CASSATION sur le pourvoi formé par :
- Y... Abdelouahab,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, du 4 septembre 1996, qui, pour complicité de tentative d'importation de stupéfiants et infractions douanières, l'a condamné à 4 ans d'emprisonnement avec maintien en détention, 5 ans d'interdiction du territoire national et à une amende douanière.
LA COUR,
Sur la recevabilité du pourvoi formé par l'avocat de Abdelouahab Y... :
Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait régulièrement fait le 5 septembre 1996 à la maison d'arrêt, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir, par avocat, le lendemain, contre la même décision ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur le pourvoi formé le 6 septembre 1996 ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 689 du Code de procédure pénale, 113-2 du nouveau Code pénal, 485, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la décision attaquée a déclaré les juridictions françaises compétentes ;
" aux motifs que l'article 113-2 du Code pénal dispose : "la loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République ; l'infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire" ; qu'Abdelouahab Y... est prévenu de complicité de tentative d'importation de 86,6 kg de résine de cannabis ; qu'ainsi que l'a justement relevé le tribunal, les actes de complicité accomplis par le prévenu ont été réalisés sur le territoire national : préparation du transport de la drogue du Maroc jusqu'en France, recrutement des passeurs, location du véhicule, achat de billets de bateau ; qu'en outre le but de la tentative d'importation était l'acheminement de la drogue en France ; qu'il en résulte que l'un au moins des faits constitutifs de l'infraction ayant eu lieu sur le territoire de la République française, la loi pénale française est applicable ;
" alors que la loi française n'est pas applicable aux faits de complicité commis en France d'un délit commis à l'étranger sauf cas où l'infraction est réprimée par la loi française et la loi étrangère et qu'elle a été constatée par une décision définitive de la juridiction française ; qu'en l'espèce actuelle, il résulte des constatations de fait de la décision attaquée que l'ensemble des actes commis par Mohamed X... dont Abdelouahab Y... a été déclaré complice ont été commis soit au Maroc soit en Espagne, que les juges du fond n'ont constaté ni la concordance des législations françaises, espagnoles et marocaines, ni la condamnation de Mohamed X... par une juridiction étrangère ; qu'il résulte en outre des constatations des premiers juges expressément adoptées par la Cour que l'objet du voyage de Mohamed X... et Abdelouahab Y... était l'introduction de drogues en Belgique (du Maroc à Bruxelles) ; que la Cour ne pouvait donc justifier subsidiairement la compétence française par motif du reste inopérant que le but de la tentative d'importation était l'acheminement de la drogue en France " ;
Vu l'article 113-5 du Code pénal ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, la loi française est applicable à quiconque s'est rendu coupable sur le territoire de la République, comme complice, d'un crime ou d'un délit commis à l'étranger si le crime ou le délit est puni à la fois par la loi française et par la loi étrangère et s'il a été constaté par une décision définitive de la juridiction étrangère ;
Attendu que, pour condamner Abdelouahab Y... des chefs de complicité de tentative d'importation non autorisée de stupéfiants et intéressement à la fraude, la cour d'appel, saisie d'une exception d'incompétence et faisant application des dispositions de l'article 113-2 du Code pénal, énonce, notamment, que les actes de complicité accomplis par le prévenu ont été réalisés sur le territoire national : préparation du transport de la drogue du Maroc jusqu'en France, recrutement des passeurs, location du véhicule, achats de billets de bateau ;
Qu'elle en déduit l'applicabilité de la loi pénale française, " l'un, au moins, des faits constitutifs de l'infraction ayant eu lieu sur le territoire de la République " ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'auteur principal avait agi à l'étranger et sans rechercher si les conditions exigées par l'article 113-5 du Code pénal étaient réunies ou si les faits n'étaient pas susceptibles d'une autre qualification, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 4 septembre 1996, et, pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Colmar.