AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Fourre et Rhodes, société en nom collectif, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 31 janvier 1992 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit :
1 / de la Caisse des Congés Payés du Bâtiment, dont le siège est ...,
2 / de M. André X..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 novembre 1995, où étaient présents : Mme Ridé, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Desjardins, conseiller rapporteur, M. Merlin, conseiller, Mme Bourgeot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Desjardins, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat de la société Fourre et Rhodes, de Me Odent, avocat de la Caisse des congés payés du bâtiment, de la SCP Gatineau, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 31 janvier 1992), que M. X..., qui avait travaillé en qualité d'ingénieur, du 13 avril 1986 au 15 septembre 1989, au service de la société Fourre et Rhodes, entreprise de construction, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un complément d'indemnités de congés payés, en faisant valoir que les sommes qui lui avaient été versées à ce titre avaient été calculées sans que soient prises en considération les primes et gratifications qu'il avait perçues ;
Attendu que la société Fourre et Rhodes fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. X... une somme, assortie des intérêts légaux, à titre de compléments de congés payés en application de la décision du conseil d'administration de la Caisse de congés payés du bâtiment de la région du Nord, alors, selon le moyen, d'une part, que cette décision n'était pas opposable à la société Fourre et Rhodes, dès lors qu'elle était contraire aux dispositions législatives et réglementaires applicables en l'espèce ;
qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, L. 223-16 et D. 732-1 et suivants du Code du travail ;
et alors, d'autre part, que les primes et gratifications discrétionnaires et bénévoles qui ne constituent pas un droit pour le salarié et dont l'employeur fixe discrétionnairement les conditions d'attribution et le montant, n'entrent pas dans l'assiette de calcul des congés payés ;
que, dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 223-11, L. 223-13, L. 223-16, D. 732-1 et suivants du Code du travail ;
Mais attendu qu'il résulte, premièrement, de l'article L. 222-13 du Code du travail, que les dispositions de l'article L. 223-11 ne portent pas atteinte aux stipulations contractuelles assurant aux salariés des indemnités de congés payés d'un montant plus élevé, deuxièmement, de l'article D 732-4 du Code du travail, que, dans le secteur du bâtiment, l'employeur est tenu de se conformer aux prescriptions des statuts et règlements de la caisse à laquelle il a adhéré, et troisièmement, de l'article D. 732-2 du même Code que ces statuts et règlements ne sont applicables qu'après avoir reçu l'approbation du ministre chargé du travail ;
Que la cour d'appel a relevé que la Caisse de Congés payés du Bâtiment de la région Nord avait fait application dans son règlement de la décision, prise le 6 mai 1975, en vertu de l'article D. 732-5 du Code du travail, par le conseil d'administration de la Caisse Nationale de Surcompensation du Bâtiment et des Travaux Publics, d'inclure dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, l'ensemble des rémunérations perçues par les salariés, y compris les primes et gratifications, à la seule exception des remboursements de frais, des allocations complémentaires pour privation d'emploi et des compléments de salaire versés aux ouvriers malades ou blessés en application de l'accord de mensualisation ;
qu'elle a constaté que la société Fourre et Rhodes avait, lors de son adhésion, pris l'engagement de déclarer l'ensemble des rémunérations versées à la totalité de son personnel et de se conformer aux statuts et règlements de cet organisme ;
que le règlement invoqué étant, sur le point considéré, plus favorable aux salariés que l'article L. 223-11 du Code du travail, elle a exactement décidé que la société était tenue de respecter son engagement et d'inclure dans sa déclaration les primes et gratifications litigieuses, qui ne correspondaient à aucun des cas d'exclusion limitativement énumérés par le règlement de la Caisse ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Fourre et Rhodes, envers la Caisse des Congés Payés du Bâtiment et M. X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par Mme le président en son audience publique du douze décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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