Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 98-30.366, 98-30.367, 98-30.368, 98-30.369, 98-30.370, 98-30.371 et 98-30.372 qui attaquent la même ordonnance et font état de moyens identiques ;
Sur le moyen unique des sept pourvois réunis, pris en leurs quatre branches :
Attendu que, par ordonnance du 21 juillet 1998, le président du tribunal de grande instance de Paris a, en vertu de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l'administration des Impôts à effectuer une visite et une saisie de documents aux sièges sociaux des sociétés SA BGC Consultant group consultant, SARL BGC participations et EURL Bernard Z... loisirs situés ... (16e), dans les locaux professionnels de la SA Créations Michel X... situés ... (2e), au domicile de M. Z... et/ou Mme Y... et dans les locaux professionnels présumés de l'activité professionnelle individuelle de M. Z... situés ... (8e et enfin aux sièges sociaux des sociétés SARL BGC Invest, SA Créations Michel X... et SARL Caroline de Brugghe, situés dans les locaux de la société Madeleine prestige plus, domiciliataire, 4-16, place de La Madeleine, à Paris (8e), en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de M. Z..., de la société luxembourgeoise SA BGH Business group Hermes, de la société luxembourgeoise SA BGE Business group eurofinance, de la société luxembourgeoise SA BGF Business group funding, de la société monégasque SA SAM CDC Centralisation développement et coordination, de la société BGC Business group consultant, de la SARL BGC Invest, de la SARL BGC participations - BGC P, de l'EURL BGL Bernard Z... loisirs, de la SA Créations Michel X..., de la SARL Caroline de Brugghe, de la SA Nelson consulting, de la SA Strategy holding, de la SA PME stratégie, de la SARL SMB Sport management Bertrand, de la SARL BGC Caraïbes, de la SARL BGC Océan Indien HC, et de la SNC Fortuna beach hôtel, au titre de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu (catégorie bénéfices industriels et commerciaux) et de la taxe à la valeur ajoutée ;
Attendu que M. Z..., la société BGC Business group consultant, la SARL BGC participations, l'EURL BGL Bernard Z... loisirs, la SARL BGC invest, la SA Créations Michel X... et la SARL Caroline de Brugghe font grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visite et saisie litigieuses alors, selon les pourvois, d'une part, que le juge qui autorise l'administration des Impôts, sur le fondement de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, à pratiquer des visites et saisies en plusieurs lieux, peut prononcer une seule ordonnance dès lors que cette ordonnance est notifiée à chacune des personnes concernées ; qu'il résulte du dossier déposé au greffe de la Cour de Cassation, ainsi que du procès-verbal de visite et saisie, que l'ordonnance attaquée n'a pas été notifiée à la société domiciliataire Madeleine prestige plus dans laquelle se trouvaient les sièges sociaux des sociétés SARL BGC invest, SA Créations Michel X... et SARL Caroline de Brugghe ; que, pourtant, cette société domiciliataire dont la visite était prévue par l'ordonnance attaquée et qui a bien été visitée par l'Administration aurait dû se voir notifier l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi, n'ayant pas été notifiée à la société domiciliataire Madeleine prestige plus, l'ordonnance attaquée a violé l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; alors, d'autre part, que, pour satisfaire aux exigences de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, les ordonnances autorisant une visite domiciliaire doivent constater concrètement l'origine apparemment licite de toutes les pièces produites par l'administration fiscale à l'appui de sa requête ; qu'ainsi, ces ordonnances doivent préciser l'origine de chacune des pièces produites par l'Administration, afin de permettre à la Cour de Cassation de contrôler la régularité desdites ordonnances ; que l'ordonnance attaquée, qui s'est contentée d'affirmer, sans autre précision, que les pièces produites par l'Administration à l'appui de la requête avaient une origine apparemment licite, n'a donc pas constaté concrètement que chacune desdites pièces avait une origine apparemment licite, puisque cette ordonnance n'a pas précisé l'origine de chacune de ces pièces ; qu'ainsi, l'ordonnance attaquée qui n'a pas permis à la Cour de Cassation de contrôler sa régularité, a violé l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; alors, en outre, que l'ordonnance autorisant l'administration fiscale à opérer une visite domiciliaire est réputée avoir été rédigée par le magistrat qui l'a signée, sauf preuve contraire ; que, s'il est établi par une preuve indiscutable que l'ordonnance n'a pas été rédigée par le magistrat qui l'a signée, l'ordonnance ne peut plus être réputée avoir été rendue par ce magistrat ; que l'ordonnance attaquée contient exactement aux mêmes endroits les mêmes erreurs typographiques qu'une autre ordonnance rendue dans la même affaire au nom du président du tribunal de grande instance de Lyon à propos de la visite domiciliaire de locaux situés dans le ressort de ce dernier tribunal ; qu'en effet, le rédacteur de ces deux ordonnances met tantôt un espace entre une virgule et le mot qui la précède, tantôt aucun espace ; que le rédacteur des ordonnances a placé deux virgules côte-à-côte en haut de la page 8 de deux ordonnances ; qu'une telle similitude ne peut être le fruit du hasard ;
