REJET du pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, du 8 octobre 1997, qui, dans la procédure suivie sur sa plainte contre Y... pour pratiques anticoncurrentielles et infraction à la législation sur la transparence des activités économiques, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 3°, du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 25 et 28 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, de l'article 373 de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992, modifiée par la loi n° 93-913 du 15 juillet 1993, l'article 2 de la loi n° 95-884 du 3 août 1995, de l'article 575-3° du Code de procédure pénale, des articles 485 et 593 du même Code :
" en ce que la décision attaquée a refusé de mettre en cause la responsabilité de la société Z... et a déclaré amnistiés les faits accomplis pour son compte par son président-directeur général Y... ;
" aux motifs qu'aux termes de l'information, le juge d'instruction a considéré qu'Y..., président-directeur général de la société Z... avait violé les dispositions de la loi du 29 janvier 1993, qu'il a toutefois considéré que la seule peine encourue étant une peine d'amende, l'amnistie du 18 mai 1995 devait s'appliquer et que, par ailleurs, les faits concernant essentiellement l'année 1993, les dispositions du nouveau Code pénal relatives à la responsabilité pénale des personnes morales ne pouvaient s'appliquer ;
" et aux motifs propres qu'en l'espèce, il est constant que la société Z... est intervenue sur ce marché sans respecter les dispositions de la loi du 29 janvier 1993, mais que les faits dénoncés par la partie civile se sont déroulés entre le 1er avril 1993 et le 1er mars 1994 ; que d'une part, ces faits punis d'une peine d'amende par la loi du 29 janvier 1993 sont donc couverts par la loi d'amnistie ; que d'autre part, les nouvelles dispositions du Code pénal concernant la responsabilité des personnes morales étant entrées en application le 1er mars 1994, et les faits dénoncés étant antérieurs à ces nouvelles dispositions, la société Z... n'encourt aucune sanction ;
" alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 28 de la loi 93-122 du 28 janvier 1993 que les dispositions des 2 premiers chapitres du titre II de la loi prendront effet à compter du 31 mars 1993, à l'exception de certaines dispositions et notamment de celles concernant les personnes morales (2e alinéa du petit d du 3° de l'article 25), qui prendront effet à compter du 1er septembre 1993 ; que les personnes morales pouvaient donc, à compter du 1er septembre 1993, être déclarées responsables des infractions punies par l'article 25 1° de la loi, et en particulier le fait de ne pas rédiger de contrat écrit conforme aux dispositions des 2 premiers alinéas de l'article 20, peu important pour l'application du 2e alinéa du 3° de l'article 25 que celui-ci renvoie à l'article L. 121-2 du Code pénal, le 2e alinéa du d du 3° de l'article 25 ayant une vie autonome nonobstant la référence à l'article 121-2 du Code pénal ;
" alors, d'autre part, que le demandeur avait fait valoir que la plainte ayant été déposée le 7 juin 1994, celle-ci s'étendait nécessairement à l'ensemble des faits délictueux commis entre cette date et celle de l'entrée en vigueur de la loi Sapin ; qu'à supposer que nonobstant les termes de la loi Sapin les dispositions de cette loi relatives aux personnes morales ne soient entrées en vigueur que le 1er mars 1994, en même temps que le nouveau Code pénal, les juges ne pouvaient refuser d'appliquer les dispositions nouvelles par la simple affirmation que les faits dénoncés par la partie civile se sont déroulés entre le 1er avril 1993 et le 1er mars 1994, sans indiquer pourquoi les faits se situant entre le 1er avril 1994 et le 7 juin 1994, date à laquelle la plainte avait été déposée, ne faisaient pas partie de la prévention" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au mois de juin 1994, X..., qui exerce une activité de mandataire en matière d'achat d'espace publicitaire, dénonçant les agissements commerciaux de la société concurrente Z..., a porté plainte avec constitution de partie civile contre personne non dénommée du chef de pratiques anticoncurrentielles et d'infractions à la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ;
Qu'après qu'Y..., dirigeant de la société, eut été mis en examen notamment pour avoir, au cours de l'année 1993, en méconnaissance des articles 20 et 21 de la loi précitée, exercé une activité d'intermédiaire en publicité sans passer de contrat de mandat écrit et en recevant une rémunération ou avantage du vendeur, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu en constatant l'extinction de l'action publique de ce chef par l'effet de l'article 2 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Que la partie civile a relevé appel de la décision en faisant notamment valoir qu'au regard de la peine complémentaire encourue par la société, les infractions n'étaient pas amnistiées ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu, la chambre d'accusation retient que les faits poursuivis se sont produits entre le 1er avril 1993 et le 1er mars 1994 ; qu'ils sont punis à l'égard des personnes physiques d'une seule peine d'amende par l'article 25 de la loi du 29 janvier 1993 et sont dès lors amnistiés de plein droit ; qu'elle énonce qu'à la date des faits, la responsabilité pénale des personnes morales, instituée par le Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994, n'était pas applicable ; qu'elle en déduit qu'une telle responsabilité, de même que la peine complémentaire d'exclusion des marchés publics prévue à l'encontre des personnes morales par l'article 25, n'était pas encourue par la société Z... ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par une appréciation souveraine de la date des faits poursuivis, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
Qu'en effet, si la loi du 29 janvier 1993, en son article 28, fixe au 1er septembre 1993 la date d'entrée en vigueur du deuxième alinéa du d du 3° de l'article 25 prévoyant, par référence expresse aux articles 121-2 et 131-19 nouveaux du Code pénal, la responsabilité des personnes morales qui encourent en ce cas la peine d'exclusion des marchés publics, ces dispositions ne peuvent recevoir application avant le 1er mars 1994, date du report de l'entrée en vigueur du Code pénal initialement fixée au 1er septembre 1993 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.