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23/05/2000 | FRANCE | N°97-10825

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 mai 2000, 97-10825


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Philippe X..., demeurant ...,

2 / la société civile immobilière (SCI) de Cayssac, dont le siège est ...,

3 / la société GSO 47, société à responsabilité limitée, dont le siège est RN 113, Petit Colayrac, 47550 Boé,

en cassation d'un arrêt rendu le 18 octobre 1996 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section C), au profit de la société Fiat auto France, société anonyme, dont l

e siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Philippe X..., demeurant ...,

2 / la société civile immobilière (SCI) de Cayssac, dont le siège est ...,

3 / la société GSO 47, société à responsabilité limitée, dont le siège est RN 113, Petit Colayrac, 47550 Boé,

en cassation d'un arrêt rendu le 18 octobre 1996 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section C), au profit de la société Fiat auto France, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 mars 2000, où étaient présents : M. Grimaldi, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Tric, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, M. Feuillard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Tric, conseiller, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. X..., de la société civile immobilière (SCI) de Cayssac et de la société GSO 47, de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Fiat auto France, les conclusions de M. Feuillard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 18 octobre 1996), que la société GSO 47, concessionnaire exclusif de la société Alfa Romeo pour le département du Lot-et-Garonne, a souscrit, le 2 janvier 1992, un contrat de concession avec la société Fiat auto qui avait absorbé la société Alfa Romeo ; que, lui reprochant une exécution déloyale du contrat, elle l'a assignée en résolution de celui-ci et en paiement de dommages-intérêts ; que la SCI de Cayssac, son bailleur, et M. X..., gérant des deux sociétés, ont demandé réparation du préjudice que cette résolution leur causait ;

Sur le premier moyen, pris en ses sept branches :

Attendu que M. X..., la société GSO 47 et la SCI de Cayssac reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté la demande en résolution du contrat de concession aux torts de la société Fiat auto et d'avoir en conséquence écarté les demandes en responsabilité présentées par la SCI et M. X... à titre personnel sur les manquements de la société Fiat auto à ses obligations contractuelles, invoquées par eux, en qualité de tiers au contrat, au titre de fautes délictuelles, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la résolution sanctionne l'atteinte que porte à l'équilibre du contrat l'inexécution de ses obligations contractuelles par une partie, pour quelque cause que ce soit, indépendamment de toute notion de faute ;

qu'en se référant à maintes reprises à la notion de faute pour écarter la demande en résolution du contrat formée par le concessionnaire, la cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ; alors, d'autre part, que le contrat de concession n'investit pas le concédant d'un pouvoir de décision unilatérale au cours de son exécution ; qu'en l'espèce, il ne pouvait donc être modifié que d'un commun accord ou donner lieu à résiliation à l'initiative de la société Fiat auto moyennant un préavis, en l'absence d'accord du concessionnaire ; qu'en admettant que l'évolution nécessaire de la politique commerciale pût tenir en échec la loi du contrat, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil par refus d'application ; alors, de troisième part, que le contrat de concession automobile n'échappe à l'interdiction communautaire des pratiques restrictives de concurrence que s'il repose sur une coopération loyale et confiante entre le constructeur et le distributeur dans l'intérêt du consommateur final ; qu'en reconnaissant au constructeur un pouvoir de décision unilatérale en matière de politique commerciale, la cour d'appel a donc violé l'esprit comme la lettre du règlement d'exemption n° 123/85 de la Commission du 12 décembre 1985, alors applicable ; alors, de quatrième part, que la cour d'appel a énoncé que le concessionnaire aurait retiré un bénéfice personnel de la politique commerciale qui lui était imposée sans répondre aux conclusions d'appel qui démontraient le contraire en soutenant qu'en violation de l'obligation de coopération loyale incombant aux parties, la société Fiat auto avait substitué à l'ancien système de primes Alfa Romeo un nouveau système de stimulation de ventes qui tendait à restreindre les possibilités de percevoir des primes d'objectifs tandis qu'elle imposait dans le même temps des conditions de règlement des véhicules plus onéreuses entraînant des difficultés de trésorerie permanentes pour le concessionnaire ; que la cour d'appel a dès lors violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de cinquième part, qu'en imputant au concessionnaire la perte d'un contrat de fourniture en buy-back de cinquante véhicules avec la société Locaser au lieu de rechercher si, au contraire, le refus de coopérer loyalement à cette opération de la société Fiat auto avait porté une atteinte suffisamment grave à l'équilibre du contrat, de nature à justifier sa résolution aux torts de la concédante, ainsi que l'y invitait le concessionnaire en soutenant que la société Fiat auto avait refusé de s'engager à lui faciliter l'écoulement des cinquante véhicules à reprendre après leur période d'utilisation par

