaires du code de l'organisation judiciaire - Incidence (non).

(sur le deuxième moyen) CRIMES ET DELITS COMMIS A L'ETRANGER - Délit - Poursuite en France - Conditions - Fait commis en France également poursuivi - Fait puni par la loi étrangère - Constatation (non).


Références :

Code de l'organisation judiciaire R213-4 et suiv.
Code de procédure pénale 486 al. 3
Code pénal 113-6

Décision attaquée : Cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, 27 octobre 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 nov. 1995, pourvoi n°94-85426


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GONDRE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:94.85426
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