Attendu, selon l'arrêt critiqué, que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Isère (la CRCAM) a accordé à M. Serge X..., d'une part, en 1988, deux prêts, l'un de 25 000 francs et l'autre de 100 000 francs, pour les besoins de son activité commerciale, et, d'autre part, en janvier 1989, une autorisation de découvert en compte courant ; que Mme X... a cautionné le premier prêt ; qu'elle s'est, en outre, portée caution solidaire, avec Mme Y... et M. Z..., pour le second prêt et pour le découvert en compte ; que la CRCAM a fait assigner le débiteur et les cautions en paiement du montant des crédits utilisés et non remboursés ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mmes X... et Y..., ainsi que M. Z..., font grief à l'arrêt d'avoir dit qu'aucune faute professionnelle n'était établie à l'encontre de la CRCAM dans l'octroi des différents prêts consentis à M. X... et d'avoir, en conséquence, fixé la créance de la Caisse sur ce dernier à la somme de 742 169,93 francs, condamné Mme Claudie X..., en sa qualité de caution solidaire de M. X..., à payer à la Caisse, en deniers ou quittances, la somme de 15 723,72 francs, avec intérêts conventionnels sur la somme de 10 426 francs à compter du 30 octobre 1992, et condamné Mmes X... et Y..., ainsi que M. Z..., en leur qualité de caution solidaire de M. X..., à payer, en deniers ou quittances, la somme de 594 086,30 francs, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 30 octobre 1992, celle de 475 766,85 francs, ainsi que la somme de 132 359,91 francs, avec intérêts conventionnels sur celle de 79 170 francs, à compter du 30 octobre 1992, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en se bornant, pour exonérer la banque de toute responsabilité, à affirmer, d'une part, que les deux prêts contractés en 1988 ne représentaient pas une charge de remboursement excessive et, d'autre part, que le découvert bancaire consenti le 6 janvier 1989 correspondait à une majoration du chiffre d'affaires, sans rechercher si la charge de remboursement résultant des deux prêts et du découvert bancaire n'excédait pas les facultés de remboursement de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil ; et alors, d'autre part, que la cour d'appel constate que la banque, qui avait autorisé un découvert bancaire de 80 000 francs, le 6 janvier 1989, a laissé s'accroître le solde débiteur du compte jusqu'à 237 114 francs, au mois de juin 1989, et à 364 000 francs, le 6 septembre 1989 ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que la banque avait commis une faute, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la preuve n'est pas rapportée de ce qu'au moment de l'octroi des crédits litigieux, la situation du fonds de commerce de papeterie et de parfumerie de M. X... était irrémédiablement compromise ; qu'il constate encore que celui-ci bénéficiait des services d'un conseiller spécialisé ; qu'il retient, s'agissant des deux prêts contractés en 1988, qu'ils représentaient une charge mensuelle de remboursement de 6 148 francs, dégressive dans le temps, alors que les bilans montrent des bénéfices annuels de 259 000 francs pour 1986 et de 288 000 francs pour 1987, ce qui ne confère pas à la charge d'amortissement un caractère excessif ; qu'il retient, enfin, que le découvert bancaire, consenti le 6 janvier 1989, faisait suite à une progression régulière du chiffre d'affaires, soit 356 937 francs en 1986, 412 457 francs en 1987 et 937 858 francs en 1988, progression qui s'est poursuivie ultérieurement, pour atteindre 1 063 356 francs au 31 juillet 1989 ; qu'en l'état de ces constatations et sans avoir à effectuer de plus amples recherches, la cour d'appel a pu exclure la responsabilité civile de la CRCAM dans l'octroi des crédits ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 ;
Attendu que, pour condamner les cautions au paiement des sommes indiquées au premier moyen, l'arrêt retient que, si l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 impose aux établissements de crédit une information annuelle des cautions, c'est uniquement dans le cas d'un concours financier accordé à une entreprise, que, du caractère professionnel des concours accordés par la banque, il ne peut être implicitement déduit que le fonds de commerce de M. X... constituait une entreprise, c'est-à-dire une collection de moyens excédant les capacités d'une personne physique ; que le grief tenant au défaut d'information des cautions n'est donc pas fondé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la CRCAM avait consenti des crédits à M. X... pour les besoins de l'exploitation de son fonds de commerce, ce qui suffisait à caractériser l'octroi de concours financiers à une entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la troisième branche du second moyen :
Vu l'article 2013 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur et que le cautionnement qui excède la dette est réductible à la mesure de l'obligation principale ;
Attendu que l'arrêt porte condamnation de Mme Claudie X..., en sa qualité de caution solidaire de M. Serge X..., à payer à la CRCAM, en deniers ou quittances, la somme de 15 723,72 francs, avec intérêts conventionnels sur la somme de 10 426 francs, à compter du 30 octobre 1992, puis condamnation de Mme Claudie X..., de Mme Christiane Y... et de M. Georges Z..., en leur qualité de caution solidaire de M. Serge X..., à payer, en deniers ou quittances, la somme de 594 086,30 francs, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 30 octobre 1992, celle de 475 766,85 francs, ainsi que la somme de 132 359,91 francs, avec intérêts conventionnels sur celle de 79 170 francs, à compter du 30 octobre 1992 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la somme précitée de 475 766,85 francs n'était pas comprise dans le décompte de la dette principale et qu'en conséquence, les condamnations des cautions excédaient le montant de cette dette, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il n'a pas accueilli la demande de déchéance des intérêts présentée par les cautions sur le fondement de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 et en ce qu'il a condamné celles-ci à payer la somme de 475 766,85 francs à la CRCAM, l'arrêt rendu le 7 novembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.