Sur le moyen unique :
Attendu que la société Instinet France, société de bourse fournissant des informations financières sur le monde entier, a engagé, le 9 juin 1993, M. X... ; que celui-ci avait pour activité de recevoir et de transmettre au téléphone des ordres d'achats en bourse ; qu'il a été licencié le 28 mars 1995 pour faute grave, au motif qu'il se livrait pendant le temps du travail, en utilisant le matériel à des jeux de hasard avec des tiers, tels que paris sur l'élection présidentielle et sur les matches de football ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 16 février 1998) d'avoir retenu que le licenciement reposait sur une faute grave, et de l'avoir débouté de ses demandes d'indemnité de rupture et de rappel de salaires, alors, selon le moyen, d'une part, que le mode de rémunération du salarié, constitue un élément essentiel de sorte que la cour d'appel, qui retient que la société Instinet France ne s'était engagée à maintenir son plan de commissionnement 1993, que jusqu'à la fin de cette même année et n'était pas tenue de maintenir celui-ci à partir de 1994, sans rechercher si la lettre du 9 juin 1993, qui stipule que " pour les cinq mois jusqu'au 31 décembre 1993, votre partie variable sera calculée selon les mêmes modalités qu'actuellement, cependant à partir du 1er janvier 1994, la direction se réserve le droit de définir d'autres bases pour l'année 1994 ", n'impliquait pas le maintien de la partie variable, a violé l'article L. 121-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui retient que M. X... avait donné son accord écrit le 24 janvier 1994 pour ne plus être commissionné sur les nouveaux clients des Pays-Bas, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la mention " je souhaite que vous preniez ces points en considération, en complément de la situation actuellement difficile de Paris... ", ne valait pas demande de contrepartie et donc accord sous réserve, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ; alors, de troisième part, que la cour d'appel ne pouvait laisser sans réponse les conclusions du salarié, faisant valoir que sa mutation par lettre du 28 février 1995, en qualité de " trader " constituait une modification substantielle de son contrat de travail et constituait la cause déterminante de son licenciement, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de quatrième part, que si les enregistrements des conversations téléphoniques des salariés, ne sont pas illicites à la condition d'avoir été portées à la connaissance des intéressés, en revanche, la cour d'appel, qui retient que M. X... avait été informé de cette pratique lors de la réunion du 24 juin 1994, bien que l'objet de cette réunion fut seulement d'informer les salariés d'écoutes téléphoniques des opérateurs, " pour permettre de justifier en cas de litige avec un client des ordres reçus ", et nullement d'informer les salariés de la mise sur écoute de leurs conversations personnelles, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 120-2 et L. 121-8 du Code du travail ; alors, de cinquième part, que l'utilisation d'écoutes, à d'autres fins que celles de se conformer aux directives boursières, constitue un détournement de finalité rendant illicite la pratique d'écoutes, de sorte que la cour d'appel a derechef violé les articles L. 120-2 et R. 121-8 du Code du travail ;
alors, enfin, que la prise de paris, à la supposer établie, par un salarié pendant ses heures de travail, avec des personnes extérieures à l'entreprise et non clientes de celle-ci, ne saurait constituer une faute rendant impossible le maintien du contrat pendant la durée limitée du préavis, de sorte que la cour d'appel, qui retient une activité illicite de prise de paris, pouvant entraîner la responsabilité civile de l'employeur, sans préciser en quoi la prise de paris avec des connaissances était illicite et moins encore, en quoi elle aurait pu engager la responsabilité de l'employeur, a violé l'article L. 122-6 du Code du travail ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, sans encourir les griefs énoncés dans les première et deuxième branches du moyen, a constaté qu'il n'existait aucun engagement de maintenir à partir de 1994 la partie variable du salaire au même niveau que celui atteint en 1993 et a relevé l'accord de M. X... sur l'abandon par lui de ses clients aux Pays-Bas ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'en écartant toute modification du contrat de travail, la cour d'appel a répondu aux conclusions qui prétendaient voir dans le licenciement une mesure de rétorsion aux protestations du salarié contre cette modification ;
Attendu, en troisième lieu, que l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de ses salariés pendant le temps du travail ; que seul l'emploi de procédé clandestin de surveillance est illicite ; que la cour d'appel, qui a relevé que les salariés avaient été dûment avertis de ce que leurs conversations téléphoniques seraient écoutées, a pu décider que les écoutes réalisées constituaient un mode de preuve valable ;
Et attendu, enfin, que la cour d'appel a pu décider qu'en se bornant régulièrement, pendant le temps de travail et avec le matériel de l'entreprise, à des prises de paris, le salarié avait commis une faute qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise pendant la période de préavis et justifiait son licenciement immédiat ;
D'où il suit qu'en aucune de ses branches le moyen n'est fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.