REJET du pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes et Droits indirects,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Reims, chambre correctionnelle, du 24 novembre 1994, qui, pour infraction à la législation sur les stupéfiants et infraction douanière, a condamné Bruno X... et Laurent Y... à 4 mois d'emprisonnement, 19 600 francs d'amende et à la confiscation des produits stupéfiants saisis.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 343, 391, 435 du Code des douanes, 3 de l'arrêté du 18 avril 1957, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de la demanderesse en paiement de la somme de 19 600 francs pour tenir lieu de confiscation ;
" aux motifs qu'en l'espèce, l'alternative en cause ne porte pas sur la saisie même des marchandises litigieuses ; qu'il est établi qu'elles ont été effectivement saisies et placées sous scellés ; qu'elles ont en outre été déjà confisquées (c'est-à-dire attribuées au fisc) par décision précitée (le tribunal statuant sur l'action publique) au profit de l'Etat français, auquel l'administration des Douanes n'est pas étrangère ; que la demande de l'appelante tendant à obtenir un substitut de confiscation des mêmes marchandises est sans objet ;
" alors que, lorsque les objets susceptibles de confiscation n'ont pu être saisis ou lorsque, ayant été saisis, la Douane en fait la demande, le tribunal prononce, pour tenir lieu de confiscation, la condamnation au paiement d'une somme égale à la valeur représentée par lesdits objets et calculée d'après le cours du marché intérieur à l'époque où la fraude a été commise ; que la cour d'appel a constaté que les marchandises avaient été saisies et que la demanderesse avait demandé une somme pour tenir lieu de confiscation ; que la cour d'appel a cependant écarté cette demande, bien que les conditions légales fussent remplies, aux motifs que les marchandises litigieuses ont été " saisies, placées sous scellés et ont en outre été confisquées (c'est-à-dire attribuées au fisc), par décision précitée au profit de l'Etat auquel l'administration des Douanes n'est pas étrangère " ; qu'en statuant ainsi et en ajoutant au texte une condition qui n'y figure pas, la cour d'appel a violé l'article 435 du Code des douanes ;
" alors que, en tout état de cause, si l'administration des Douanes fait partie de l'Etat français, elle ne se confond pas avec lui ; qu'ainsi notamment, la demanderesse n'exerce pas l'action pour l'application des peines prévues par le Code des douanes, qui appartient au seul ministère public, que 40 % du produit net des saisies est attribué au Trésor, que les dépens incombent à ce dernier ; qu'en déclarant dès lors que l'administration des Douanes ne pouvait avoir droit au paiement d'une somme pour tenir lieu de confiscation car les marchandises avaient été attribuées au profit de l'Etat français auquel elle ne serait pas étrangère, la cour d'appel a violé les articles 343, 391 et 435 du Code des douanes " ;
Attendu que Bruno X... et Laurent Y..., trouvés détenteurs de produits stupéfiants après un voyage aux Pays-Bas, ont été poursuivis, sur le fondement des articles 215 et 419 du Code des douanes, pour acquisition, détention et transport irréguliers de stupéfiants, délit douanier réputé importation en contrebande de marchandises prohibées, ainsi que, sur le fondement de l'article L. 628 du Code de la santé publique, pour usage de stupéfiants ;
Que les premiers juges ayant prononcé la confiscation en nature des produits saisis et non la confiscation en valeur que sollicitait l'administration des Douanes, celle-ci a interjeté appel de la décision ;
Attendu que, pour refuser de faire droit aux conclusions de l'Administration et confirmer le jugement entrepris, les juges du second degré retiennent que les produits saisis et placés sous scellés ayant déjà été confisqués au titre de l'action publique, la demande de l'appelante, au soutien de l'action fiscale, " tendant à obtenir un substitut de confiscation des mêmes marchandises ", était sans objet ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que, s'agissant de produits dangereux pour la santé, la confiscation en nature des stupéfiants saisis était obligatoire, en application tant de l'article 369-4 du Code des douanes que des articles L. 629 du Code de la santé publique et 131-21 du Code pénal, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;
Qu'en effet, les dispositions de l'article 435 du Code des douanes qui permettent à l'Administration de solliciter la condamnation d'un contrevenant au paiement d'une somme pour tenir lieu de confiscation, au cas où les objets susceptibles de confiscation n'ont pu être saisis ou lorsque, ceux-ci ayant été saisis, leur confiscation n'est que facultative ne sauraient recevoir application, sans méconnaître la règle du non-cumul des peines de même nature, prévue par l'article 132-3 du Code pénal, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, les juges ont déjà prononcé la confiscation des objets préalablement saisis ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.