CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 1er avril 1996, qui, pour non-représentation d'enfant, l'a condamnée à 10 mois d'emprisonnement dont 6 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant 2 ans, a prononcé à son encontre la privation de certains des droits énumérés à l'article 131-26 du Code pénal, pendant 2 ans, et a statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 410, 411, 592 et 593 du Code de procédure pénale, 6, paragraphe 1, et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué a été rendu de façon réputée contradictoire hors la présence de la prévenue et de son avocat ;
" aux motifs que la prévenue ne s'est pas présentée à l'audience, que son avocat a sollicité le renvoi de l'affaire à une date ultérieure au motif qu'elle devait plaider ce même jour devant le tribunal de grande instance d'Auxerre ; que les avocats des parties civiles se sont opposés au renvoi ; que le ministère public a fait ressortir le caractère dilatoire de la demande de renvoi et s'y est fermement opposé ; que la Cour, après en avoir délibéré, a retenu l'affaire ;
" alors que tout prévenu a droit à avoir l'assistance d'un défenseur de son choix ; qu'en l'espèce, dès lors que le conseil de X..., impérativement mandaté par celle-ci pour plaider personnellement son dossier, demandait le renvoi de l'affaire en raison de sa propre indisponibilité, par une lettre parvenue dans un délai raisonnable avant l'ouverture des débats et accompagnée de pièces justificatives, la cour d'appel ne pouvait passer outre cette demande de renvoi sans justifier du moindre motif ; qu'en statuant, néanmoins, de la sorte l'arrêt attaqué a méconnu les textes et principes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que X..., prévenue de non-représentation d'enfant, a été citée à comparaître devant la cour d'appel par acte délivré en mairie et qu'elle a signé l'avis de réception prévu à l'article 558 du Code de procédure pénale ; qu'elle n'a pas comparu, son avocat s'étant borné à demander, par lettre, le renvoi de l'affaire ;
Attendu qu'en cet état c'est à bon droit que la cour d'appel, après avoir recueilli les observations de toutes les parties présentes, passant outre à cette demande de renvoi qui ne pouvait valoir excuse au sens de l'article 410 du Code de procédure pénale, a statué contradictoirement en application de ce texte ;
Qu'en effet, selon cet article, qui n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme lequel ne confère pas à la personne poursuivie la faculté de s'abstenir de comparaître en justice , le prévenu, régulièrement cité, qui ne comparaît pas et ne fournit aucune excuse personnelle reconnue valable doit être jugé contradictoirement, en son absence, par décision à signifier ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 23 de la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie, 133-11 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que les premiers juges ont fait état, dans le jugement du 13 février 1996, confirmé par l'arrêt attaqué rendu le 1er avril 1996 par la cour d'appel de Riom, des arrêts de la même Cour, en date des 4 juillet 1994 et 9 janvier 1995, qui avaient déclaré X... coupable des faits de non-représentation d'enfant et l'avaient condamnée à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis, laquelle condamnation se trouve amnistiée en application de l'article 7.3° de la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
" alors que l'article 133-11 du Code pénal interdit à toute personne qui, dans l'exercice de ses fonctions, a connaissance de condamnations pénales d'en rappeler l'existence sous quelque forme que ce soit ; qu'en l'espèce l'arrêt attaqué, qui confirme les motifs par lesquels les premiers juges ont, notamment, rappelé l'existence d'une condamnation amnistiée, devra être annulé " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, si les dispositions de l'article 23 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, qui interdisent le rappel d'une condamnation amnistiée, ne prévoient pas la nullité de l'acte contenant la mention prohibée, l'annulation doit cependant être prononcée lorsqu'il résulte des motifs d'une décision que la prise en considération de la condamnation amnistiée a influé sur l'appréciation de la peine sanctionnant la nouvelle infraction poursuivie ;
Attendu que les juges du second degré, avant de prononcer une peine en partie privative de liberté, relèvent, par motifs adoptés, notamment que X... a déjà été condamnée par un arrêt du 9 janvier 1995 pour non-représentation d'enfant, ce qui dénote de sa part un refus manifeste d'exécuter les décisions judiciaires ;
Mais attendu que les pièces de la procédure mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la condamnation rappelée est amnistiée par application de la loi du 3 août 1995 ; qu'en se déterminant pour le prononcé de la peine en fonction d'un élément que la loi lui fait interdiction de prendre en considération la cour d'appel a méconnu les principes et les textes susvisés ;
Que, dès lors, la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 1er avril 1996, et, pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon.