CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Raymond,
- X... Marie-Jeanne,
- X... Mathieu,
parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bourges, en date du 6 juillet 1995, disant n'y avoir lieu à suivre contre Y... Didier pour homicide volontaire avec préméditation.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 64 du Code pénal ancien, 122-1 du nouveau Code pénal, 575, alinéa 2-6°, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef d'homicide volontaire avec préméditation après avoir constaté que Y... Didier n'était pas pénalement responsable des faits visés dans les poursuites, par application des dispositions de l'article 122-1 du Code pénal ;
" aux motifs que 2 collèges d'experts psychiatres ont estimé que l'intéressé s'était trouvé atteint, au moment de l'action, de troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli son discernement et le contrôle de ses actes ; que le nouveau Code pénal n'a apporté sur ce point aucune modification au droit positif concernant l'irresponsabilité pénale en cas d'existence de tels troubles ; qu'aucun élément du dossier ne permet de contester ces conclusions concordantes, étayées sur des observations précises et approfondies, le magistrat instructeur ne fondant sa décision de transmission de pièces que sur des interrogations dubitatives ; que, par ailleurs, contrairement aux énonciations de l'ordonnance de transmission de pièces, les résultats d'expertises antérieures, d'ailleurs relatives à des faits de natures différentes, ne sauraient prévaloir sur des investigations portant sur la réalisation de l'acte incriminé ;
" alors que, dans leur mémoire déposé devant la chambre d'accusation, le 26 juin 1995, les parties civiles sollicitaient un complément d'information en demandant, subsidiairement, à la chambre d'accusation " de désigner un collège d'experts choisis sur les listes de ceux exerçant dans le ressort de la cour d'appel de Lyon, de celle de Paris ou de la Cour de Cassation, aux fins d'examiner à nouveau M. Y...... " ; qu'une telle contre-expertise s'imposait, en effet, en raison des divergences existant entre les résultats d'expertises immédiatement antérieures aux faits et celles résultant des dernières investigations portant sur l'état mental de Y... Didier ; que la chambre d'accusation n'a pas examiné ce moyen, fût-ce pour l'écarter, son arrêt n'étant que la reproduction littérale des réquisitions du procureur général, lesquelles avaient été rédigées avant le dépôt du mémoire des parties civiles et qu'il ne peut être ainsi considéré comme ayant, même implicitement, écarté les conclusions de ce mémoire ; que, dès lors, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que l'article 575, alinéa 2. 6°, du Code de procédure pénale déclare recevable le pourvoi de la partie civile contre un arrêt de la chambre d'accusation, même en l'absence de pourvoi du ministère public, lorsque l'arrêt ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ; qu'il en est ainsi lorsque l'arrêt omet de répondre à une articulation essentielle formulée au mémoire déposé par la partie civile ; qu'en vertu de l'article 593 du même Code, un tel arrêt doit être annulé ;
Attendu que, statuant après ordonnance de transmission de pièces, rendue le 7 juin 1995 par le magistrat instructeur dans l'information ouverte contre Y... Didier pour assassinat, la chambre d'accusation, après avoir énoncé que l'intéressé n'était pas pénalement responsable, dit n'y avoir lieu à suivre en l'état ;
Que, dans un mémoire régulièrement déposé le 26 juin 1995 les parties civiles ont exposé un certain nombre d'arguments de fait et de droit, d'où elles concluaient à la nécessité d'ordonner une expertise complémentaire portant sur l'état mental de Y... Didier au regard, notamment, de l'article 122-1 nouveau du Code pénal ;
Mais attendu que la chambre d'accusation n'a pas examiné ces moyens, fût-ce pour les écarter, pour la raison que son arrêt n'est que la reproduction littérale des réquisitions du procureur général, lesquelles avaient été rédigées avant le dépôt du mémoire, et qu'ainsi cet arrêt ne peut être considéré comme ayant, même implicitement, rejeté la demande des parties civiles ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bourges, en date du 6 juillet 1995, en toutes ses dispositions et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Orléans.