que ces ordonnances ont été rédigées à l'aide de la même police de caractères et sur la même imprimante ; qu'il est ainsi établi que ces deux ordonnances rendues par les tribunaux de grande instance de Paris et de Lyon ont été rédigées par le même rédacteur, à savoir par l'administration fiscale ; qu'ainsi, preuve étant apportée que ces ordonnances ont été rédigées par l'administration fiscale, elles ne peuvent plus être rédigées par lesdits tribunaux de grande instance ; que, n'ayant pas été rédigée par le magistrat compétent, l'ordonnance attaquée a donc violé l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; et alors, enfin, que l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui stipule notamment que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial implique que le président du tribunal de grande instance compétent pour autoriser la visite des lieux soit tout à la fois indépendant de l'autorité administrative et des parties au litige, ainsi qu'impartial vis-à-vis de ces dernières ; que cette impartialité doit être appréciée non seulement subjectivement, en ce qu'en son for intérieur, le juge ne dissimule aucune raison de favoriser ou de défavoriser l'une des parties, mais aussi objectivement en ce que, quelle que soit l'impartialité subjective du juge, les apparences ne doivent pas faire craindre de la part des justiciables que le juge ait pu manquer d'impartialité, que la présomption suivant laquelle l'ordonnance autorisant les perquisitions est réputée rédigée, tant pour ce qui est de ses motifs que pour son dispositif, par le président du tribunal de grande instance ne saurait faire obstacle à l'application des principes susmentionnés, sauf à établir une présomption irréfragable qui priverait le contribuable d'un contrôle adéquat du juge de cassation, ce qui entraînerait également une méconnaissance de l'article 6 de la Convention susvisée ; que ces règles substantielles s'infèrent également du principe fondamental, à valeur constitutionnelle, de la neutralité du service public judiciaire, ainsi que du principe de l'indépendance des juridictions, lui aussi de nature constitutionnelle ; que l'ordonnance attaquée contient, exactement aux mêmes endroits, les mêmes erreurs typographiques qu'une autre ordonnance rendue dans la même affaire au nom du président du tribunal de grande instance de Lyon à propos de la visite domiciliaire de locaux situés dans le ressort de ce dernier tribunal ; qu'en effet, le rédacteur de ces deux ordonnances met tantôt un espace entre une virgule et le mot qui la précède, tantôt aucun espace ; que le rédacteur des ordonnances a placé deux virgules côte à côte en haut de la page 8 des deux ordonnances ; qu'une telle similitude ne peut être le fruit du hasard ; que ces ordonnances ont été rédigées à l'aide de la même police de caractères et sur la même imprimante ; qu'il est ainsi établi que ces deux ordonnances rendues par les tribunaux de grande instance de Paris et de Lyon ont été rédigées par le même rédacteur, à savoir par l'administration fiscale ;
qu'ainsi, preuve étant apportée que ces ordonnances ont été rédigées par l'administration fiscale, il convient d'en conclure qu'en portant sa signature sur l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal de grande instance de Paris, a donc méconnu l'obligation d'impartialité objective qui s'imposait à lui ainsi que les exigences de l'indépendance de l'autorité judiciaire par rapport à l'administration fiscale ; que, ce faisant, il a violé les stipulations de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les principes à valeur constitutionnelle de neutralité et d'indépendance du service public judiciaire ;
Mais attendu, en premier lieu, que le défaut de notification de l'ordonnance à la société Madeleine prestige plus, qui a pour seule conséquence que le délai de pourvoi n'a pas couru à son encontre, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité ladite ordonnance ;
Attendu, en deuxième lieu, que, dès lors qu'il a constaté l'origine apparemment licite des pièces produites, le président du tribunal a satisfait aux exigences de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ;
Et attendu, en troisième lieu, que les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue en application de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales sont réputés être établis par le juge qui l'a rendue et signée ; qu'une telle présomption ne porte pas atteinte aux principes d'impartialité, de neutralité et d'indépendance du juge ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.