la société Locaser, par l'intermédiaire de son centre national de véhicules d'occasion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil ; alors, de sixième part, que les tiers peuvent réclamer réparation de leur préjudice au cocontractant qui n'a pas exécuté ses obligations ; que la cassation de la disposition qui a écarté la résolution du contrat aux torts de la société Fiat auto entraînera la cassation par voie de conséquence de la disposition indivisible écartant les demandes en responsabilité formées par la SCI de Cayssac et M. X... à titre personnel sur le fondement des manquements contractuels de la société Fiat auto, conformément à l'article 624 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que les dispositions du contrat relatives aux moyens matériels apportés par le concessionnaire mentionnaient les locaux issus des investissements réalisés par GSO 47 et la SCI, ce qui établissait qu'ils constituaient un élément en considération duquel les parties, et notamment la société Fiat auto, avaient conclu le contrat de concession litigieux ; que, dès lors, en énonçant que les investissements réalisés par GSO 47 et la SCI auraient été disproportionnés au regard des obligations mises à la charge de GSO 47 par le contrat, la cour d'appel a dénaturé les dispositions contractuelles susvisées par omission en violation de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que les demandeurs au pourvoi, qui invoquaient devant la cour d'appel le comportement fautif de la société Fiat auto et ne se prévalaient pas du règlement d'exemption n° 123/85 de la Commission du 12 décembre 1985, ne peuvent soutenir devant la Cour de Cassation un moyen incompatible avec leur position devant la cour d'appel, ni un moyen nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel n'a relevé aucune modification unilatérale du contrat de concession ;

Attendu, en troisième lieu, que l'arrêt relève d'abord souverainement que la société GSO 47 a bénéficié des primes accordées et aurait pu bénéficier de l'attribution de surprimes pour la réalisation d'objectifs commerciaux ; qu'il retient ensuite que la société Fiat auto a sensiblement augmenté le budget de publicité de la marque Alfa Romeo, répondant ainsi aux conclusions prétendument délaissées ; qu'il constate de même qu'il ressort d'une lettre du 21 juillet 1992 de la société GSO 47 que c'est celle-ci, dans l'incapacité de financer l'opération pourtant acquise de la fourniture de cinquante véhicules à la société Locaser, qui a manifesté son désir "de ne pas réaliser l'affaire" et demandé la reprise des véhicules ; qu'ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la septième branche, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses première et troisième branches, ne peut être accueilli pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que la société GSO 47, M. X... et la SCI de Cayssac reprochent encore à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation du contrat aux torts de la société concessionnaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en prononçant la résiliation du contrat aux torts de la société GSO 47 à la date du 5 juillet 1993 en l'absence de toute demande reconventionnelle, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et, par là-même, violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

alors, d'autre part, qu'en retenant à la charge de la société concessionnaire une prétendue insuffisance de résultats et un excès prétendu d'investissements afférents à une période antérieure à l'entrée en vigueur du contrat -1er janvier 1992- et donc étrangère à son exécution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil par refus d'application ; alors, ensuite, qu'en retenant à la charge de la société GSO 47 une insuffisance de résultats en 1992, sans rechercher si elle était due au manquement de la société Fiat auto à son obligation de coopération loyale à l'opération de buy-back qui aurait dû permettre à la concessionnaire de réaliser un nombre de ventes satisfaisant pour l'année entière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du Code civil ; et alors, enfin, que l'inexécution par une partie de ses obligations autorise l'autre à ne pas exécuter les siennes ; qu'en retenant à la charge de la société GSO 47 l'absence d'achat de nouveau véhicules "dans l'intérêt commun des parties" en 1993, postérieurement à l'introduction de la procédure en résolution du contrat fondée sur la violation par Fiat de ses obligations contractuelles (janvier 1993) et d'avoir, par là-même, méconnu la règle non adimpleti contractus ;

