IRRECEVABILITE du pourvoi formé par :
- la société X..., la société Y..., la société Z..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Angers, en date du 2 décembre 1998, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre Jacques A... du chef de publicité trompeuse, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
LA COUR,
Vu le mémoire en demande, commun aux demanderesses, et le mémoire en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 et suivants, ainsi que L. 213-1 et L. 213-2 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a décidé n'y avoir lieu à suivre sur la plainte avec offre de constitution de partie civile de sociétés fabriquant et exploitant des produits laitiers (les sociétés X..., SNC Y... et Z..., les demanderesses) du chef de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur contre une personne mise en examen (Jacques A...) ;
" aux motifs que si la durée de l'affinage était réglementée et fixée à 6 semaines "à compter de la fabrication", sa définition n'était, elle, pas posée et rien n'indiquait, contrairement aux affirmations des parties civiles, que les deux opérations se succédaient immédiatement ; qu'il était acquis que les fromages en cause, fabriqués à Malestroit dans le Morbihan, étaient au bout d'une dizaine de jours acheminés sur le site d'Annecy pour affinage en cave chaude et froide avant découpe et conditionnement ; qu'en l'espèce la durée minimum de l'affinage avait été respectée, les contrôles opérés tant par les enquêteurs que les inspecteurs de la direction départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes ayant démontré que les produits mis en découpe les 13 novembre 1996 et 3 avril 1997 avaient été fabriqués respectivement 7 semaines et 3 jours, ainsi que 8 semaines et 10 jours plus tôt ; que, dans les deux cas, la date à laquelle les meules avaient été acheminées en Haute-Savoie était restée inconnue mais la circonstance que l'usine de Malestroit n'était équipée que de caves de stockage dont la température n'excédait pas 4o à 6° accréditait l'idée que l'affinage proprement dit, qui s'analysait en une succession de régimes de températures compris entre 10° et 25°, n'avait commencé qu'à compter de ce transport ; qu'ainsi, les charges contre la personne mise en examen étaient insuffisantes et l'ordonnance de non-lieu devait être confirmée ;
" alors que, de première part, en admettant, d'un côté, que la durée de l'affinage de l'Emmental était réglementairement fixée à 6 semaines "à compter de la fabrication", tout en déclarant, de l'autre, que rien n'indiquait que l'opération d'affinage succédait immédiatement à sa fabrication, la chambre d'accusation s'est contredite ;
" alors que, en outre, en refusant de considérer comme mensongère la mention "affiné en Haute-Savoie" apposée par la société A... sur les emballages d'Emmental, après avoir admis que la durée de l'affinage était réglementairement fixée à 6 semaines "à compter de la fabrication" et constaté que les fromages en cause, fabriqués à Malestroit dans le Morbihan, n'avaient été acheminés vers Annecy qu'au bout d'une dizaine de jours après leur fabrication, ce dont il résultait que, contrairement à l'indication portée sur leurs emballages, ils avaient été affinés d'abord en Bretagne pendant 10 jours, non en totalité en Haute-Savoie où ils n'avaient été acheminés qu'à l'issue d'une période de 10 jours au moins, la chambre d'accusation s'est déterminée au mépris de ses propres énonciations sans en déduire les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement sur l'existence de l'infraction ;
" alors que, en tout état de cause, la chambre d'accusation n'a pas répondu au chef péremptoire du mémoire des demanderesses faisant valoir qu'il résultait des termes mêmes du décret n° 88-1206 du 30 décembre 1988 que, pour les fromages qu'il visait et au nombre desquels figurait l'Emmental, la durée de l'affinage était fixée à 6 semaines "à compter de la date de fabrication" et que l'apposition de la date en question sur la meule de fromage avant sa mise en saumure, ainsi que le prescrivait un décret du 18 mars 1982, permettait précisément de contrôler le respect de cette exigence, ce qui constituait la preuve que le processus d'affinage débutait immédiatement après la date de fabrication ;
