AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Valentin X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 15 juin 1993 par la cour d'appel de Colmar (1re chambre civile), au profit :
1°/ de M. Gérard X...,
2°/ de M. Raphaël X..., demeurant tous deux ..., défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, en l'audience publique du 13 février 1996, où étaient présents : M. Deville, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Di Marino, conseiller rapporteur, MM. Aydalot, Boscheron, Toitot, Mme Borra, M. Bourrelly, Mme Stephan, MM. Peyrat, Cachelot, conseillers, MM. Chollet, Pronier, conseillers référendaires, M. Lucas, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre;
Sur le rapport de Mme le conseiller Di Marino, les observations de la SCP Monod, avocat de M. Valentin X..., de Me Hennuyer, avocat de M. Gérard X..., les conclusions de M. Lucas, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même, le principe de la contradiction;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 15 juin 1993), que M. Valentin X..., usufruitier d'un terrain sur lequel un bâtiment avait été édifié, dont les fils Gérard et Antoine étaient nu-propriétaires chacun pour moitié, a assigné Gérard X... et le fils de ce dernier, Raphaël, afin d'obtenir leur expulsion du bâtiment qu'ils occupaient à titre d'habitation et, subsidiairement, leur condamnation au paiement d'un loyer;
Attendu que, pour rejeter ces demandes, l'arrêt retient que M. Valentin X... n'a jamais revendiqué la jouissance du bâtiment pour l'occuper lui-même ou en retirer des fruits civils, qu'il n'a élevé aucune réclamation ou revendication lorsque son fils Gérard s'y est installé plus de deux ans avant l'introduction de la procédure, qu'il ne lui a notamment pas proposé la conclusion d'un bail ni réclamé une quelconque indemnité d'occupation, que cette attitude démontre que M. Valentin X... avait renoncé à exercer l'usufruit sur le bâtiment;
Qu'en relevant d'office le moyen tiré de la renonciation à l'exercice du droit d'usufruit par M. Valentin X..., sans inviter, au préalable, les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz;
Condamne, ensemble, MM. Gérard et Raphaël X... aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Colmar, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt mars mil neuf cent quatre-vingt-seize.