Mais attendu que l'arrêt relève d'abord que la société GSO 47, qui n'est jamais parvenue à remplir ses engagements de vente, a pratiquement cessé, à compter de septembre 1992 et jusqu'en juillet 1993, la vente de tout véhicule, et ce aux seules fins d'apurer sa dette envers le fournisseur, mais sans exécution du mandat d'intérêt commun qui les liait, préférant, comme reconnu en ses écritures de première instance, "se désengager progressivement" ; qu'il constate ensuite qu'elle a préféré réaliser avec la SCI de Cayssac de lourds investissements immobiliers dont l'ampleur et le coût restent sans rapport établi avec ses obligations nées du contrat de concession ; que c'est sans méconnaître l'objet du litige, ni violer les articles 1134 et 1184 du Code civil que la cour d'appel, devant laquelle l'exception d'inexécution n'était pas soulevée, a estimé que la résiliation notifiée par la société Fiat auto était justifiée ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X..., la société GSO 47 et la SCI de Cayssac reprochent enfin à l'arrêt d'avoir rejeté la demande en annulation du contrat de concession, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la fusion de deux sociétés par absorption de l'une d'elles par l'autre n'entraîne pas de plein droit le transfert des contrats en cours de la société absorbée à la société absorbante, sauf s'il s'agit d'un contrat de travail ; que la cour d'appel a elle-même constaté que les parties avaient conclu, en mai 1992, un contrat prenant effet au 1er janvier 1992 ; que, dès lors, en énonçant qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau contrat, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que, s'agissant d'un nouveau contrat, par lequel la société Fiat mettait à la disposition de la société GSO 47 la marque Alfa Romeo, recueillie dans le patrimoine de la société de même nom qu'elle venait d'absorber, en contrepartie d'un engagement de distribution exclusive dans le cadre d'un réseau de concession considérablement élargi -le réseau Fiat-Alfa Romeo-Lancia-, la concédante avait l'obligation précontractuelle d'informer le concessionnaire sur "l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise", "l'état et les perspectives du marché concerné", "l'importance du réseau d'exploitants", soit concrètement, des perspectives de développement de ce réseau élargi dans le contexte du marché de l'automobile de l'époque ainsi que des modalités de sa nécessaire restructuration selon des critères objectifs, de nature à lui permettre, selon l'expression de la loi, de "s'engager en connaissance de cause" ; qu'en écartant cette obligation, la cour d'appel a violé les dispositions d'ordre public de la loi Doubin du 31 décembre 1989 et de son décret d'application du 4 avril 1991 ; et alors, enfin, qu'en déclarant satisfaisants les seuls éléments d'information fournis par la société Fiat en cours de contrat, la cour d'appel a derechef violé les dispositions d'ordre public du décret du 4 avril 1991 ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève d'abord que lors de la signature du contrat en mai 1992 avec effet au 2 janvier 1992, la société GSO 47 était depuis janvier 1990 concessionnaire de la marque Alfa Romeo à Agen ; qu'il constate ensuite que le contrat avait le même objet que le précédant et tenait seulement compte de la modification de la situation juridique ayant affecté les sociétés absorbante et absorbée ; qu'il retient enfin que la signature de cet acte était restée limitée, voire sans effet, quant à la mise à disposition d'un nom commercial, d'une marque ou d'une enseigne et d'une exclusivité ou d'une quasi-exclusivité pour l'exercice d'une activité, tous éléments dont la mise à disposition entraîne l'obligation de fourniture du document prévu par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989 ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, qu'en l'absence de nouvelle convention, la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation du contrat sans violer les textes invoqués ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X..., la SCI de Cayssac et la société GSO 47 aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société GSO 47, M. X... et la SCI de Cayssac à payer à la société Fiat auto la somme de 12 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Tricot, conseiller le plus ancien qui en a délibéré, en remplacement du président, en l'audience publique du vingt-trois mai deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97-10825
Date de la décision : 23/05/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (5e chambre, section C), 18 octobre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 mai. 2000, pourvoi n°97-10825


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GRIMALDI conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:97.10825
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