" alors que, de deuxième part, la chambre d'accusation s'est bornée à affirmer que la définition de l'affinage n'était pas "posée", sans répondre au chef péremptoire du mémoire des demanderesses qui soutenaient que, pour l'ensemble des fromages au nombre desquels figurait l'Emmental, l'affinage était défini par un arrêté du 30 mars 1994 comme consistant dans "le maintien du fromage pendant un certain temps dans les conditions nécessaires pour que s'opèrent les changements biochimiques et physiques du fromage" et que, ainsi que l'avait expliqué un spécialiste, les changements en question qui consistaient en une perte d'humidité, une destruction du lactose, une neutralisation ou disparition partielle de l'acide lactique, une solubilisation partielle de la caséine avec modification de la texture, une hydrolyse limitée de la matière grasse et enfin une formation de la croûte commençaient à s'opérer dès la fabrication même quand le fromage était conservé à 6° ;
" alors que, de troisième part, en retenant que les contrôles de l'Administration effectués sur des produits mis en découpe les 13 novembre 1996 et 3 avril 1997 par la société A... établissaient que l'Emmental objet des poursuites aurait été affiné pendant au moins 6 semaines en Haute-Savoie, la chambre d'accusation s'est déterminée en contradiction avec ses propres énonciations desquelles il résultait que les produits contrôlés étaient étrangers à ceux visés par la plainte avec offre de constitution de partie civile, laquelle, déposée le 5 novembre 1996, n'avait pu porter que sur des faits antérieurs à celle-ci et ayant seuls saisi le juge ;
" alors que, enfin, la chambre d'accusation ne s'est pas davantage expliquée sur le chef du mémoire des demanderesses l'invitant à écarter les constatations opérées par les enquêteurs, qui ne faisaient qu'attester de l'évolution suivie par A... depuis le dépôt de la plainte mais ne remettaient pas en cause la preuve rapportée en l'espèce et qui résultait des propres déclarations des responsables de fabrication de la société A... que l'affinage des produits objet de la plainte n'avait duré que 28 à 35 jours et avait commencé en Bretagne " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 3 de la loi n° 84-1147 du 7 décembre 1984, L. 121-1 et suivants ainsi que L. 213-1 et L. 213-2 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a décidé n'y avoir lieu à suivre sur la plainte avec offre de constitution de partie civile de sociétés fabriquant et commercialisant des produits laitiers (les sociétés X..., Y... et Z..., les demanderesses) du chef de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur contre une personne mise en examen (Jacques A...) ;
" aux motifs que, s'agissant de la mention "Haute-Savoie", la question était régie par l'article 33 de la loi 85-30 du 9 janvier 1985 modifiée par l'article 6 de la loi 95-95 du 1er février 1995 qui indiquait que le "terme Montagne et les références géographiques spécifiques aux zones de montagnes ne (pouvaient) être utilisés que s'ils (avaient) fait l'objet d'une autorisation administrative", l'article 34 précisant qu'un décret en Conseil d'Etat en fixait les conditions ; qu'en 1997, lors de l'enquête, ce décret n'étant pas paru, il ne pouvait donc être fait grief à l'entreprise A... d'avoir utilisé l'appellation "Haute-Savoie" ; qu'ainsi les charges réunies contre le mis en examen étaient insuffisantes et l'ordonnance de non-lieu devait être confirmée ;
" alors que la chambre d'accusation n'a pas répondu au chef péremptoire du mémoire des demanderesses qui soutenaient que, selon la direction générale de l'Alimentation, les dispositions de la loi nouvelle devaient être comprises en ce sens que, dans l'attente de la publication de son décret d'application, aucune autorisation administrative d'utiliser une appellation "Montagne" ne pourrait être accordée et seuls ceux ayant régulièrement obtenu un tel agrément sous l'empire de la législation ancienne auraient le droit de porter une indication de provenance "Montagne" sur l'étiquetage de leurs produits, en sorte que, en utilisant l'appellation "Haute-Savoie" sur ses emballages d'Emmental bien qu'elle n'eût jamais justifié de la moindre autorisation à cette fin, la société A... avait agi sans droit et trompé le consommateur " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par les parties civiles appelantes, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que les demanderesses se bornent à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre d'accusation en l'absence de recours du ministère public ;
Que, dès lors, les moyens sont irrecevables et qu'en application du texte précité qui, contrairement à ce que soutiennent les demanderesses, n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, la victime disposant d'un recours devant les juridictions civiles pour faire valoir ses droits, il en est de même du pourvoi ;
Par ces motifs :
DÉCLARE le pourvoi IRRECEVABLE.