Sur la demande de sursis à statuer :
Attendu que la société Slibail sollicite qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée à titre préjudiciel sur le point de savoir si l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être interprété en ce sens que l'interdiction de porter atteinte au droit de propriété qu'il édicte peut admettre des restrictions telles qu'il permette de priver de son droit de propriété ou, en tout cas, de toute possibilité de l'exercer utilement, le crédit-bailleur qui, dans le cadre d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, n'a pas engagé dans les délais légaux l'action en revendication de son bien, en lui refusant toute autre possibilité de restitution, avec toutes conséquences de droit ;
Mais attendu que, selon sa jurisprudence (arrêt du 18 juin 1991, ERT, aff. C-260/89), la Cour de justice des Communautés européennes ne peut apprécier, au regard de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, une réglementation nationale qui ne se situe pas dans le cadre du droit communautaire ; que la société Slibail n'ayant fait état d'aucun élément de nature à établir que la réglementation en cause entrait dans le champ d'application du droit communautaire, il n'y a pas lieu à renvoi préjudiciel ;
Et sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Slibail fait grief à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 25 novembre 1993) d'avoir déclaré irrecevable son action en revendication du véhicule objet du contrat de crédit-bail conclu le 22 août 1989 avec Mme X..., mise en redressement judiciaire le 18 décembre 1990, puis en liquidation judiciaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en statuant ainsi, sur le seul fondement de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985, après avoir jugé irrecevable la demande en relevé de forclusion présentée par la société Slibail, et en déniant ainsi au crédit-bailleur tout moyen de faire valoir son droit de propriété sur le bien en cause, la cour d'appel a nécessairement privé ledit crédit-bailleur de ce droit de propriété ; qu'une telle interprétation, que n'imposent ni la lettre ni l'esprit de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985, méconnaît, par fausse interprétation, les dispositions de ce texte et, par refus d'application, celles de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; et alors, d'autre part, qu'à supposer que les dispositions de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985 aient le sens et la portée que leur prête l'arrêt, il appartenait à la cour d'appel d'en écarter l'application dès lors que l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique ; que la privation de son droit de propriété nécessairement imposée à la société Slibail n'est imposée par aucune utilité publique ; qu'en appliquant néanmoins les dispositions susvisées d'une loi interne, la cour d'appel a violé, par refus d'application l'article 55 de la Constitution et l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Slibail avait présenté sa demande en revendication après l'expiration du délai prévu à l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 10 juin 1994, applicable en la cause, de sorte que cette société ne pouvait plus faire valoir son droit de propriété sur le véhicule litigieux, la cour d'appel a fait l'exacte application des dispositions du texte précité, sans méconnaître celles de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen non plus que celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elles protègent le droit de propriété ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE la demande de sursis à statuer ;
REJETTE le pourvoi.