AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept janvier mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Patrick, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13ème chambre, en date du 10 février 1995, qui, pour contravention de violences volontaires, l'a condamné à 3 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Sur l'action publique :
Attendu que l'infraction reprochée au prévenu constitue une contravention qui a été commise avant le 18 mai 1995 ;
que dès lors, elle est amnistiée par l'effet de l'article 1er de la loi du 3 août 1995 ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article 21 de la loi précitée, l'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers ;
que l'arrêt contient des dispositions civiles et qu'il convient par suite d'examiner, du seul point de vue des intérêts civils, les moyens de cassation proposés par le demandeur ;
Sur l'action civile :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 446 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué ne porte pas mention que le témoin M. Y... avait, préalablement à sa déposition, prêté le serment prévu par l'article 446 du Code de procédure pénale ;
"alors que la constatation du serment des témoins, formalité substantielle, est imposée à peine de nullité ;
que l'arrêt attaqué se borne à énoncer que M.
Y..., "témoin entendu" à la demande de la partie civile, a affirmé que Patrick X... lui avait dit, le soir des faits, au téléphone : "j'ai frappé ma secrétaire" ;
qu'ainsi, il n 'est pas établi que ce témoin, sur la déposition duquel la cour d'appel a fondé sa conviction, ait prêté le serment prévu par l'article 446 du Code de procédure pénale ;
qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué encourt l'annulation" ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les témoins entendus à l'audience d'une juridiction de répression doivent, avant de commencer leur déposition, prêter le serment prévu par l'article 446 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué que les témoins entendus par la cour d'appel, et sur les dépositions desquels les juges ont fondé leur conviction, aient préalablement prêté serment ;
que dès lors, la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé ;
DECLARE l'action publique ETEINTE ;
CASSE et ANNULE l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13ème chambre, en date du 10 février 1995, mais seulement sur les intérêts civils ;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13ème chambre, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Françoise Simon, M. Farge conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire, M. Perfetti avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;