AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Mary sport 2000, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 18 mars 1993 par la cour d'appel de Douai (2e chambre civile), au profit :
1 / de la société Dunlop, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / de M. Joël X..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 novembre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Apollis, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Apollis, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société Mary sport 2000, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :
Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué (Douai, 18 mars 1993), que la société Mary sport 2000 a été assignée en paiement d'une facture d'un montant de 22 349,39 francs par la société Dunlop ; qu'à l'appui de ses prétentions, cette société a produit un bon de livraison portant une signature "X...", du nom d'une personne qui aurait réceptionné la marchandise pour le compte de la société Mary sport 2000 ;
que la livraison et la signature ont été contestées ;
Attendu que la société Mary sport 2000 fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Dunlop, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en reconnaissant au bon de livraison litigieux une force probante suffisante, quand bien même celui-ci était revêtu d'une signature déniée et ne comportait par le cachet commercial du destinataire, sans procéder aucunement à la vérification d'écriture requise par les parties, la Cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 287 et suivants du nouveau Code de procédure civile et a renversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;
alors, d'autre part, qu'en tenant pour acquis que la signature portée sur le bon de livraison litigieux émanait d'une personne alors "présente dans le magasin" qui aurait eu la qualité de mandataire apparent du destinataire, sans s'expliquer aucunement sur cette affirmation qui fonde seule la solution retenue dans l'arrêt attaqué, la cour d'appel ajoute à l'écrit une mention qui n'y figure nullement, en violation ensemble des articles 1134, 1322 du Code civil et 109 du Code de commerce ;
alors, en outre, que, dans ses conclusions, la société Mary sport 2000 se prévalait de ce qu'en application des conditions générales figurant au verso du bon litigieux, le cachet commercial du destinataire des marchandises apposé sur le recto conditionnait la preuve de la livraison ;
que, dès lors, en se bornant à affirmer que "l'absence du cachet commercial de la société Mary sport 2000 sur ce bon ne lui enlève pas son caractère probant", sans répondre à ce chef de ses conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et, sans porter son analyse sur lesdites conditions générales, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation ensemble des articles 4 du nouveau Code de procédure civile et 1134 du Code civil ;
et alors, enfin, que la société Mary sport 2000 demandait à titre subsidiaire qu'une mesure d'expertise portant sur l'authenticité de la signature de M. X... soit ordonnée et que le serment judiciaire soit déféré à celui-ci pour en faire dépendre le jugement de la cause ;
que, dès lors, en écartant ces demandes, qui constituaient la seule possibilité pour le prétendu débiteur d'apporter une preuve contraire à celle qui était invoquée contre lui, sans motiver sa décision, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1357, 1358 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient qu'après comparaison d'écriture, il apparaît que la signature apposée sur le bon de livraison est celle du mandataire apparent de la société Mary sport 2000, entre les mains duquel le transporteur a remis la marchandise litigieuse, et que l'absence de cachet commercial de la société sur ce bon de livraison ne lui enlève pas son caractère probant ;
que, sans inverser la charge de la preuve, ni modifier l'objet du litige et hors toute dénaturation, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
que le moyen ne peut être acueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Mary sport 2000, envers la société Dunlop et M. X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du neuf janvier mil neuf cent quatre-vingt-seize.
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