Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 200-1 et L. 223-11 du Code du travail, le chapitre 10 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel, et le règlement PS 2 ;
Vu le principe fondamental, en droit du travail, selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que MM. Y... et X..., employés de la SNCF en qualité de cadres permanents, soutenant ne pas avoir perçu pendant leurs congés payés une rémunération équivalente à celle qu'ils auraient dû percevoir s'ils avaient travaillé, diverses primes et indemnités s'ajoutant à leur rémunération de base n'ayant pas été prises en considération dans le calcul des indemnités de congés payés, ont saisi la juridiction prud'homale, le 18 novembre 1992, d'une demande en paiement d'un rappel d'indemnités de congés payés pour les cinq dernières années ; que la Fédération générale des transports et de l'équipement (FGTE-CFDT) est intervenue à l'appui de cette demande ;
Attendu que, pour condamner la SNCF à verser à MM. Y... et X... diverses sommes à titre de rappel de congés payés pour les années 1987 à 1991, le jugement a énoncé, d'une part, que les dispositions du Code du travail sont applicables de plein droit aux salariés de la SNCF, toutes les fois qu'elles sont plus favorables que les règles statutaires, quand bien même ces dernières auraient été agréées par l'autorité administrative, et d'autre part, que, si le règlement PS 2 relatif à la rémunération du personnel du cadre permanent de la SNCF énonce les indemnités qui continuent à être versées à un agent pendant la durée de son congé annuel, les dispositions de ce règlement ne font pas obstacle à l'application de l'article L. 223-11 du Code du travail, relatif au calcul de l'indemnité de congé à laquelle a droit tout salarié pendant la durée de son congé annuel ;
Attendu, cependant, qu'il résulte des termes de l'article L. 200-1 du Code du travail que sont soumis aux dispositions du livre II de ce Code les établissements industriels et commerciaux, qu'ils soient publics ou privés ; que les dispositions du livre II et spécialement celles des articles L. 223-1 et suivants, relatives aux congés annuels, sont donc, en principe, applicables aux agents de la SNCF ;
Attendu que ces agents sont, en outre, soumis aux dispositions d'un statut prévu par le décret n 50-637 du 1er juin 1950, qui comporte diverses règles spécifiques relatives aux congés payés, concernant à la fois les conditions de leur attribution, leur durée et leur rémunération ;
Attendu qu'en vertu du principe fondamental, en droit du travail, selon lequel la situation des salariés doit être régie, en cas de conflit de normes, par celle qui leur est la plus favorable, il convient, dès l'instant qu'aucune illégalité d'une disposition particulière du statut propre à la SNCF n'est invoquée, de déterminer si les dispositions de ce statut concernant les congés payés sont plus favorables que celles résultant du régime légal ; que cette appréciation doit être globale à raison du caractère indivisible de ce régime de congés payés institué en tenant compte des nécessités du service public ; que cette comparaison n'implique aucune appréciation sur la légalité du décret précité, puisqu'il s'agit seulement de choisir entre deux textes, également applicables, le plus avantageux pour les salariés ;
Et attendu qu'il apparaît que, même si en ce qui concerne les bases de calcul de l'indemnité de congés payés, le statut de la SNCF prévoit une disposition moins favorable, l'ensemble du régime des congés payés prévu par ce statut accorde aux agents des avantages supérieurs à ceux qui résulteraient de l'application du Code du travail ;
D'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé les textes et le principe susvisés ;
Et attendu que la cour étant en mesure de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée, la cassation encourue sera prononcée sans renvoi, par application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 décembre 1994, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Martigues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
REJETTE la demande des deux salariés.