AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Vulkan Lokring GMBH et CO. KG, société en commandite de droit allemand, dont le siège est Heerstrabe 66 - D44653 Herne (Allemagne),
en cassation d'un arrêt rendu le 3 octobre 1996 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre civile 1ère section), au profit de la société Transflex, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 mai 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, MM. Leclercq, Poullain, Métivet, Mmes Garnier, Collomp, conseillers, Mme Mouillard, M. Boinot, Mmes Champalaune, Gueguen, M. Delmotte, conseillers référendaires, M. Lafortune, avocat général, M. Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la société Vulkan Lokring GMBH et CO.KG, de Me Roger, avocat de la société Transflex, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transflex a assigné le 7 février 1994 devant le tribunal de commerce de Versailles la société de droit allemand Vulkan Lokring en prétendant être bénéficiaire d'un contrat de distribution en France des produits de cette dernière et en lui reprochant la rupture de ce contrat ; que la société Vulkan Lokring a soulevé l'incompétence des juridictions françaises ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 5, paragraphe 1, de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ;
Attendu que, pour retenir la compétence du tribunal de commerce de Versailles sur le fondement de l'article 5 paragraphe 1 de la convention susvisée, l'arrêt retient qu'il résulte de différents documents commerciaux que, depuis plusieurs années, la société Transflex est en rapports commerciaux avec la société Vulkan Lokring ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher quelle était l'obligation servant de base à la demande, ni le lieu où cette obligation avait été ou devait être exécutée conformément à la loi qui régit l'obligation litigieuse selon les règles de conflit applicables, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 5 paragraphe 5 de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ;
Attendu que, pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel retient encore que la société Vulkan France, dont le siège est dans le département des Yvelines, est la succursale de la société Vulkan Lokring en France et est intervenue en son nom dans les relations commerciales avec la société Transflex, notamment pour l'exécution de commandes ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'article 5 paragraphe 5 de la convention susvisée n'institue un chef de compétence que pour les contestations relatives à l'exploitation de la succursale et qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (Somafer, 22 novembre 1978) que la notion d'exploitation comprend les litiges portant sur les droits et obligations relatifs à la gestion proprement dite de la succursale et les litiges relatifs aux engagements pris par elle au nom de la maison mère, ainsi que les litiges relatifs aux obligations non contractuelles qui trouveraient leur origine dans les activités de la succursale, et alors qu'elle constatait que la demande de la société Transflex était fondée sur la rupture d'un contrat de distribution qui l'aurait liée à la société Vulkan Lokring, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Transflex aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille.