AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / l'AGS, dont le siège est ...,
2 / l'ASSEDIC de Haute-Normandie, dont le siège est BP 2053 X, 76040 Rouen cedex,
3 / l'UNEDIC, gestionnaire de l'AGS, dont le siège est Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) de Haute-Normandie, ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 10 septembre 1996 par la cour d'appel de Rouen (Chambre sociale), au profit :
1 / de M. Jean-Pierre Z..., demeurant 4, square G Braque, Le Haut Bourg, 76770 Malaunay,
2 / de la Société électrique mécanique tuyauterie et instrumentation "SEMTI", dont le siège est ...,
3 / de M. Y..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la société à responsabilité limitée SEMTI, demeurant ...,
4 / de M. X..., ès qualités de représentant des créanciers de la SARL SEMTI, demeurant ...
défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 mars 1999, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Chagny, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Boubli, Ransac, Bouret, conseillers, M. Frouin, Mmes Barberot, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, MM. Rouquayrol de Boisse, Funck-Brentano, Leblanc, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chagny, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS, de l'ASSEDIC de Haute-Normandie et de l'UNEDIC, de la SCP Ghestin, avocat de M. Z..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que le conseil de prud'hommes de Rouen a condamné la société SEMTI à verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à M. Z..., son ancien salarié, par jugement rendu le 19 janvier 1994 ; que la procédure de redressement judicaire de la société précitée a été ouverte le 15 février 1994 ; que M. Z... a alors demandé à la juridiction prud'homale d'ordonner à l'AGS de garantir le paiement de sa créance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'AGS, l'ASSEDIC de Haute-Normandie et l'UNEDIC font grief à l'arrêt attaqué (Rouen, 10 septembre 1996) d'avoir fixé le montant de la garantie à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions à l'assurance chômage, alors, selon le moyen, que la garantie de l'AGS est due dans la limite du plafond treize lorsque les créances résultent de la loi, du règlement ou de la convention collective et dans la limite du plafond quatre dans les autres cas ; qu'en décidant que relevaient du plafond treize les dommages-intérêts alloués au salarié, avec intérêts au taux légal, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au motif qu'ils ne résultaient pas d'un salaire librement débattu entre les parties, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 143-11-8 et D. 143-2 du Code du travail en ajoutant une condition qu'elles ne contiennent pas ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article D 143-2, alinéa 1er, du Code du travail, le montant maximum de la garantie prévue à l'article L 143-11-8 du même Code est fixée à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions à l'assurance chômage lorsque les créances résultent de dispositions législatives ou réglementaires ou des stipulations d'une convention collective et sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire ; qu'au sens de ce texte, les créances résultant de dispositions législatives ou réglementaires ou conventionnelles sont celles qui trouvent leur fondement dans une loi, un règlement ou une convention collective, peu important que leur montant ne soit pas lui-même fixé par l'une de ces sources de droit ; que la rémunération du salarié, contrepartie de son travail, entre dans les prévisions de l'article D. 143-2, alinéa 1er, du Code du travail même lorsque son montant est fixé par l'accord des parties ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que la créance du salarié, constituée d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par la loi, était garantie par le plafond treize ;
Et sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir décidé que le plafond applicable devait être apprécié à la date du jugement du conseil de prud'hommes fixant le montant de la créance, alors, selon le moyen, que le plafond mensuel retenu pour le calcul de la contribution au régime de l'assurance chômage qui sert de référence pour fixer le montant maximum de la garantie de l'AGS s'apprécie à la date à laquelle est due la créance du salarié et, au plus tard, à la date du jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire ;
qu'en décidant que le montant maximum de cette garantie devait s'apprécier à la date du jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire ; qu'en décidant que le montant maximum de cette garantie devait s'apprécier à la date à laquelle le conseil de prud'hommes a déclaré la créance exigible, la cour d'appel a violé l'article D. 143-2 du Code du travail ;
Mais attendu que les dommages-intérêts alloués en réparation du préjudice né de la rupture sans cause réelle et sérieuse du contrat de travail ne sont dus au salarié qu'à compter de la date à laquelle la décision judiciaire qui en arrête le principe et en fixe le montant est exécutoire ; que la cour d'appel, qui a relevé que le jugement ayant condamné l'employeur à verser au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse était assorti de l'exécution provisoire, a décidé à bon droit que le plafond applicable à la garantie due par l'AGS devait s'apprécier à la date de ce jugement ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'AGS, l'ASSEDIC de Haute-Normandie et l'UNEDIC aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.