AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Chabrie Isolation, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 20 février 1996 par la cour d'appel de Montpellier (1re Chambre civile, Section A), au profit :
1°/ des Mutuelles du Mans, société anonyme, dont le siège est ...,
2°/ de la Compagnie UAP, société anonyme, dont le siège est ...,
3°/ de la société CEGF Ingenierie, dont le siège est ...,
4°/ de la société X... France, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., défenderesses à la cassation ;
l'Union des assurances de Paris et la société CEGF Ingenierie ont formé, par un mémoire déposé au greffe le 28 novembre 1996, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 juillet 1998, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Fromont, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Villien, Cachelot, Martin, conseillers, M. Nivôse, Mmes Masson-Daum, Boulanger, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Fromont, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat de la société Chabrie isolation, de la SCP Boré et Xavier, avocat des Mutuelles du Mans, de Me Odent, avocat de l'UAP et de la société CEGF Ingenierie, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société X... France, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Met hors de cause la société X... France ;
Sur le premier et le second moyens du pourvoi principal, réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'ayant, au vu des éléments soumis à son examen, retenu que la société Chabrie Isolation avait effectué des travaux de reprise des peintures défectueuses, que l'essentiel des désordres provenaient des conditions anormales d'hygrométrie lors de la mise en oeuvre, que l'exécution des travaux effectués par cette société était à l'origine des dommages ainsi que le manquement du maître d'oeuvre à son obligation de direction et de contrôle des travaux, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches ni de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, appréciant souverainement le montant du préjudice, les modalités de sa réparation et la part incombant à chacun des locateurs d'ouvrage, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que la société CEGF Ingenierie, (société CEGF) investie d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, avait manqué à son obligation de direction et de contrôle des travaux, qu'elle se devait notamment de réceptionner les "subjectiles" avant application du revêtement et retenu que ce maître d'oeuvre avait commis des fautes engageant sa responsabilité pour le dommage résultant des désordres constatés, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le second moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 20 février 1996), que la société Spanghero, maître de l'ouvrage, assurée en police dommages ouvrage auprès de la Compagnie les Mutuelles du Mans, a, sous la maîtrise d'oeuvre de la société CEGF, assurée par la Compagnie Union des assurances de Paris (UAP) fait procéder à l'extension de ses bâtiments industriels;
que, pour la réalisation de l'isolation et des menuiseries isothermiques, il a été fait appel à la société Meyre à laquelle a succédé la société Chabrie Isolation, les produits utilisés étant fournis par la société X... France;
que des désordres étant apparus, une expertise a été ordonnée par le juge des référés qui a condamné la Compagnie les Mutuelles du Mans à verser une somme au maître de l'ouvrage;
que subrogée dans les droits de son assurée, cette compagnie a assigné en remboursement de cette somme les sociétés Chabrie Isolation, X... France, la société CEGF et la compagnie UAP . Attendu que, l'arrêt qui condamne in solidum la société CEGF, la compagnie UAP et la société Chabrie Isolation, cette dernière jusqu'à concurrence du tiers, à payer à la société les Mutuelles du Mans la somme de 703 922,62 francs décide que dans les rapports entre d'une part la société Chabrie Isolation et d'autre part, la société CEGF Ingenierie et l'UAP, il y a lieu, pour le tiers du préjudice auquel la société Chabrie Isolation est tenue in solidum avec la société CEGF et l'UAP, à partage de responsabilité dans la proportion des trois quarts à la charge de la société CEGF et de l'UAP ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu dans les motifs de l'arrêt que la responsabilité devait être partagée dans la proportion des trois quarts à la charge de la société Chabrie Isolation et d'un quart à celle de la société CEGF et de la compagnie UAP, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a procédé au partage de responsabilité de la somme de 703 922,62 francs entre, d'une part, la société Chabrie Isolation et, d'autre part, la société CEGF Ingenierie et la compagnie UAP, l'arrêt rendu le 20 février 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne, ensemble, les Mutuelles du Mans et la société Chabrie Isolation, aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des Mutuelles du Mans et de la société X... France ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.