Vu leur connexité, joint le pourvoi n° 94-15.084 et le pourvoi n° 95-11.737 qui attaquent le même arrêt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 14 avril 1994), qu'au cours des opérations de la liquidation judiciaire des époux Bonnet qui avaient pris à bail rural des terres appartenant à M. Y..., le juge-commissaire a ordonné, sur le fondement de l'article 155 de la loi du 25 janvier 1985, la cession à l'association Les Cavaliers de la Cour du bois d'une unité de production comprenant le droit à ce bail rural ; que M. Y..., à qui la décision ordonnant la cession n'avait pas été notifiée, a formé à son encontre un recours que le Tribunal a déclaré irrecevable pour avoir été exercé plus de 8 jours après le dépôt de l'ordonnance au greffe ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° 95-11.737 :
Attendu que M. A..., pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'association cessionnaire, reproche à l'arrêt, qui a dit l'appel du bailleur recevable en raison de l'excès de pouvoir des premiers juges, d'avoir statué sur le fond alors, selon le pourvoi, que si la cour d'appel peut, nonobstant les dispositions de l'article 173.2 de la loi du 25 janvier 1985, prononcer la nullité pour excès de pouvoir d'un jugement affecté d'un vice grave, elle ne saurait en revanche, sans commettre elle-même un excès de pouvoir, statuer ensuite au fond dès lors qu'en la matière les jugements ne sont pas susceptibles d'appel ; que, dès lors, en se prononçant elle-même, après avoir déclaré l'appel recevable en raison de l'excès de pouvoir des premiers juges, sur la demande soumise à ceux-ci, la cour d'appel a violé l'article 173 de ladite loi ;
Mais attendu que si la recevabilité de l'appel-nullité est conditionnée par l'existence de griefs autonomes tels l'excès de pouvoir ou la violation d'un principe fondamental de procédure, son effet dévolutif s'opère pour le tout en application de l'article 562, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel ayant dès lors l'obligation, après avoir annulé la décision entreprise, de statuer au fond ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi n° 94-15.084, pris en ses trois branches et le second moyen du pourvoi n° 95-11.737, qui sont rédigés en termes semblables, réunis :
Attendu que M. A... et Mme Z..., celle-ci en sa qualité de liquidateur judiciaire des époux X..., reprochent à l'arrêt d'avoir dit que la cession du bail rural était impossible alors, selon les pourvois, d'une part, que, dès lors que le texte vise toute unité de production, sans exclure celles comportant un bail rural, les juges du fond, qui ont assorti le texte d'une restriction qu'il ne comporte pas, ont violé l'article 155 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, que l'article L. 411-35 du Code rural, qui concerne la convention passée entre le locataire et un tiers, en vue de la cession du bail, est étranger à la cession par le liquidateur (et non le locataire) d'une unité de production (et non d'un bail rural), peu important que l'unité de production comporte elle-même un bail rural ; qu'en statuant comme ils ont fait, les juges du fond ont violé, par fausse application, l'article L. 411-35 du Code rural ; alors, en outre, que non seulement l'article 82 de la loi du 25 janvier 1985 ne concerne pas la liquidation judiciaire, mais, bien plus, il n'a trait qu'à l'hypothèse où l'ensemble cédé est constitué pour l'essentiel par un bail rural ; qu'à ce double point de vue, l'arrêt a violé, par fausse application l'article 82 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, enfin, que l'article 155 de la loi du 25 janvier 1985 qui prévoit la cession globale d'unités de productions, sans distinguer selon l'activité de celles-ci, institue des modalités de cession obéissant à des règles propres édictées en vue du maintien de l'activité et de l'emploi par des dispositions d'ordre public ; qu'en opposant à une telle cession d'une unité de production rurale la prohibition formulée par l'article L. 411-35 du Code rural, de la cession d'un bail rural au profit d'un tiers, à laquelle les dispositions de l'article 155 de la loi du 25 janvier 1985 permettent nécessairement qu'il soit dérogé dans l'intérêt de l'ordre public, la cour d'appel a violé celles-ci ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé que si, dans les conditions et suivant les modalités prévues à l'article 82, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, il est possible de céder un bail rural en vue du redressement de l'entreprise par la voie d'un plan de cession, cette faculté est exclue au cours des opérations de liquidation judiciaire, fût-ce à l'occasion de la cession globale d'une unité de production, dès lors que, dans ce cas, les contrats ne peuvent être cédés qu'aux conditions qui leur sont applicables et qu'il n'existe aucune dérogation aux dispositions d'ordre public de l'article L. 411-35 du Code rural qui interdisent la cession d'un bail rural ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.